La AFA, Fédération argentine de Football, vient de perdre son plus fort pilier en la personne de Julio Grondona, 82 ans, son inamovible président depuis trente-cinq ans.
La une de Clarín ce matin Cliquez sur l'image pour découvrir les textes, moins alarmistes que les titres |
Chef
autocratique et discrétionnaire, très puissant à la FIFA, bouffi
de sa propre puissance jusqu'à la caricature, haï de nombreux
amoureux du foot en Argentine, à commencer par Diego Maradona, avec lequel
il avait des rapports plus qu'orageux jusqu'à il y a peu, au dernier Mundial, celui du Brésil, Julio Grondona laisse un grand
vide derrière lui, un vide qu'il a sciemment contribué à
constituer en empêchant la relève de se manifester.
Il
avait une devise : Todo pasa (tout passe), une pensée volée à
sainte Thérèse d'Avila (mais, ça, bien sûr, il ne s'en est guère
vanté) (1). Une devise qu'il portait ostensiblement sur une grosse
chevalière en or. Tout passe en effet, et lui aussi.
Ce
matin, les unes des journaux se partagent à part égale ou presque
entre sa disparition et le sort du pays suspendu au règlement à New
York d'une partie de la dette externe, un point que la presse en
Europe tient pour résolu au détriment du grand pays sud-américain
(à les lire, l'Argentine serait d'ores et déjà irrémédiablement
en faillite) alors que le gouvernement n'a pas dit son dernier mot et s'évertue à garantir la souveraineté nationale contre une petite
poignée de créanciers privés qui veulent imposer la loi de leurs
intérêts à court terme au monde entier, dans une invraisemblable
course à un libéralisme ultra-dérégulé, soutenue par quelques
pétroliers texans et toute chose approchante dont le profit est le Veau d'Or.
Sur Página/12, c'est pas mal non plus. en vedette néanmoins le très jeune ministre des Finances pendant sa conférence de presse "Il n'est pas questions de faillite". |
Le
gouvernement argentin continue donc de chercher des solutions et quelques banques nationales pourraient s'associer pour racheter cette dette aux hedge funds : on s'entend mieux entre gens du même
métier, de part et d'autre de l'équateur, et de banque nationale à
Etat au sein d'un même pays (en tout cas, il faut l'espérer). Tout ça pour 7%
de créanciers qui font suer le reste du monde et ne veulent pas de
l'échéancier accepté il y a plusieurs années par 93% des fonds
détenteurs de la dette argentine. Quand la minorité fait la loi,
c'est la loi de la jungle.
Dans
le cadre de ce blog (et en plus pendant mes vacances !), je ne peux
vous renvoyer à la totalité des articles disponibles sur l'une et
l'autre affaires du jour. Chaque quotidien a publié une bonne
douzaine d'analyses, entrefilets, éditoriaux sur chacune d'elles. A
noter toutefois qu'à part La Nación, tous les journaux titrent sur
les ressources tactiques et financières dont l'Argentine dispose
encore. Seule La Nación affiche une position défaitiste. Ce qui
explique peut-être pourquoi les homologues européens reproduisent
si fidèlement et avec une telle sinistrose la version des faits qui a été servie sur un plateau
à la presse, hier, par les hedge funds eux-mêmes, fidèlement
suivis en cela par les agences de notation (La Nación passe pour le
journal argentin de référence et c'est donc le seul que consultent
nos journalistes, hormis leurs confrères espagnols, qui eux font
l'effort d'aller regarder plus loin que le bout du museau de leur
souris !).
La Nación, le seul à baisser le pavillon national |
Sur
la mort de Grondona, on pourra lire l'un des articles de Página/12,
l'un des articles de Clarín, l'un des articles de La Nación et l'un de ceux de La Prensa.
Le
Pape François a fait parvenir un télégramme de condoléance
ultra-minimaliste mais aussitôt publié par la AFA sur son site Internet (vous remarquerez que sur la version anglophone du site, il n'y a pas un mot sur la mort du grand patron, alors que dans les pages en espagnol... Mama mia !)
Leonel Messi
fait le voyage pour se recueillir dans la chapelle ardente.
En
signe de deuil, il n'y aura pas de match de foot ce week-end sur tout
le territoire du Cône Bleu. Et ce malgré l'exploit du Club Atlético
San Lorenzo de Almagro (l'équipe du Pape) qui disputera la phase
finale de la Copa Libertadores contre une équipe paraguayenne. Match
aller mercredi prochain à Asunción. Attention : il va y avoir
du sport. Cela fait si longtemps qu'ils lorgnent sur cette coupe, les
azulgranas !
(1)
Nada te turbe, nada te espante. Todo [se] pasa. Dios no se muda. La
pacienza todo lo alcanza. Quien a Dios tiene nada le falta. Sólo
Dios basta. Que rien ne te trouble, que rien ne t'épouvante. Tout
passe. Dieu ne bouge pas. La patience obtient tout. Rien ne manque à
qui a Dieu. Il n'y a que Dieu pour nous suffire.