Colosses des lettres universelles Une des pages culturelles de La Prensa aujourd'hui |
Hier,
22 avril, c'était le quadricentenaire de la disparition de Miguel de
Cervantes. Aujourd'hui, 23 avril, ce pourrait être celui de la mort
de William Shakespeare, dont la date de décès reste incertaine
(certains historiens la place au 3 mai, la datation n'étant pas
encore complètement stable en Europe à cette époque-là (1) et
l'identité exacte de l'écrivain donnant lieu à beaucoup de
spéculations). A noter que le même jour, à Courdoue, en Espagne,
est décédé un autre grand écrivain, un descendant de l'Inca,
Garcilaso de La Vega (de son vrai nom Gómez Suárez de Figueroa),
lui dont personne ne fait mémoire aujourd'hui... (2)
"Le livre qui a fait de nous ce que nous sommes", dit le gros titre en lettres blanches |
Ce
n'est pas tout à fait par hasard que la Feria de Libro à Buenos
Aires a été inaugurée cette semaine : il fallait que ce jour
si symbolique, pour deux des langues les plus répandues dans le
monde, soit inséré dans le programme de la manifestation, qui
présente aussi aujourd'hui un important programme d'activités à
l'intention des loupiots.
Couverture du nouveau roman de Carlos Gamerro |
Les
trois journaux de droite marquent dans leurs éditions de ce matin ce
double quatrième centenaire. En revanche, Página/12 n'en parle même
pas, lui qui l'année dernière s'apprêtait à en faire un véritable
événement auquel il aurait associé le souvenir de l'Inca
Garcilaso. Mais l'alternance politique inattendue est passée par là
et Página/12 a d'autres chats à fouetter dans l'actualité
politique et économique (le journal attaque le gouvernement qui paye
la dette aux plus spéculateurs des créanciers du pays et défend
bec et ongles la famille Kirchner sérieusement mise à mal par les
témoins et inculpés de divers procès pour corruption qui se
mettent à table les uns derrière les autres).
L'auteur
argentin Carlos Gamerro, ancien enseignant de littérature à
l'Université de Buenos Aires (UBA) et traducteur de littérature
anglophone (en particulier le drame shakespearien Hamlet), vient de
publier un roman où il fait se rencontrer deux dramaturges
élisabéthains, John Fletcher et Shakespeare, sous le titre Cardenio
(3), un roman savant (dans la veine inaugurée par Umberto Eco) qu'il couronne avec la rencontre mythique, dont tous
les amoureux de la Renaissance rêvent mais qui a peu de chance de
s'être produite, la rencontre entre le fils de Stratford-upon-Avon
et le Manchot de Lépante... Tant Clarín que La Nación
l'interviewent ce matin dans leurs colonnes. Ce soir, samedi 23 avril 2016, à 18h, dans la
salle Victoria Ocampo, à la Feria del Libro, l'Argentin partagera
une table-ronde sur la modernisation de la langue des classiques à
l'usage du grand public avec le cervantiste espagnol José Manuel
Lucía Megías.
Pour
en savoir plus :
Sur
Carlos Gamerro et son dernier roman
lire
l'interview dans Ñ, le supplément culturel de Clarín
consulter
le site Internet de l'écrivain
consulter
la fiche de Cardenio, sur le site de la maison d'édition (Edhasa)
lire
l'annonce de la prochaine présentation du roman au MALBA (le musée
d'art moderne de Buenos Aires), mercredi prochain
Sur
le double quadricentenaire en soi
lire
l'article de La Nación sur Cervantes : une interview de
l'universitaire José
Manuel Lucía Megías, spécialiste espagnol de Don Quichotte
Sur
les activités pour le jeune public
lire
l'article de Página/12 sur les invités belges du jour, des illustrateurs qui travaillent en littérature jeunesse
lire
l'article de Página/12 sur les activités proposées aux petits.
(1)
Qui plus est, le 23 avril pourrait bien être aussi la date de sa
naissance, en 1564, selon l'une des identités que les historiens lui
donnent. Une date de baptême à son nom a en effet été établie le
26 avril 1564.
(2)
Il a laissé un travail historiographique très important : la
seule histoire de la dynastie de l'Inca et du Pérou précolombien
écrite par une plume quechua, par un auteur appartenant au peuple
vaincu (et même à son élite sociale), en espagnol. Il n'y a aucun
autre témoignage écrit de l'histoire vue de ce côté-là. Et
l'homme a été un admirable manieur de la langue qu'on appelle
maintenant la langue de Cervantes.
(3)
Cardenio est supposé être une œuvre perdue de Shakespeare, un
véritable fantôme littéraire qui hante les shakespeariens du monde
entier.