mardi 21 juin 2016

Hommage au Précurseur Francisco de Miranda à l'Arc de Triomphe [ici]

Iconographie partiellement apocryphe de Miranda,
dans sa jeunesse et l'époque de la Révolution du 19 avril 1810 à Caracas

Le général Francisco de Miranda, précurseur de l'indépendance de l'Amérique du Sud, sans qui aucun des actuels Etats du sous-continent n'existerait dans sa forme actuelle, a servi sous les drapeaux français dans l'Armée du Nord, sous la première République française. Il figurait, comme général de brigade (maréchal de camp) parmi les vainqueurs de Valmy et de Jemmapes en septembre et novembre 1792, puis d'Anvers avant d'être arrêté, par la trahison de Dumouriez, devant Neerwinden, en mars 1793, alors qu'il était devenu général de division.

Né à Caracas, le 28 mars 1750, Francisco de Miranda est mort, en prison, à Cadix, comme rebelle au roi d'Espagne, le 14 juillet 1816, il y aura deux cents ans dans quelques jours.

Miranda à l'époque où il servait la France

En partenariat avec le Souvenir Napoléonien, l'Ambassade du Venezuela viendra lui rendre hommage une heure avant la cérémonie quotidienne de ravivage de la Flamme du souvenir, demain mercredi 22 juin 2016, à 17h30, au pied de l'Arc de Triomphe où son nom est gravé parmi ceux des généraux de la Révolution et de l'Empire.

J'y serai en qualité d'historienne spécialisée sur l'Amérique du Sud. En effet, sans Miranda, il n'y aurait eu ni Simón Bolívar, ni Bernardo O'Higgins, qu'il forma tous les deux, ni José de San Martín, tous trois ses disciples, directement ou indirectement.

Le film du bicentenaire au Venezuela : Miranda revient [à Caracas en 1810]
Remarquez l'anachronisme de la robe de la femme à l'arrière-plan

Et pourtant ils sont très peu nombreux, les chercheurs européens, à s'intéresser, dans les institutions scientifiques, à ce personnage hors normes et à le faire connaître, lui qui fut le seul acteur politique à avoir participé à trois révolutions, d'abord aux Etats-Unis (on parlait alors des Treize Colonies), ensuite en France et enfin en Amérique du Sud, où il ne vit pas son rêve se réaliser. Un rêve pour lequel il avait sillonné le vieux monde en tout sens pour collecter tous les savoirs disponibles : modes de gouvernement, pratiques militaires, botanique, agriculture, élevage, artisanat et manufacture, arts, philosophie... Il nous a légué un important fonds d'archives qu'il a constitué tout au long de sa vie et que le Venezuela a fait inscrire il y a quelques années au Patrimoine documentaire de l'Humanité : le Colombeia, que la Bibliothèque nationale d'Espagne a récemment mis en ligne pour les besoins des historiens (dans l'édition effectuée de 1929 à 1950 grâce à des imprimeries situées à Caracas, à La Havane, à Buenos Aires et à Santiago du Chili). Physiquement, ces dossiers sont entreposés à Caracas, sous la garde de l'Académie nationale d'histoire.

Miranda est le seul Sud-Américain qui ait participé au mouvement des Lumières.

"Miranda n'est plus l'homme d'un seul pays, écrivait son avocat, Claude-François Chauveau-Lagarde (1) au lendemain du 9 Thermidor. Il est devenu une sorte de propriété commune, inviolable."

C'est à cet homme exceptionnel que l'hommage sera rendu à l'heure où la flamme est rallumée tous les jours sous l'Arc de Triomphe, dans ce Paris qu'il a tant aimé.

Pour mes lecteurs sud-américains, voici les accès au site Internet de l'Arc deTriomphe et à celui de la Flamme du souvenir.



(1) Claude-François Chauveau-Lagarde (1756-1841) fut l'avocat ultra-courageux de Marie-Antoinette et de Charlotte Corday et tenta d'être celui de Madame Elisabeth, la sœur de Louis XVI, mais elle fut condamné sans l'assistance d'un défenseur ni même avoir pu rencontrer le moindre avocat. Il fut également le défenseur de Miranda, dont il participa à l'acquittement en 1794, ce qui faillit lui coûter la liberté (peut-être la vie, puisque le principe même de la défense fut supprimé pendant la Terreur et les avocats dans son genre devinrent des suspects). C'est à peine tiré lui-même du danger qu'en tant qu'avocat il s'exprimait ainsi, anonymement toutefois, quelques jours après la chute de Robespierre. Ce juriste hors pair repose au cimetière de Montparnasse où sa tombe est toujours soignée, surtout par les royalistes à la cause desquels il se lia en 1795, ce qui ne l'empêcha pas de reprendre sa profession sous le Consulat et de ne plus avoir à y renoncer jusqu'à sa mort.