mercredi 12 octobre 2016

Il y a cent ans aujourd'hui, Yrigoyen devenait président de l'Argentine [Actu]


Le 12 octobre 1916, le jour anniversaire de la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb, le premier président argentin élu au suffrage universel (masculin) prêtait serment au Congrès et prenait ses quartiers à la Casa Rosada, dans une manifestation d'enthousiasme populaire débordant qui donna beaucoup de mal à l'escorte présidentielle, bien en peine à plusieurs reprises d'ouvrir le chemin au cortège officiel.

Une des rares pages que l'hebdomadaire illustré Caras y Caretas
peut publier sur le nouveau président dans son édition du 14 octobre 1916
La famille du président, qui n'est pas marié.
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En 1912, le président Saenz Peña avait fait voter une loi qui porte son nom et qui mettait un terme à des pratiques électorales fort peu démocratiques : suffrage censitaire et vote à haute voix (le fameux voto cantado, vote chanté, qui faussait la sincérité du scrutin). La loi Saenz Peña mettait en place le vote obligatoire à bulletin secret pour tout citoyen majeur et masculin né argentin (les citoyens naturalisés ne pouvaient pas accéder aux urnes, car le flot des migrants faisait trop peu à la très haute bourgeoisie encore au pouvoir à cette date).

Double page intérieure de Caras y Caretas du 21 octobre 1916
Cortège présidentiel sur Avenida de Mayo, en chemin vers la Casa Rosada
On reconnaît l'élu debout dans sa voiture, en redingote et haut-de-forme
et les silhouettes des grenadiers à cheval quelque peu dépassés par la pression de la foule
Remarquez aussi les casques à pointe empruntés à l'armée prussienne du temps de Bismarck
L'Argentine est déjà ce melting-pot qui mélange toute l'Europe et toute l'histoire...
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Ce fut un homme de gauche, l'un des fondateurs de l'UCR (Unión Cívica Radical) en 1891, qui fut élu. Le neveu de Leandro Alem qui s'était suicidé peu d'années auparavant. Le petit-fils d'un partisan du gouverneur fédéral Juan Manuel de Rosas, un certain Alen, qui avait été pendu haut et court, sur Plaza de Mayo, dans la féroce épuration qui avait suivi la bataille de Morón qui avait mis fin au régime du tyran. Pour la première fois depuis la Revolución de Mayo en 1810, Hipólito Yrigoyen allait mener une politique sociale forte, procéder à de nombreuses nationalisations (c'est lui qui a fondé la compagnie pétrolière nationale, YPF) et encourager l'industrialisation pendant les six ans du mandat non renouvelable de ce temps-là. Il a laissé dans l'histoire l'image d'un homme intègre et tolérant, ce qui constituait un immense changement par rapport à la période précédente, celle de la Generación del Ochenta, marquée par la violence, le racisme et la corruption. Il faisait revivre l'image sévère et honnête d'un autre grand président, Domingo Sarmiento (1811-1888).

Hipólito Yrigoyen fut le président du tango de la Guardia Vieja. Il est associé à l'épanouissement du tango, à l'aurore de la carrière de Carlos Gardel et il est contemporain des derniers payadors qui dominaient le panorama de la musique populaire dans le bassin du Río de la Plata. L'immense majorité des artistes de tango furent ses partisans : Homero Manzi, Ignacio CorsiniAníbal Troilo et tant d'autres. Les mêmes qui virèrent pour la plupart dans le péronisme à partir de 1943 lorsque le charisme du général rejeta dans l'ombre une UCR qui ne s'est jamais vraiment relevé de cette crise. Parmi ses admirateurs, Yrigoyen eut un certain Jorge Luis Borges...

A Paris, le 20 juin 1816
Le Temps rend compte de l'élection de Hipólito Yrigoyen
dans un long article
malgré une actualité française dominée par les combats
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L'Argentine s'est dotée d'un Instituto Nacional Yrigoyeneano, comme elle a un institut pour San Martín, pour Belgrano, pour Sarmiento, pour Evita... L'INY organise aujourd'hui différentes manifestations à Buenos Aires ainsi qu'une exposition commémorative.

Le sujet n'a guère inspiré la presse. Página/12 se contente de rapporter le désaccord d'un des piliers du radicalisme d'aujourd'hui, le député Ricardo Alfonsín, fils du défunt président radical Raúl Alfonsín, le président du retour à la Constitution après la dictature militaire de 1976, avec le Président Macri, qu'il ne rejoindra pas aujourd'hui à Olivos pour les cérémonies officielles, et l'agence de presse nationale Télam fait un modeste rappel historique.

Le Président Mauricio Macri rendra un hommage officiel à Olivos cet après-midi à 16h, en s'entourant de quelques uns de ses alliés radicaux, l'UCR participant à la coalition gouvernementale Cambiemos.

Pour aller plus loin :
consulter le blog de l'Institut national yrigoyeano, qui n'est pas la vitrine digitale la mieux conçue du monde (les manipulations ne sont pas des plus simples à réaliser)
consulter aussi la page Facebook de l'institution.