Le 4 juillet 1992, vaincu par l’AVC qui l’avait frappé deux ans plus tôt et l’avait laissé aphasique et grabataire, Astor Piazzolla rendait l’âme à Buenos Aires, à 71 ans. 2021 est donc l’année du centenaire de sa naissance mais, pour que le groupe Octubre soit prêt, cette date-là était sans doute trop proche de la fin des grandes vacances d’été en hémisphère sud, alors qu’au milieu de la pandémie, une seconde vague s’annonçait et menaçait de désorganiser un peu plus les activités du groupe. C’est donc aujourd’hui que le groupe médiatique sort son hommage au grand compositeur qui a rendu sa splendeur internationale à la musique de tango, après notre oubli des tournées triomphales de Carlos Gardel en Europe et aux États-Unis dans les années 1920 et 1930.
Aujourd’hui sort donc un
livre, Astor
Piazzolla, Momentos,
sous deux grandes signatures de Octubre : María
Seoane, rédactrice en chef de Caras
y Caretas, et
Víctor Hugo Morales, la grande voix de la radio AM 750, qui a
retrouvé cette année le chemin de Radio Nacional (1)
pour y animer une émission régulière intitulée Estación
Piazzolla/100 años (gare
Piazzolla/100 ans). Très connu comme commentateur footballistique
(c’est lui qui a poussé à la radio le cri historique de
« GOOOOOOOOOOOLLLLLLLLLLLLL » pour saluer le but
spectaculaire d’un Maradona qui avait traversé d’un trait, balle
au pied, tout le terrain au Mundial du Mexique), Víctor Hugo Morales
est aussi un éminent tangologue qui a animé de nombreuses et
excellentes émissions sur les grands musiciens du genre, entre
autres Piazzolla (mais pas que!). Quant à María Seoane, elle a dû
s’exiler au Mexique sous la dernière dictature militaire comme feue la
fille de Piazzolla, Diana, une syndicaliste très engagée (au grand
dam de son père). Dans cet exil forcé, les deux femmes se sont
connues et fréquentées.
Une du supplément culturel de Pagina/12 |
Momentos sort en édition de luxe, richement illustrée de photographies tirées d’un grand nombre de sources, dont deux agences de presse et la Fundación Piazzolla, animée par la famille. Les deux auteurs y racontent trente épisodes qu’ils ont jugés significatifs de la vie de l’artiste disparu.
En complément de cet ouvrage,
sort aussi un disque, la réédition d’un concert historique, celui
du 19 mai 1970 où Piazzolla s’est produit à Buenos Aires sur la
scène du Teatro Regina avec son Quinteto. C’est au cours de cette
soirée mémorable qu’il a créé en public et en intégrale ses
Cuatro Estaciones
Porteñas (quatre
saisons de Buenos Aires), dont on ne connaissait encore que deux
morceaux.
Comme vous pouvez vous en douter, l’événement reste confiné à la gauche argentine. Seul Página/12, le quotidien du groupe, mentionne cette sortie aujourd’hui. Il en fait même la une de ses pages culturelles.
Pour aller plus loin :
(1) Morales avait dû quitter l’antenne sous le gouvernement de Mauricio Macri. Trop kirchneriste pour cette nouvelle majorité d’alternance. Ceci dit, actuellement, les grandes voix macristes ont à leur tour quitté le navire et encore plus rapidement : dès les résultats de l’élection connus. Ils se sont tous éparpillés sans même attendre la prestation de serment du nouveau président. Sous Cristina Kirchner, María Seoane, journaliste qui a commencé sa carrière à Clarín, dirigeait Radio Nacional.