Le projet Trova Tanguera, créé pour lutter contre les effets des confinements successifs sur l’activité musicale, réunit une vingtaine de solistes et de formations, tous des créateurs de tango contemporain. Il s’agit d’un projet artistique, social et politique qui entend resté fidèle aux sources du genre lorsque, à partir des années 1880, il a commencé à forger l’identité culturelle du peuple urbain et bigarré du Río de la Plata. L’animatrice du projet n’est autre que Vanina Steiner, à la fois tangologue, initiatrice de nombreux chantiers et créatrice d’outils destinés à mettre en lumière et à fédérer les différents collectifs artistiques, souvent adeptes de l’autogestion, qui luttent pour que vive le tango d’auteurs dans un secteur dominé, comme ailleurs dans le monde, par des capitaux qui ne soutiennent que des spectacles, des disques et des documentaires susceptibles de balayer large. Vanina Steiner est à la tête d’un magazine de tango alternatif.
Le disque a d’ailleurs été enregistré en partie et mixé dans les studios de la Universidad Nacional de Lanús, dans la banlieue sud de Buenos Aires, une université bien connue pour son appartenance idéologique à la gauche.
Parmi les artistes impliqués, nous en retrouvons certains déjà bien connus des lecteurs de Barrio de Tango comme Marisa Vázquez, Juan Seren, Marina Baigorria, Facundo Radice, Alejandro Guyot, Noelia Sinkunas et le Quinteto Negro La Boca, pour n’en citer que quelques uns.
Ce nouveau disque, Viento Sur (vent du sud), d’une durée de 34 minutes, se veut un manifeste engagé. Il parie sur la force du collectif et entend lutter notamment contre la politique culturelle de la Ville de Buenos Aires (gouvernée à droite) qui voudrait bien réduire le tango à une pompe à fric et un appât pour les touristes des pays développés, auxquels le secteur donne à connaître la plupart du temps un tango assez représentatif du passé (mais pas toujours) et très peu pour ne pas dire pas du tout du présent, comme si le tango avait vécu. Il est vrai qu’il est assez facile de faire disparaître le caractère contestataire du tango d’autrefois surtout lorsqu’on le présente à un public qui ne comprend pas la langue tandis que cet aspect dans la création contemporaine saute aux oreilles (et aux yeux).
De nombreux morceaux de ce disque ont été conçus, créés et enregistrés par leurs créateurs en distanciel à cause du confinement plus ou moins sévère qui a régné depuis mars 2020 dans Buenos Aires et sa région, l’une des plus touchées par l’épidémie (la plus densément peuplée aussi de tout le pays).
Trova Tanguera vient de mettre les morceaux du disque sur sa chaîne Youtube qui propose aussi la bande-annonce de leur documentaire, militant lui aussi.
Sans surprise, le seul quotidien à en parler est Página/12. Parmi les radios qui en ont parlé, on trouve Nacional Folklórica, du groupe Radio Nacional, dans son émission Tango Siglo XXI, et nos amis de Fractura Expuesta.
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