jeudi 28 octobre 2021

Le Nutriscore arrive en Argentine [Actu]

"Savoir pour manger", dit le gros titre
au-dessus de cette photo où est reproduit
l'hexagone noir du futur étiquetage de façade
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Après plusieurs mois de débat parlementaire et un long retard dû aux confinements, c’est une Chambre des députés revenue à la session plénière en présentiel qui a adopté avant-hier, avec une large majorité, malgré la résistance de la droite libérale, une loi qui impose un étiquetage nutritionnel sur la façade des produits issus de l’industrie agro-alimentaire.

Ce système de nutriscore est déjà en place dans plusieurs pays voisins comme le Chili et le Pérou et il vise le même objectif : permettre aux consommateurs de comprendre les qualités et les défauts de ce qu’ils achètent dans les grandes enseignes. On n’est pas étonné d’apprendre que les groupes de pression de l’industrie ont tout fait pour discréditer le système et ça continue d’ailleurs ce matin même sur la une de La Nación (journal libéral qui se fait volontiers l’écho du grand patronat), qui suggère que le système ne fait pas consensus dans la communauté scientifique. La stratégie du doute, comme toujours…

L'info est traitée tout en bas :
"Vote de la loi qui informe sur le contenu des aliments"
C'est discret, n'est-ce-pas ?
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La loi va aussi réglementer le marketing des produits : il sera désormais interdit d’utiliser certaines tactiques pour attirer les enfants comme d’utiliser l’image d’un personnage auquel ils puissent s’attacher ou s’identifier. Cette loi va donc compliquer à court terme la vie de certains producteurs qui vont devoir changer leur packaging.

Hier, Página/12, qui milite depuis toujours pour une loi en la matière, en faisait sa une tandis que l’information était absente des premières pages des autres titres. Il fallait parfois fouiller longtemps à l’intérieur des sites pour trouver un article se rapportant à ce nouvel étiquetage.

Il faut dire qu’en Argentine, la malbouffe fait des ravages : les produits que l’on trouve dans les supérettes, les supermarchés et les kiosques à friandises et autres snacks du sucre à gogo et beaucoup de graisses (en particulier de l’huile de palme hydrogénée en pagaille). Il suffit d’observer la rue et notamment dans les alentours des écoles à l’heure où les élèves entrent ou sortent pour constater l’obésité qui galope dans la classe moyenne et les classes populaires. A table, il est fréquent qu’enfants comme adultes accompagnent leur repas d’un soda ou d’une eau aromatisée (laquelle contient beaucoup de glucides, comme on le sait bien maintenant en Europe). Comme par ailleurs, les desserts sont souvent très sucrés (abondance de dulce de leche dans un nombre considérable de recettes) et que la consommation de fruits et légumes est globalement basse, vous imaginez assez facilement la bombe sanitaire que la nourriture ultra-transformée représente pour la population, même si les plats préparés sont beaucoup moins nombreux et nettement moins fréquents que sous nos latitudes. A la maison, en Argentine, matin, midi et soir, on continue de cuisiner bien davantage qu’en France. Il faut déjà un certain pouvoir d’achat pour faire appel aux plateformes et se faire livrer par un coursier sous-payé un repas inscrit à la carte d’un restaurant qui ne fait pas toujours sa propre cuisine (les restaurants argentins ont eux aussi recours à pas mal de produits industriels livrés tout prêts).

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :


Ajout du 31 octobre 2021 :


Ajouts du 12 novembre 2021 :
lire cet article de Clarín qui visent les dix spécialités cuisinées argentines qui n’auront pas le nutri-score (ce qui est normal, ce ne sont pas des produits industriels)
lire cet article de La Nación qui fait l’effort pédagogique d’expliquer le bon usage de ce nouvel étiquetage à ses lecteurs)