"Savoir pour manger", dit le gros titre au-dessus de cette photo où est reproduit l'hexagone noir du futur étiquetage de façade Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
Après plusieurs mois de débat parlementaire et un long retard dû aux confinements, c’est une Chambre des députés revenue à la session plénière en présentiel qui a adopté avant-hier, avec une large majorité, malgré la résistance de la droite libérale, une loi qui impose un étiquetage nutritionnel sur la façade des produits issus de l’industrie agro-alimentaire.
Ce système de nutriscore est
déjà en place dans plusieurs pays voisins comme le Chili et le
Pérou et il vise le même objectif : permettre aux
consommateurs de comprendre les qualités et les défauts de ce
qu’ils achètent dans les grandes enseignes. On n’est pas étonné
d’apprendre que les groupes de pression de l’industrie ont tout
fait pour discréditer le système et ça continue d’ailleurs ce
matin même sur la une de La
Nación (journal
libéral qui se fait volontiers l’écho du grand patronat), qui
suggère que le système ne fait pas consensus dans la communauté
scientifique. La stratégie du doute, comme toujours…
L'info est traitée tout en bas : "Vote de la loi qui informe sur le contenu des aliments" C'est discret, n'est-ce-pas ? Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
La loi va aussi réglementer le marketing des produits : il sera désormais interdit d’utiliser certaines tactiques pour attirer les enfants comme d’utiliser l’image d’un personnage auquel ils puissent s’attacher ou s’identifier. Cette loi va donc compliquer à court terme la vie de certains producteurs qui vont devoir changer leur packaging.
Hier, Página/12, qui milite depuis toujours pour une loi en la matière, en faisait sa une tandis que l’information était absente des premières pages des autres titres. Il fallait parfois fouiller longtemps à l’intérieur des sites pour trouver un article se rapportant à ce nouvel étiquetage.
Il faut dire qu’en Argentine, la malbouffe fait des ravages : les produits que l’on trouve dans les supérettes, les supermarchés et les kiosques à friandises et autres snacks du sucre à gogo et beaucoup de graisses (en particulier de l’huile de palme hydrogénée en pagaille). Il suffit d’observer la rue et notamment dans les alentours des écoles à l’heure où les élèves entrent ou sortent pour constater l’obésité qui galope dans la classe moyenne et les classes populaires. A table, il est fréquent qu’enfants comme adultes accompagnent leur repas d’un soda ou d’une eau aromatisée (laquelle contient beaucoup de glucides, comme on le sait bien maintenant en Europe). Comme par ailleurs, les desserts sont souvent très sucrés (abondance de dulce de leche dans un nombre considérable de recettes) et que la consommation de fruits et légumes est globalement basse, vous imaginez assez facilement la bombe sanitaire que la nourriture ultra-transformée représente pour la population, même si les plats préparés sont beaucoup moins nombreux et nettement moins fréquents que sous nos latitudes. A la maison, en Argentine, matin, midi et soir, on continue de cuisiner bien davantage qu’en France. Il faut déjà un certain pouvoir d’achat pour faire appel aux plateformes et se faire livrer par un coursier sous-payé un repas inscrit à la carte d’un restaurant qui ne fait pas toujours sa propre cuisine (les restaurants argentins ont eux aussi recours à pas mal de produits industriels livrés tout prêts).
Pour aller plus loin :
Ajout du 31 octobre 2021 :
Ajouts du 12 novembre 2021 :
lire cet
article de Clarín
qui visent les dix spécialités cuisinées argentines qui n’auront
pas le nutri-score (ce qui est normal, ce ne sont pas des produits
industriels)
lire cet
article de La
Nación
qui fait l’effort pédagogique d’expliquer le bon usage de ce
nouvel étiquetage à ses lecteurs)