samedi 18 juillet 2020

Retour en phase 3 du déconfinement [Actu]

Une de Página/12
En haut, à gauche, la situation à Buenos Aires
à droite, celle dans la province

Hier soir, le président Alberto Fernández a annoncé, à travers une conférence de presse d’un peu plus de deux heures, les nouvelles modalités de lutte contre le covid-19 qui a déjà emporté plus de deux mille habitants de l’Argentine (sur 46 millions de personnes qui y vivent).

"Confinement flexibilisé par une ouverture
des activités échelonnée"
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

La conférence se tenait dans les jardins de la résidence de Olivos, dans la lointaine banlieue de Buenos Aires, que le président ne quitte plus, après deux tentatives de visite officielle dans des provinces, fort mal interprétées par la presse d’opposition.

Comme d’habitude, il était flanqué par le gouverneur de la province de Buenos Aires (dont fait partie la ville de Olivos) et par le chef de gouvernement de la Ville Autonome de Buenos Aires, qui appartient à l’opposition de droite mais se tient loyalement à ses côtés à chaque fois, malgré les critiques acerbes des faucons de son propre camp. Trois gouverneurs s’étaient joints par visio-conférence, dont le très droitier gouverneur de Jujuy, ce qui ne manque pas de surprendre quand on connaît la faille idéologique qui oppose droite et gauche dans le pays.

"Sortie échelonnée : le peuple a décidé",
proclame le gros titre sans qu'on sache très bien d'où il sort !
(sinon de la volonté de ce journal de nuire à la crédibilité du président)
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Le retour à la phase 3 du déconfinement, après une nouvelle période de phase 1, a été annoncée comme une étape vers une réorganisation pérenne du pays pendant tout le temps où le virus sévira et l’on sait maintenant que cela durera plusieurs mois, voire plus d’un an : le président a parlé « du retour à la vie habituelle dans un monde différent » (un oxymore qui n’est facile pour personne dans aucun pays du monde). Il s’est montré prudent, il a assumé d’avancer à tâtons en prenant en considération l’expérience des pays où l’épidémie a commencé avait d’atteindre l’Amérique du Sud. Il s’est exprimé avec l’humilité de ton qui le caractérise, à l’opposé des rodomontades de tant d’autres, qui campent pourtant sur des positions incompatibles les unes avec les autres (Macron, Johnson surtout avant sa maladie, Bolsonaro et Trump).

Les réouvertures vont s’échelonner jusqu’au 2 août et seront différentes en fonction des situations locales (souvent liées au degré d’urbanisation).

Seules neuf provinces vont pouvoir reprendre les classes dans les établissements scolaires à partir du mois d’août, pour entamer le second quadrimestre de l’année.

"La capitale ouvre des commerces et autorise le footing.
Dans la province, les entreprises ouvrent" dit le gros titre
tandis que la photo se rapporte à un fait divers
actuellement en instruction criminelle.

En phase 3, à Buenos Aires même, les commerces non essentiels vont pouvoir ouvrir à partir de lundi. Peu à peu, la moitié de la population retrouvera le droit de se déplacer pour se rendre à son travail et on avancera comme ça tout doucement, un œil sur la reprise économique, qui est indispensable (près de 25 % des entreprises de la capitale ont déjà mis la clé sous la porte), et l’autre sur les indicateurs sanitaires (nombre de contaminations, de morts et d’hospitalisations).
Dans la banlieue et l’ensemble de la province, les maires vont avoir plus d’autonomie pour décider en fonction de la situation de leur ville mais des règles communes vont s’appliquer car les échanges économiques entre la capitale fédérale et le tissu urbain qui l’entoure sont très intriqués.


Le monde de la culture et du tourisme restent sinistrés. Rien n’est possible autrement qu’en ligne. Ni spectacle, ni festival, ni ouverture de musée. Quant à la fête des Amis, lundi prochain, le 20 juillet, on oublie. Les réunions festives à domicile sont plus que déconseillées et à l’extérieur, elles sont interdites. Les lieux de culte resteront fermés, ce qui a donné à Elisa Carrió, pourtant officiellement retirée de la vie politique, l'occasion de se couvrir une nouvelle fois de ridicule en déclarant sur les réseaux sociaux que « le Saint-Sacrement était séquestré » et qu’il fallait permettre de célébrer la messe à l’air libre « parce que celui qui soigne et qui guérit, c’est Jésus ». Du grand guignol, comme d’habitude.

Le président et les gouverneurs ont enfin appelé les Argentins à faire preuve du sens des responsabilités et à ne pas oublier qu’aucune catégorie d’âge n’est épargnée par le virus dont la transmissibilité atteint des taux effarants et un vitesse qui dépasse les prévisions prises en compte dans les plans pandémie antérieurs.

Pour aller plus loin :
Le site Internet de La Nación n'a pas mis en ligne son article de une.


"Je sais qui sont ceux qui m'ont élu et quel pays je veux"
Une de Página/12 du 19 juillet 2020

Ajout du 19 juillet 2020 :
lire la grande interview de Alberto Fernández parue à la une de Página/12 de ce jour

Ajout du 20 juillet 2020 :
le président argentin a aussi accordé une interview exclusive au Financial Times mais cette fois-ci, il y parle surtout d'économie et de sortie de crise pour son pays (et ses créanciers). Ce week-end, les ministres de l'Economie du G20 se réunissaient pour débattre de la dette des pays pauvres.
Sur le site Internet de Financial Times, cette interview (publiée en anglais) n'est pas en libre accès.
La plupart des quotidiens argentins en présentent ce matin une synthèse en espagnol :
lire l'article de La Prensa
lire l'article de Clarín
lire l'article de La Nación