Image créée par le collectif Somos Argentina (l'Argentine, c'est nous)
Une
députée de la majorité (Frente para la Victoria,
le parti de Cristina Kirchner), Julia Perié, qui siège
pour la Province de Misiones, au nord-est de l'Argentine, vient
d'obtenir de la Chambre des Députés le vote d'une loi
qui fait du 30 novembre la Fête Nationale du Maté en
Argentine, si toutefois cette loi est confirmée par le Sénat.
Pourquoi
le 30 novembre ? Parce que c'est l'anniversaire de naissance
d'un des héros de l'indépendance dans les anciennes
Missions jésuites,
Andrés
Guacurarí Artigas, plus connu sur place comme Andresito.
L'homme était un Indien guarani, né dans l'une ou
l'autre agglomération fondée par les jésuites,
le 30 novembre 1778 (autrement dit, il était un strict
contemporain de José de San Martín, né lui aussi
dans la même région, à Yapeyú, le 25
février 1778). Andresito bénéficia de la
tradition de l'instruction populaire instituée par la
Compagnie de Jésus dans ces zones qui leur avaient été
confiées par le roi d'Espagne au 17ème
siècle et dont ils furent expulsés entre 1767 et 1773.
Mais une bonne partie du clergé diocésain, envoyé
sur place par l'évêque de Buenos Aires pour assurer la direction des âmes, reprit la tradition jésuite et continua,
presque clandestinement, d'instruire les Guaranis alors que les
Indiens se voyaient ordinairement interdit l'accès à la
lecture et à la maîtrise du calcul dans les territoires
coloniaux soumis à l'administration laïque. Andresito
devint un érudit qui parlait plusieurs langues et un musicien,
comme tant et tant d'Indiens des Missions. Vers 1811, il croisa la
route du grand révolutionnaire uruguayen José Artigas
qui l'adopta et en fit son bras droit dans la région, alors
qu'il tâchait d'unir contre l'impérialisme de Buenos
Aires la Banda Oriental (actuel Uruguay), les anciennes Missions et
tout ou partie du Paraguay, qui avait très vite pris son
indépendance sous la dictature du juriste Gaspar de Francia.
On suit l'activité politique et militaire de Guacurarí
jusqu'au 3 juillet 1821, jour où l'on sait qu'il est arrivé
à Montevideo dans le cadre d'une nouvelle mission
révolutionnaire, comme l'un des dirigeants de l'insurection
fédérale contre l'unitarisme portègne. Et là,
on perd sa trace. On ne sait ni quand, ni comment, ni où il
est mort.
Dans
la Province de Misiones, il est honoré comme un grand héros
d'une position politique qui, pour avoir été vaincue
dans les années 1850, n'en reste pas moins profondément
populaire dans toutes les Provinces qui composaient déjà
le pays à l'époque de l'indépendance et des
guerres civiles... Les autorités de Misiones espèrent que cette fête du mate sera aussi l'occasion de faire connaître dans toute l'Argentine cette figure historique, trop longtemps réduite à n'être qu'une légende locale, comme pour la plupart des dirigeants fédéraux.
Le
Día Nacional del Mate prend place parmi les nombreuses
initiatives législatives destinées à valoriser
et à promouvoir les idiosyncrasies du pays et les éléments
de sa culture populaire en pleine élaboration. Ici,
l'initiative vient du nord, ce qu'on appelle en Argentine le
Littoral, une région essentiellement rurale et qui doit aux
Chutes d'Iguazu d'être une zone touristique de premier plan.
Voici
le texte de la proposition de loi :
PROYECTO
DE LEY
Art.
1- Institúyase el día 03 de Marzo de cada año
como “Día Nacional del Mate”, a fin de promover el
reconocimiento permanente de nuestras costumbres.
Art.
2- La fecha mencionada queda incorporada al calendario de actos y
conmemoraciones.
Art.
3- El Poder Ejecutivo Nacional, realice la más amplia difusión
de la celebración a través de los mecanismos de
comunicación oficial.
Art.
4- Invitar a las provincias adherirse a la celebración, dando
en el ámbito de su jurisdicción la más amplia
difusión a la celebración.
Art.
5- De forma.
Projet
de loi (1)
Article
1 : Le 3 mars de chaque année (2) est institué comme
Fête nationale du Mate, afin de promouvoir la reconnaissance
permanente de nos coutumes.
Article
2 : La date [ci-dessus] mentionnée est intégrée
au calendrier des cérémonies et commémorations.
Article
3 : Le Pouvoir Exécutif National (3) donne la plus ample
publicité à la célébration à
travers les mécanismes de communication officielle.
Article
4 : Les Provinces sont invitées à contribuer à
cette célébration, en donnant sur le territoire de leur
juridiction la plus ample publicité à la célébration.
Article
5 : Dispositions formelles...
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Blason de la Province de Misiones :
le soleil levant argentin, les chutes d'Iguazu et deux rameaux de yerba mate,
avec les petites baies caractéristiques (le mateier est une sorte de houx)
Voici le texte publié par la députée
en sa qualité de rapporteur du projet, sur son site Internet :
FUNDAMENTOS
Señor
Presidente;
La
iniciativa de instituir el día 03 de Marzo como “Día
Nacional del Mate”, sirva como objeto otorgar el reconocimiento
permanente a nuestra identidad como pueblo y sus tradiciones, ya que
se sobreentiende que la cultura de un pueblo es el conjunto de
creencias, hábitos y actitudes aprendidas por el individuo,
que se trasmiten de generación en generación y que su
raíz muchas veces, no se pueden establecer con claridad.
Julia
Perié
ATTENDUS
Monsieur
le Président
L'initiative
d'instituer le 3 mars comme jour de la Fête nationale du Mate
doit avoir pour objet d'attribuer une reconnaissance permanente à
notre identité en tant que peuple [lié à] ses
traditions puisque -faut-il le rappeler ?- la culture d'un peuple est
l'ensemble de croyances, d'habitudes et d'attitudes apprises par
l'individu, qui se transmettent de génération en
génération et dont les racines, la plupart du temps, ne
peuvent pas être identifiées clairement.
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
El
consumo del mate se inicia generalmente, en el primer grupo social
que integramos; la familia y en algunos casos se instruye más
adelante con grupos sociales como círculos de amistad o
camadería. Pero el ámbito común de iniciación
es en la familia, como todo habito o costumbre.
En
la familia el individuo aprende como prepararlo, las formas de
cebarlo, de tomarlo, las maneras de servirlo y hasta su lenguaje.
Porque el mate tiene su propia expresión con el cual se
formulan diferentes sentimientos y pensamientos. Tomar mate en una
ronda de amigos, significa no solo reunión, sino “camadería”,
el estar juntos y compartir ese bien, que une al grupo y lo acompaña
en cualquier ocasión.
Julia
Perié
On
commence généralement à consommer le mate dans
le premier groupe social dont nous faisons partie, la famille, et
dans quelques cas on s'y initie plus avant avec des groupes sociaux
comme des cercles d'amis ou de camaraderie. Mais le milieu ordinaire
de l'initiation est la famille, comme toute habitude ou coutume.
En
famille, l'individu apprend à préparer [le mate], à
l'arroser (4), à le boire, à le servir et [il apprend] jusqu'à
son langage. Parce que le mate dispose de son propre langage avec
lequel s'expriment différents sentiments et pensées
(5). Boire le mate entre amis ne signifie pas seulement qu'on est
ensemble mais qu'il y a là une camaraderie, le fait de se réunir et de partager ce patrimoine qui lie le groupe et nous
accompagne en toute occasion.
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Nuestra
costumbre de “mateadores” debe ser protegida y promocionada como
forma de rescatar las culturas y costumbres nacionales. La ceremonia
del mate no distingue la gente del campo como de la ciudad, proclama
la armonía y cordialidad, entorno al ritual de “cebando
mate”.
Para
poder tomar mate se necesitan ciertos elementos, el recipiente
(mate), la bombilla y la yerba mate. El origen de la denominación
“mate” proviene del vocablo quechua “mati” que significa
cuenco o recipiente hecho con el fruto de una calabaza común,
llamada por los indios “puru”, existen diferentes mates según
el material con que estén hechos y son diferentes según
las necesidades de cada región donde se utilizan.
Julia
Perié
Nos
coutumes d'amateurs de mate doivent être protégées
et promues comme une manière de sauvegarder les cultures et
les coutumes nationales. La cérémonie du mate rassemble
les gens de la campagne et ceux de la ville, célèbre
l'harmonie et la cordialité qui entourent le rituel de
la préparation du mate.
Pour
pouvoir boire le mate, on a besoin de certains éléments,
le récipient (mate), la bombilla (6) et la yerba mate (6).
L'origine de la dénomination mate vient du mot quechua "mati" qui signifie pot ou récipient fabriqué à partir
d'une coloquinte ordinaire, que les Indiens appellent "puru". Il existe
différents mates en fonction du matériau dans lequel ils
sont faits et ils varient aussi en fonction des besoins de chaque
région où on les utilise.
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
El
conocimiento de la Yerba mate se remota a los albores de la cultura
guaranítica, siendo el alimento básico de los indios
que usaban como bebidas, sorbiéndolas de calabazas mediante
bombillas hechas de caña, o bien masticando sus hojas.
La
Yerba mate tuvo en la cultura guaraní, un rol social, pues era
objeto de culto y ritual, a la vez de moneda de cambio en sus
trueques con otros pueblos prehispánicos, incas, charruas y
aún los araucanos a través de los pampas que recibían
la Yerba elaborada por los guaraníes.
Julia
Perié
On
connaît la Yerba mate depuis l'aube de la culture guaranie,
puisque l'aliment de base des Indiens se prenait sous forme liquide,
comme une boisson qu'ils avalaient gorgée après gorgée dans des cucurbitacées grâce à des
bombillas en canne ou bien par la mastication des feuilles.
La
Yerba mate a tenu dans la culture guaranie un rôle social
puisqu'elle faisait l'objet de cultes et de rituels, en même
temps qu'elle servait de monnaie d'échange dans les trocs avec
d'autres peuples pré-hispaniques, Incas, Charruas et encore
Araucanos, à travers les pampas qui recevaient la Yerba
élaborée par les Guaranis.
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Los
conquistadores españoles aprendieron de los guaraníes
su uso, e hicieron que su consumo se difundiera en un intenso tráfico
desde su zona de origen a todo el Virreinato del Río de La
Plata.
Su
doble condición de alimento y sustancia estimulante, fue
descrito en los informes periódicos de los misioneros
jesuitas, quienes promovieron el cultivo en forma orgánica y
adoptaron el consumo preparándolo a modo de té inglés,
con lo que fue conocido en Europa como el té de los jesuitas.
Las
plantaciones de yerba mate se encontraban en el “infierno verde”
que alcanzaba el norte de Corrientes, Misiones, el interior de
Paraguay y sur de Brasil. Fueron los jesuitas quienes decidieron
desarrollar plantaciones cercanas a sus reducciones.
Los
jesuitas fueron los que develaron el secreto de la misteriosa
germinación de la semilla de la yerba mate, descubriendo que
solamente germinan aquellas semillas que han pasado por el sistema
gástrico de los tucanes. Pero, en su expulsión,
ocurrida en 1769, se llevaron con ellos el secreto, sobreviniendo el
abandono de las plantaciones, perdiéndose la tradición
de su cultivo.
Julia
Perié
Les
conquistadors espagnols apprirent des Guaranis à l'employer et
ils firent que sa consommation se répande grâce à
un intense trafic depuis la zone d'origine jusqu'aux extrémités
du vice-royaume du Río de la Plata (7).
Son
double caractère d'aliment et de substance stimulante a été
décrit dans les rapports fréquents des missionnaires
jésuites, lesquels promurent sa culture de manière
biologique (8) et adoptèrent la consommation en préparant
le mate comme le thé anglais (9), nom sous lequel [le mate] se
fit connaître en Europe, comme le thé des jésuites.
Les
plantations de yerba mate se trouvaient dans "l'enfer vert" qui
comprenait le nord de [la Province de] Corrientes (10), [la Province
de] Misiones, l'intérieur du Paraguay et le sud du Brésil.
Ce furent les jésuites qui décidèrent de
développer les plantations près de leurs réductions (11).
Ce
sont les jésuites qui trouvèrent le secret de la
mystérieuse germination des semences de yerba mate, en
découvrant que ces semences ne germaient que si elles étaient
passées par le système gastrique des toucans. Mais, au
moment de leur expulsion intervenue en 1769, ils emportèrent
avec eux le secret, entraînant l'abandon des plantations et la
perte de la tradition de cette culture. (12)
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Medio
siglo más tarde, el naturalista francés Aimé
Bompland, inició los primeros estudios científicos
sobre la planta de la yerba mate, hasta entonces solo se consumía
la que provenía de la selva, plantaciones que crecían
en manchones con gran densidad de árboles, llamadas islas.
La
explotación irracional en la que la tala de los árboles
fue moneda corriente por siglos, terminó insumiendo por
completo el recurso que parecía inagotable. Solo con las
plantaciones racionales, los cultivos volvieron a encontrar su lugar
en la historia.
En
la década de 1920, comenzó la colonización de
Misiones, el Gobierno Nacional adjudicó parcelas de tierras a
los colonos europeos, con la condición de que una parte de las
mismas fueran implantadas con plantaciones de yerba mate.
Julia
Perié
Un
demi-siècle plus tard, le naturaliste français Aimé
Bompland lança les premières études
scientifiques (13) sur la plante à yerba mate. Jusqu'alors on
ne consommait que celle qui provenait de la jungle (14), de
plantations qui poussaient en buissons avec une forte densité
d'arbres, qu'on qualifiait d'îlots.
L'exploitation irraisonnée qui fit que l'abattage des arbres fut monnaie
courante pendant des siècles finit par consommer complètement
la ressource qui paraissait inépuisable. Ce n'est qu'avec les
plantations raisonnées que les cultures retrouvèrent
leur place dans l'histoire.
Dans
les années 1920, commença la colonisation de Misiones,
le Gouvernement National adjugea des parcelles de terre aux colons
européens, à la condition qu'une partie de celles-ci soient
plantées en plantations de yerba mate. (15)
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Actualmente
la provincia de Misiones aporta el 90% de la producción de
yerba mate, con un total de 170.909,48 de hectáreas
cultivadas, donde en la verde flora misionera, descansan las cosechas
que luego viajarán por el mundo, siendo Siria el mayor
importador.
El
tercer elemento, la bombilla, también de procedencia guaraní,
era elaborada con un tubo hecho de caña, posteriormente se
fueron fabricando de metal, como oro y plata como así también
de otros elementos, la cual absorbe el agua que está en
contacto con la yerba mate.
El
mate ha sido, es y será fuente de inspiración para
muchos artistas incluyéndolo en sus obras y al incluirlo en
sus obras, los artistas lo ven dentro de la cultura como elemento
importante de ésta. Subsiste una fauna variada de materos,
cada uno a sus horas y cada uno con sus razones, por lo tanto es
evidente que el mate ocupa un lugar en la vida de cada individuo y si
el individuo es integrante de la cultura, el mate sin lugar a dudas
también lo es.
Nuestra
costumbre de tomar mate es mucho más que tomar una bebida sana
y con historia, es un gesto, cortesía, comunicación
entre los hombres, el mate iguala a todos en una ronda, da el tiempo
para hablar y sobre todo, el respiro para escuchar.
Por
los fundamentos acá expuesto, solicito a mis pares la
aprobación del presente Proyecto de Ley.
Julia
Perié
Actuellement,
la Province de Misiones contribue pour 90% à la production
[nationale] de yerba mate, avec un total de 170 909,48 hectares
cultivés, où dans la verte flore des Missions reposent
les récoltes qui ensuite voyageront dans le monde, sachant que
la Syrie est le plus grand importateur.
Le
troisième élément, la bombilla, elle aussi de
provenance guaranie, était élaborée à
partir d'une canule en canne, par la suite on les fabriqua en métaux,
comme l'or et l'argent, tout comme d'autres matériaux,
[bombilla] qui permet d'absorber l'eau mise en contact avec la yerba
mate.
Le
mate a été, est et sera une source d'inspiration pour
de nombreux artistes qui l'intègrent dans leurs œuvres. Les artistes
le voient comme une partie intégrante de la culture, comme une élément
important de cette dernière. Il y a toute une tribu
diversifiée d'amateurs de mate, chacun avec ses horaires, chacun avec ses motifs, et pour cette raison, il est évident
que le mate occupe une place dans la vie de chaque individu. Et si
l'individu est un membre de la culture, le mate, sans l'ombre d'un
doute, l'est lui aussi.
Notre habitude de boire le mate, c'est beaucoup plus que boire une boisson bonne pour la santé et porteuse d'une histoire, c'est un geste, c'est de la courtoisie, c'est de la communication entre les hommes. Tous en cercle, le mate fait de nous des égaux, il nous offre le temps de nous parler et surtout une pause
pour nous écouter.
Pour
les attendus ici exposés, je sollicite de mes pairs
l'approbation de la présente proposition de loi.
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Symbole ordinaire du mate :
le récipient, ici de belle taille et reposant sur un pied en fil métalique, passe de main en main.
On appelle ce symboles manos materas...
Image extraite du site de Iguazu Noticias.
Pour
aller plus loin :
Visiter
le site Internet de Julia Perié
Visiter
le site Internet de la Province de Misiones
Lire
le papier et écouter l'interview de Julia Perié sur AMProvincia, radio de la Provincia de Buenos Aires, à l'occasion
de son intervention dans l'hémicycle.
Lire
la page consacrée à Andresito Guacurarí Artigas
sur le site de la Province de Misiones.
Dans
la Colonne de droite, dans la rubrique Les commerçants du
Barrio de Tango, vous trouverez une boutique en ligne de yerba mate,
importatrice en France de la plupart des marques argentines, à
des prix très raisonnables.
Ajout du 17 décembre 2015 :
Si vous souhaitez acheter de la yerbe mate pour confectionner la boisson sud-américaine, je vous conseille fermement de ne pas acheter ce que nos chaînes de magasins bio, comme Bioscoop, Naturalia ou Carrefour Bio (quelles que soient leurs qualités pour le reste), vendent sous des marques non argentines mais sous le nom de mate et à des prix prohibitifs. La plante n'est pas du tout préparée comme il convient et ne donne pas du tout la même boisson. Fiez-vous aux marques argentines qui trouvent un débouché sur le marché européen : Cruz de Malta, Taragüi, La Tranquera, La Merced. Les paquets portent la mention Industria Argentina et le timbre fiscal bleu qui atteste le respect des normes argentines.
Ajout du 17 décembre 2015 :
Si vous souhaitez acheter de la yerbe mate pour confectionner la boisson sud-américaine, je vous conseille fermement de ne pas acheter ce que nos chaînes de magasins bio, comme Bioscoop, Naturalia ou Carrefour Bio (quelles que soient leurs qualités pour le reste), vendent sous des marques non argentines mais sous le nom de mate et à des prix prohibitifs. La plante n'est pas du tout préparée comme il convient et ne donne pas du tout la même boisson. Fiez-vous aux marques argentines qui trouvent un débouché sur le marché européen : Cruz de Malta, Taragüi, La Tranquera, La Merced. Les paquets portent la mention Industria Argentina et le timbre fiscal bleu qui atteste le respect des normes argentines.
(1)
En Argentine, on ne distingue pas comme en France le document qui vient du
gouvernement (projet de loi) de celui qui vient du
législateur (proposition de loi).
(2)
Il y a eu un changement de date lors de l'examen du projet.
(3)
En France, on parlerait ici du Gouvernement de la République.
(4)
Cebar el mate : ici, traduire, c'est vraiment trahir. L'expression n'a
aucune équivalence en aucune langue. Cebar el mate, c'est un
rite aussi important que celui de la cérémonie du thé au Japon, à ceci près que
cebar el mate est une tradition paysanne alors que la cérémonie
du thé a une origine nettement plus aristocratique et
religieuse. J'ai expliqué dans un article précédent
comment on prépare le mate (voir mon article du 20 octobre 2012 dans le cadre de la Semaine du Goût 2012).
(5)
Les codes du mate sont comme ceux des fleurs en Europe : selon
la façon dont on présente le mate aux commensaux, on
peut lancer des messages amicaux voire plus si affinités et
parfois même des messages inamicaux (mais là, c'est
devenu rare. Pour avoir quelqu'un qu'on ne peut pas souffrir dans une
rueda de mate et le lui signifier par la façon dont on lui
tend le mate, aujourd'hui il faut le vouloir. On dispose de tant
d'autres moyens de faire savoir à quelqu'un qu'on est fâché
avec lui).
(6)
Voir mon article du 20 octobre 2012 ou la rubrique Trousse lexicale
d'urgence que ces mots rejoignent aujourd'hui même, dans la Colonne de droite.
(7)
Quel raccourci historique et bien nationaliste avec ça !
Le vice-royaume du Río de la Plata n'a été
institué qu'en 1776, c'est-à-dire très longtemps
après l'arrivée des Espagnols, des Portugais et des
jésuites sur le continent. Il procédait d'une scission
du vice-royaume du Pérou et d'une réorganisation
administrative de tout le sud de l'Amérique australe. Les
Argentins, qu'ils soient de droite ou de gauche, aiment dire, et
c'est faux, que leur pays correspond à l'ancien vice-royaume
du Río de la Plata, ce qui leur permet d'annexer -ni vu ni
connu- l'Uruguay, le Paraguay et la Bolivie, territoires sur lesquels
la Buenos Aires révolutionnaire issue du Cabildo Abierto du 22
mai 1810 et de la Révolution du 25 mai 1810 aurait bien posé
sa grosse mimine mais ils ont fait sécession pour l'en
empêcher...
(8)
L'art et la manière de récupérer le discours
écolo ! C'est que la yerba mate bio (yerba orgánica)
se vend beaucoup plus cher que la yerba mate issue des plantations
ordinaires. Mais appeler les jésuites à la rescousse,
quelle entourloupe oratoire ! Comme s'il existait d'autres
formes d'agriculture au 17ème siècle...
(9)
En arrosant (cebar) la yerba avec de l'eau frémissante, à
70 ou 80°, un peu en-dessous du point d'ébullition. Alors
que les Indiens avaient toujours utilisé des liquides à
température ambiante.
(10)
Dans laquelle se trouve Yapeyú, la ville natale de José
de San Martín, détruite en 1817 par une razzia
brésilienne et reconstruite plusieurs décennies plus
tard un peu plus loin.
(11)
Reducciones : terme peu employé en Argentine mais très
employé pour les missions des franciscains au Mexique. En
fait, les plantations étaient développées à
l'intérieur des terres concédées par le roi
d'Espagne à la Compagnie de Jésus pour y accueillir les
Indiens et pouvoir les inviter à la conversion en les
préservant des esclavagistes du Portugal qui n'avait pas
accepté les conclusions de la Controverse de Valladolid
interdisant au roi d'Espagne, qui avait sollicité l'arbitrage
papal sur cette question, de réduire les Indiens à
l'esclavage. Les Missions étaient donc un sanctuaire où
les Indiens pouvaient se réfugier et vivre en hommes libres,
dans des théocraties conduites par les jésuites, placée
résolument hors administration coloniale, alors que, en terre
royale, leurs pareils vivaient dans le servage, attachés à
la terre qu'ils n'avaient pas le droit de quitter et qu'ils étaient
contraints de cultiver sous le régime de la corvée et
de l'impôt en nature. On ne sait rien de la religion guaranie,
sinon quelques noms de déités et quelques coutumes fort
obscures, car elle ne donnait lieu à aucun rite collectif
identifiable ni à aucun discours sur le contenu des croyances.
Il semblerait que la conversion au catholicisme se soit faite sans
heurt, sous la forme d'un syncrétisme qui reste très
mystérieux pour les anthropologues, et on sait que les
jésuites eux-mêmes furent quelque peu surpris de la
fluidité avec laquelle ces populations pré-colombiennes
se sont glissées dans les pratiques catholiques, aussi
structurées et extériorisées que la religion
d'origine était invisible. Il est vrai que les jésuites
surent utiliser l'art (peinture, sculpture, musique) comme outil
d'évangélisation en permettant aux Guaranis de
conserver ainsi leur tradition qui fusionna avec les expressions du
baroque européen en un style métissé qu'on
appelle guaranítico et que l'on trouve notamment dans l'église
San Ignacio dans le quartier de Monserrat, à Buenos Aires et
dans une salle du Museo de Arte Hispanoamericano Isaac Fernández
Blanco, au palacio Noël, dans le quartier de Recoleta. Dans les
Provinces de Misiones et de Corrientes, il en reste peu de traces car
après l'expulsion des jésuites, l'administration
coloniale s'est acharnée à tout détruire,
n'hésitant pas à s'en prendre mêmes aux églises
tant la Compagnie de Jésus apparaissait comme menaçante
pour l'ordre établi, à cause de sa popularité et
de la prospérité à laquelle elle avait conduit
ces territoires.
(12)
Le changement de situation n'a pas été aussi simpliste
que cela. On a continué à produire de la yerba en
grande quantité dans des plantations existantes mais qui
déclinèrent très vite, davantage à cause
du vandalisme des colons espagnols et de l'administration royale et
du fait du vieillissement des arbustes qu'à cause de la
disparition des élevages de toucans et de la perte du savoir
technique (les cultivateurs indiens n'étaient pas idiots, ils
avaient des yeux pour observer comme n'importe qui d'autre et
comprendre quel rôle les oiseaux jouaient dans le processus).
(13)
Faux. Les premières études scientifiques, on les doit
nécessairement aux jésuites. Sinon ils n'auraient
jamais compris le coup du toucan et de son estomac miraculeux !
Mais c'est difficile pour les péronistes d'admettre que
l'Eglise, même si c'est les jésuites qui gardent une
excellente réputation, ait eu un jour quelconque dans
l'histoire une attitude scientifique. Et pourtant !
(14)
La forêt en question, c'était les plantations dévastées
par la reconquête de la région par l'administration
laïque royale et que les paysans avaient fuies pour éviter
d'être asservis comme le reste de leurs semblables partout dans
l'empire colonial espagnol. Abandonnées, elles avaient
retrouvé la densité de jungle que le climat chaud et
humide favorise. D'où cette idée que l'Indien guarani
vit dans la jungle. Il serait plus juste de dire qu'il s'y cache !
Encore aujourd'hui malheureusement, même si c'est pour des
raisons différentes.
(15)
Il est étonnant de constater comment ce discours s'ouvre sur
une quasi-revendication de la culture guaranie et comment, au fil du
texte, l'oratrice les abandonne à leur sort historique et à
l'indifférence dans laquelle la majorité des Argentins
les a enfermés une fois pour toutes. Sauf à les
ressortir pour faire vendre du papier en prétendant, contre
toute évidence, que San Martín était le fils
d'une Indienne. Vous avez remarqué qu'on parle d'une décision légitime la décision de céder les parcelles à des Européens et non aux Indiens vivant dans la zone depuis des siècles... Ce discours au sujet apparemment anodin reste donc historiquement et politiquement très
contestable, mais sans doute y a-t-il parmi les députés
beaucoup d'élus, représentant d'autres provinces du
pays, qui ne supporteraient pas un discours plus exact, surtout sur
une coutume aussi identitaire que le mate. On voit qu'en Argentine le
processus de constitution de l'identité nationale a encore
besoin des clichés, des images d'Epinal et du mensonge, par
action et par omission, dans le discours mémoriel.