samedi 9 juillet 2016

Gabriel di Meglio sur trois journaux à la fois [Bicentenaire]

Le dernier livre de Gabriel di Meglio

Gabriel di Meglio est un historien formé à l'Université de Buenos Aires qui travaille aujourd'hui à la fois au CONICET (le Conseil national de recherche et de technologie, l'équivalent du CNRS français), à Canal Encuentro, la télévision culturelle du service public où il est responsable d'un certain nombre d'émissions d'histoire de très bonne qualité et au musée du Cabildo de Buenos Aires, consacré à la Révolution de Mai 1810, dont il est le nouveau directeur. Gabriel di Meglio est aussi l'un des scénaristes à qui l'on doit le charmant petit personnage de Zamba, des dessins animés diffusés par Paka Paka pour les tout petits initialement conçus pour attirer le très jeune public vers l'histoire avant de concerner tous les domaines du savoir scolaire (voir mon article du 7 juillet 2016 sur ces émissions).

Gabriel Di Meglio dans la salle centrale du Cabildo,
là où se tenait le Cabildo Abierto du 22 mai 1810
Photo Museo Histórico Nacional del Cabildo

C'est l'une des toutes premières fois que je vois les trois journaux concurrents et opposés d'un point de vue politique choisir le même historien pour marquer un jour symbolique fort dans l'histoire du pays. En effet, ce matin, on peut lire dans Página/12 un éditorial qu'il a signé sur les deux concepts qui marquent la naissance de l'Argentine, celui de révolution et celui d'indépendance, les deux moments-clés du bicentenaire, la révolution en 1810 et l'indépendance cette année.

Vive le petit peuple, dit le titre
Un sujet qui ferait les régals des revisionistas mais que Di Meglio traite autrement

Dans Clarín, on le trouve débattant avec l'un de ses aînés dans la recherche historique, José C. Chiaramonte, avec lequel il parle des antinomies historiques qui n'ont toujours pas trouvé leur solution dans l'Argentine actuelle. L'interview est à lire et à regarder en vidéo intégrée sur le site du quotidien.

Dans La Nación, c'est une courte mais passionnante interview qu'on nous propose en vidéo dans Conversaciones con La Nación (13 minutes, à la place des 20 habituelles). L'historien y défend le projet pédagogique et télévisuel de Zamba tout en regrettant la dérive des dernières années avec cet invasion de tous les domaines par l'idéologie et l'esprit partisan, il y expose les tenants et les aboutissants de la déclaration d'indépendance et il s'explique sur la diversité de ses activités en soulignant avec justice et finesse les faiblesses de la vulgarisation en histoire et la coupure qui existe dans le pays entre la production universitaire et la culture générale du public ordinaire.


Il me semble voir dans ce choix commun des trois titres un signe de progrès du dialogue et du pluralisme dans le pays, et ce malgré la très méchante humeur avec laquelle s'est réveillée ce matin la rédaction de Página/12, bien déterminée qu'elle est à dénigrer ce Bicentenaire de la majorité de centre-droit. La liberté de ton de l'historien sur la situation actuelle et sur l'inéluctabilité de la survenue prochaine d'une lecture partisane de l'histoire par la tendance macriste est très surprenante dans un pays qui, il y a encore six mois, était vraiment très crispé sur ces questions et incapable d'en parler sur un ton apaisé...

Bon anniversaire, Argentina !