mardi 24 mai 2022

Une fête à Olivos qui aura coûté bonbon [Actu]

La manifestation d'avant-hier devant la porte du domaine présidentiel de Olivos
(Il n'y avait pas grand-monde, tout de même)


Au cours de l’hiver 2020, le 14 juillet, alors qu’un stricte quarantaine régnait sur l’Argentine (et restreignait de façon draconienne la vie sociale de tout le monde), la Première dame, Fabiola Yañez, avait organisé pour son anniversaire une réception amicale et somme toute assez modeste à la résidence présidentielle de Olivos, située dans un cadre verdoyant du nord-ouest de Buenos Aires. Un lieu on ne peut plus charmant et surtout calme. Cependant tout cela était strictement interdit ! Qui plus est, les convives ne portaient pas de masques, dînaient à l’intérieur (à l’extérieur, ç’eût été impossible) et ne respectaient aucune distance de précaution, comme en attestent les photos-souvenirs de la soirée.

Parce qu’en plus, il y a eu des convives pour prendre des photos. Et de toute évidence, pas des photos volées ou prises par inadvertance, « à l’insu du plein gré » des participants. Que nenni ! Tout le monde pose et visiblement sans se poser la moindre question !

Un peu plus tard, la publication de ces clichés avait déclenché une tempête homérique dans l’opinion publique et permis à l’opposition d’en faire un immense scandale (plus sans aucun doute que ce que cela méritait) au cours d’une année où allaient se tenir les élections législatives de mi-mandat. Et la « fête à Olivos », baptisée aussi (tant qu’on y est) « Olivosgate », n’est pas pour rien dans les résultats désastreux obtenus par la majorité exécutive nationale.

Les photos ont déclenché des explications pour le moins embarrassées à la tête de l’État, pas toujours très crédibles et surtout largement dépassées par l’ampleur du battage médiatique, plus digne d’un crime avéré ou d’une dissimulation fiscale dans un compte offshore que d’une violation, certes pas très exemplaire, de règles de protection sanitaire par un petit groupe composé qui plus est de moins de vingt adultes pour la plupart dans la force de l’âge (1). De surcroît, ces personnes étaient presque exclusivement des collaborateurs(trices) habituel(e)s de la Première dame et ils étaient donc présents très fréquemment dans la résidence au titre d’un indispensable travail présentiel dans ce qui était devenu le siège du pouvoir exécutif au détriment de la Casa Rosada désertée, avec des allées et venues innombrables dus à la nature des fonctions exercées par le maître du logis. Cette poignée de proches est donc restée sur place au-delà de ses horaires de travail ou revenue à des heures inhabituelles. Conclusion : il n’y avait tout de même pas mort d’homme !

Il s’en est suivi des dépôts de plainte devant la justice surtout à l’initiative d’opposants bien contents de trouver un nonosse à ronger en cette année électorale. Après différents actes de procédure, le couple présidentiel a proposé de payer une grosse somme d’argent qui sera mise à disposition de l’Instituto Malbrán, un organisme public de recherche médicale qui a pris en charge les tests anti-covid PCR lorsque ceux-ci ont pu être mis en œuvre.

Lorsque l’accord a été connu la semaine dernière, les ténors de l’opposition sont une nouvelle fois monté aux cocotiers et certains ont même réclamé à cor et à cri que le procureur compétent attaque cet accord devant un tribunal. Mais le juge vient de ratifier la convention et l’affaire judiciaire est ainsi close, sans aucune inscription au casier judiciaire des intéressés.

Le président et son épouse se sont donc engagés à payer sous dix jours, lui, la somme de 1,6 millions de pesos et elle celle de 1,4 millions. Le tout ira financer directement la recherche médicale.

Lisez la presse de droite : vous allez voir, ils ne décolèrent pas ! Pourtant, trois millions, c’est une belle somme pour un couple, même si ces deux-là ne sont pas fauchés !

© Denise Anne Clavilier

Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 (journal de gauche, favorable au président)
lire l’article de La Prensa (droite catholique ultra-réactionnaire)
lire l’article de Clarín



(1) Notons qu’à peu près à la même époque à Paris, Édouard Philippe, alors Premier ministre, allait et venait dans son bureau et les salles de réunion de Matignon où il recevait toute sorte de gens sans que personne ne porte le moindre masque, même pas les gardes républicains de faction, comme l’a montré un récent et excellent documentaire filmé par un de ses « potes » (de gauche). Or le port du masque était obligatoire en intérieur !