“¿Qué más le puedo pedir a la vida? He tocado con los más grandes. Genios, capos... ¡Piazzolla y Troilo, muchacho!”
Qu’est-ce que je peux demander de plus à la vie ? J’ai joué avec les plus grands. Des génies, des chefs... (1) . Piazzolla et Troilo, alors que je n’étais encore qu’un gamin ! (2)
(Traduction Denise Anne Clavilier)
(Traduction Denise Anne Clavilier)
C’est sous cette déclaration d’un grand maître de 77 ans que Cristián Vitale place l’interview du Maestro Ernesto Baffa dans l’édition d’aujourd’hui de Página/12, interview qui paraît à l’occasion de la sortie de son dernier disque, Buen Amigo, un album qui paraît chez Melopea, le label fondé et dirigé par le musicien et chanteur Litto Nebbia. Il s’agit d’une compilation de 14 tangos que Ernesto Baffa présente comme une initiative de Litto et dans laquelle on retrouve des musiciens qu’Ernesto Baffa aime beaucoup... et Nebbia aussi (Néstor Marconi, Kicho Díaz, José Colangelo, Ubaldo De Lío....).
Dans cette interview, Ernesto Baffa revient sur sa carrière, parle à bâtons rompus de la situation actuelle où il est bien difficile de trouver des salles assez grandes pour jouer avec un orchestre consistant (il se plaint de ce que les grandes salles ne s'intéressent qu'au tango for export, le tango adultéré qu’une certaine Buenos Aires âpre au gain aime servir à des touristes peu avertis qui ont payé le prix du concert dans le forfait de leur voyage organisé), il parle de son attachement à son équipe de football (chaque Portègne a une équipe de foot dont il est membre du club, Baffa est lié à Independiente), de ses relations avec Litto Nebbia sur lequel il se montre très élogieux (il aimerait bien enregistrer un nouveau disque original chez Melopea, mais ça dépend de lui, signale-t-il en désignant le chanteur-producteur), de son amour pour le rock et les grands musiciens du genre en Argentine (en revanche, comme l’immense majorité des tangueros, il n’aime pas l’électro-tango, dont il pense que ni Troilo ni Piazzolla ne l’auraient accepté au sein du tango).
Il termine l’interview en rappelant son arrivée dans l’orchestre de Troilo et en rendant hommage à Piazzolla :
–¿Y con Piazzolla?
–Uhhh, caporale de primera. Con él grabé varios temas. Un vanguardista, pero ojo que lo suyo también era tango, ¿eh? Lo sostuve en esa época y lo sostengo hoy. Es cierto que fue muy criticado cuando se fue a Francia y algunos colegas se lo hicieron notar. Pero siempre lo admiré profundamente.
- Et avec Piazzolla ?
- Ouh là là !!!! Des as des as. Avec lui j’ai enregistré plusieurs morceaux. Un avant-gardiste, lui, mais attention : sa musique aussi c’était du tango, hein ? (3) Je l’ai soutenu à cette époque-là et je le soutiens aujourd’hui. C’est sûr qu’il était très critiqué quand il est parti en France (4) et quelques confrères le lui ont bien fait comprendre. Mais je l’ai toujours admiré profondément.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
Pour aller plus loin :
Lire l’article de Página/12
En Colonne de droite, dans sa partie inférieure, vous avez un lien vers le site de Melopea (rubrique Les commerçants del Barrio de Tango). Le catalogue de la maison de disque n’existe qu’en espagnol, bien sûr (on ne traduit pas des dates, des titres ou des noms propres). Mais vous pourrez trouver les textes de présentation du label et de son histoire en français. Litto Nebbia m’en a confié la traduction l’année dernière, pour le relookage du site et les 20 ans de la maison.
Ernesto Baffa n’a pas encore fait l’objet de beaucoup d’article sur Barrio de Tango, ce blog. Vous ne trouverez pas à l’heure où je publie cette entrée son nom dans la rubrique Vecinos del Barrio mais vous y trouverez un lien vers tous mes articles sur Litto Nebbia, sur Aníbal Troilo, sur Astor Piazzolla...
Lire l’article de Página/12
En Colonne de droite, dans sa partie inférieure, vous avez un lien vers le site de Melopea (rubrique Les commerçants del Barrio de Tango). Le catalogue de la maison de disque n’existe qu’en espagnol, bien sûr (on ne traduit pas des dates, des titres ou des noms propres). Mais vous pourrez trouver les textes de présentation du label et de son histoire en français. Litto Nebbia m’en a confié la traduction l’année dernière, pour le relookage du site et les 20 ans de la maison.
Ernesto Baffa n’a pas encore fait l’objet de beaucoup d’article sur Barrio de Tango, ce blog. Vous ne trouverez pas à l’heure où je publie cette entrée son nom dans la rubrique Vecinos del Barrio mais vous y trouverez un lien vers tous mes articles sur Litto Nebbia, sur Aníbal Troilo, sur Astor Piazzolla...
(1) Ernesto Baffa utilise un terme hérité de l’italien : capo (la tête ou le début). Désigne celui qui possède parfaitement une matière, le crack. Une série de DVD, éditée il y a quelques années, reprenait toutes sortes d’archives d’actualités cinématographiques, de films et de télévision, sous le titre de collection Los capos del Tango. Il y avait un volume sur D’Arienzo, un autre sur Pugliese et ainsi de suite sur une demie-douzaine de grands compositeurs et chefs d’orchestre de l’histoire du tango.
(2) Ernesto Baffa a commencé sa carrière dans l’orchestre de Héctor Stamponi à l’âge de 14 ans en 1948. Baffa est ensuite passé à l’orchestre de Aníbal Troilo chez qui il est resté 15 ans (il en parle encore avec des larmes dans les yeux dans le film Café de los Maestros). Puis il a passé plusieurs années avec Horacio Salgán, Astor Piazzolla, Alfredo Gobbi et Pedro Láurenz. Il a aussi monté son propre groupe avec Berlingieri et ensemble ils ont accompagné Roberto Goyeneche sur scène et ils ont même fait un disque avec lui... Lire mon article sur le film Café de los Maestros.
On peut traduire de deux manières cette dernière phrase de Baffa : ou bien muchacho se rapporte à lui-même comme je l’ai choisi. Ou bien muchacho s’adresse à Cristián Vitale et dans ce cas, il faudrait traduire "mon petit gars".
(3) A la fin des années 70, excédé par les procès d’intention que lui faisaient de nombreux gardiens du temple auto-proclamés du tango, Piazzolla a abandonné le nom tango pour désigner sa musique. Il l’a appelée musique urbaine de Buenos Aires, pour ne plus avoir affaire à ces critiques aigris qui n’avaient même pas accepté le succès populaire de Balada para un loco en 1969 (voir mes articles sur les 40 ans de ce morceau refondateur de l’esthétique tanguera).
(4) en 1955. Il avait gagné une bourse pour venir étudier la composition pour quatuor à cordes à la Cité Internationale des Arts à Paris. Il avait alors quitté l’univers officiel du tango, depuis 1949. Il voulait devenir un compositeur de musique classique reconnu, ce qu’il ne fut jamais vraiment. Il avait abandonné le bandonéon pour le piano. Et une grande part de sa décision était due à la médiocrité générale du milieu du tango qui lui fit une guerre sans merci (guerre qui répondait aussi à quelques provocations de sa part, il faut bien le reconnaître aussi).