Les chercheurs en alerte posent au pied de l'Obélisque à Buenos Aires Ils ont neutralisé le genre en remplaçant le o du masculin et le a du féminin par un x |
Très
vite après l'arrivée au pouvoir de Mauricio Macri (10 décembre
2015), la politique de rigueur a été mise en place sous le
prétexte, en partie légitime, de régler la dette souveraine sur le
marché étranger (c'est-à-dire aux Etats-Unis). Elle a entraîné
assez rapidement une cure amaigrissante dans les budgets de la
recherche et du développement technologique. Les scientifiques n'ont
donc pas tardé à ruer dans les brancards car ils tiennent à leurs
crédits et aux bons résultats qu'ils étaient en train d'engranger
à l'échelle internationale.
En sous-titre, on lit : "ici, ce dont on a besoin, c'est un peuple bien [instruit]"
Le
20 juin 2017, le jour de la fête du drapeau, en hommage au grand
héros de la souveraineté nationale que fut le général Manuel
Belgrano (1770-1820), créateur du dit drapeau et grand défenseur du
savoir et de l'instruction, un groupe de chercheuses qui travaillent
pour la majorité à Buenos Aires et dans sa banlieue, surtout à la
UBA (la grande université publique de la capitale argentine), a
publié sur les réseaux sociaux une version politisée d'un grand
succès de la musique populaire, Despacito (en douceur), revu et
corrigé sous le titre-jeu de mot de Despaciencia (on pourrait
traduire "Dispariscience"). Leur texte mêle des revendications
intellectuelles et culturelles (il faut des chercheurs pour qu'un
peuple soit instruit et qu'on ne lui fasse pas avaler n'importe
quelle couleuvre politique) et d'autres nettement féministes (les
diplômées du pays doivent pouvoir avoir d'autres perspectives que
d'aller faire la vaisselle et s'occuper des enfants, une fois leur
doctorat en poche).
Titre choisi pour mettre le clip sur Youtube :
"On fait de la recherche et on chante aussi"
Il y a deux jours, la même équipe, décidément bien en verve, a lancé un autre morceau, dans le même esprit carnavalesque et féministe. Cette fois-ci, il s'agit d'une reprise (excellente par ailleurs) de la chanson des partisans antifascistes italiens O Bella Ciao, rebaptisée O Ciencia Chau. Hélas, elle n'est pas encore sur Youtube en format sous-titré comme sa grande sœur. Le sens en reste donc réservé aux (bons) hispanisants. Il faut comprendre le texte, malgré le rythme chanté et le fort accent portègne de ces dames (dirigée par un homme, à la baguette).
Les chercheurs mobilisés appellent à occuper la place du Congrès à Buenos Aires |
Hier
et avant-hier, Página/12, qui soutient à fond la lutte des
chercheurs, informait ses lecteurs sur le mécontentement qui grandit
dans ce secteur, dont le ministre est pourtant lui-même un
prestigieux physicien, avec des articles dans les plus prestigieuses
revues internationales, Lino Barañao. Le pauvre s'en prend plein la
figure. Le malaise des chercheurs, quant à lui, s'exprime dans tout
le pays.
Pour
aller plus loin :
lire
l'article de Página/12 sur O Ciencia chau
lire
l'interview dans Página/12 d'hier de deux chercheurs, un homme et
une femme (dans cet ordre ou dans l'ordre inverse), qui accusent le
gouvernement en place de se détourner de la science fondamentale
comme appliquée
lire
l'article de Página/12 du 10 avril sur les revendications salariales
des professeurs d'université qui se sont mis en grève lundi (deux
jours sans cours dans plusieurs facultés).
Ajouts du 13 avril 2018 :
lire cet article de Página/12 sur les revendications portées par les chercheurs et les universitaires devant le Congrès
lire cet article de Página/12 sur les difficultés économiques de l'Invap, l'agence d'innovation qui conçoit et fabriquent des satellites et a sorti un appareil médical nucléaire dont les Pays-Bas ont décidé d'équiper certains de leurs hôpitaux (une partie des salaires ne sera pas payée)
Ajouts du 13 avril 2018 :
lire cet article de Página/12 sur les revendications portées par les chercheurs et les universitaires devant le Congrès
lire cet article de Página/12 sur les difficultés économiques de l'Invap, l'agence d'innovation qui conçoit et fabriquent des satellites et a sorti un appareil médical nucléaire dont les Pays-Bas ont décidé d'équiper certains de leurs hôpitaux (une partie des salaires ne sera pas payée)