Ce soir, samedi 28 mai 2011, la chanteuse Susana Rinaldi et le bandonéoniste Leopoldo Federico présentent leur récent disque, Vos y yo, produit par Alfredo Piro, le fils de Susana Rinaldi, au Bar Notable Clásica y Moderna, de l'avenue Callao, dans le sud du quartier de Recoleta (voir mon article du 10 mai 2011 sur ces trois concerts en mai).
C'est le moment que choisit le quotidien Página/12, pour publier une interview des deux monstres sacrés du tango contemporain, où ils décrivent le combat qu'ils mènent au sein de l'AADI, l'association argentine des interprètes, que préside Leopoldo Federico, avec Susana Rinaldi comme Vice-présidente, pour faire entendre les revendications de la profession en Argentine et en particulier à Buenos Aires, où la politique culturelle ne participe pas au développement des activités culturelles. L'entrevue s'est déroulée dans les locaux de l'AADI.
Or il se trouve l'Argentine en général et Buenos Aires en particulier se trouvent en pleine campagne électorale pour le renouvellement de la moitié de la Legislature et l'élection du prochain Chef de Gouvernement de la Ville Autonome en ce qui concerne la capitale, pour les élections législatives et présidentielles pour ce qui concerne la totalité du pays.
Susana Rinaldi et Leopoldo Federico se sont connus professionnellement en 1980 pour un récital que la chanteuse a donné à Paris, à l'Olympia, entourée de Federico, au bandonéon, et de José Colangelo, autre compositeur, au piano.
“La verdad es que con el maestro nos une algo que va mucho más allá de la música... Sí, es la magia de sus dedos, algo inexplicable, que no fuerza para nada sino que le facilita todo a mi voz, pero mucho más es esa cosa humana, química, que va más allá”, elogia la Tana.
Susana Rinaldi, dans Página/12
"La vérité, c'est qu'avec le maestro (1), c'est quelque chose qui va bien plus loin que la musique qui nous unie... En fait, c'est la magie de ses doigts, quelque chose d'inexplicable, qui ne force jamais rien mais tout au contraire qui facilite tout pour ma voix, mais cette chose humaine qui va plus loin, c'est encore plus", dit La Tana en forme d'éloge.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–¿Qué otra razón explica esta alquimia humana y musical?
Susana Rinaldi: –La de estar acá defendiendo los derechos de los intérpretes argentinos.
Susana Rinaldi, dans Página/12
- Quelle autre raison explique cette alchimie humaine et musicale ?
Susana Rinaldi : Le fait qu'on est ici à défendre les droits des interprètes argentins.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
Et c'est envoyé... On est parti.
“Un aspecto de la lucha que estamos dando hoy, más allá de lo puntual que significa recaudar para reconocer los derechos de los intérpretes, es por los espacios que nos niegan a los músicos. Voy a decir algo de lo que me hago cargo solita: la música, durante toda la historia, fue considerada como entretenedora y punto. Recién cuando empezamos a pelear los derechos de intérprete, a meternos en la propiedad intelectual, vimos hasta qué punto se puede denostar la música y quitarte lo tuyo, tu propia música, y tener que esperar siempre la relevancia que te da el extranjero, si te la da, respecto a qué vale la pena y qué no”, plantea Rinaldi.
Susana Rinaldi, dans Página/12
Un aspect de la lutte que nous sommes en train de mener aujourd'hui, au-delà du fait de collecter les recettes pour reconnaître les droits des interprètes (2), c'est pour les lieux qu'on nous refuse à nous autres musiciens. Je vais vous dire quelque chose de ce que je prends en charge toute seule : la musique, tout au long de l'histoire, a été considérée comme un divertissement, point à la ligne. Ce n'est que quand nous avons commencé à nous battre pour les droits des interprètes, à nous fourrer dans la propriété intellectuelle, que nous avons vu jusqu'à quel point on peut insulter la musique et t'enlever ce qui t'appartient, ta propre musique, et qu'il faille attendre toujours la reconnaissance que te donne l'étranger, s'il te le donne, sur ce qui vaut la peine ou ou non, interroge Rinaldi.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–A propósito de lo que acaba de sostener, ocurre que, a causa de las desprolijidades e irregularidades a las que han estado sometidos los músicos históricamente, han surgido en los últimos años asociaciones de músicos cuyo fin es organizarse para informar, averiguar y guiar a sus pares en sus derechos: la UMI, Camuvi, Músicos Autoconvocados... ¿Qué tipo de relación mantienen con ellas?
Leopoldo Federico: –Bueno, las conocemos a todas. No nos podemos olvidar de que son todos socios nuestros y que los apreciamos. No es que eluda una respuesta, pero en lo personal no quiero mezclar lo gremial con los derechos nuestros, porque veo que toda esa lucha que están haciendo tiene más que ver con la necesidad y la falta de trabajo que hay para tanta gente. Hoy me mandaron una circular del Sadem que está pretendiendo que se termine con eso de que el artista tenga que pagar para actuar... Realmente éste es el tema central. Durante mi larga carrera en la música, y Susana no me va a dejar mentir, creo que éste es el momento más duro que hubo para la actividad musical.
Leopoldo Federico, dans Página/12
- A propos de ce que vous venez de soutenir, il se trouve que, à cause des manoeuvres dilatoires et des irrégularités auxquelles ont été soumis les musiciens au cours de l'histoire, ont surgi ces dernières années des associations de musiciens dont l'objectif est de s'organiser pour s'informer, se questionner et se guider entre pairs sur leurs droits : la UMI, CAMUVI, Musiciens autosaisis... Quel genre de relations maintenez-vous avec elles ?
Leopoldo Federico : eh bien, nous les connaissons toutes. Nous ne pouvons pas oublier qu'ils sont tous nos sociétaires et que nous les aprécions. Ce n'est pas pour éluder la question mais, pour mon compte personnel, je ne veux pas mélanger ce qui est d'ordre syndical avec nos droits, parceuq eje voix que toute cette lutte qu'ils sont en train de mener a plus à voir avec le besoin et le manque de travail pour tant de gens. Aujourd'hui, on m'a envoyé une circulaire du Sadem qui vise à ce qu'on en finisse avec cette histoire que l'artiste ait quelque chose à payer pour jouer... Et ça, vraiment, c'est le coeur du débat. Pendant ma longue carrière dans la musique (3), et je parle sous le contrôle de Susana, je crois que ce moment que nous vivons est le plus dur qui a existé pour l'activité musicale.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–¿Qué lugar, ya que es el género que más les compete como músicos, ocuparía el tango en este estado de la cuestión?
S. R.: –Creo que es la música más castigada en este sentido, porque siempre hay algo que interviene como para que el género sea menoscabado. En todo caso, el tango está bien visto desde la danza o desde algunos ítems como el del maestro, en lo instrumental, pero la canción jamás: la canción pasa a último término. Y ésta es, te guste o no te guste, la que cuenta la historia. Aun así, sabemos que ha habido momentos en la ciudad de Buenos Aires en los que esta música tuvo más posibilidad de proyectarse desde pequeños lugares, pero hoy la gente joven no tiene dónde expresarse. O tiene que pagar, o dejar de cobrar, que es lo mismo, para poder dar a conocer su música. Eso es terrible y habla de la pobreza de espíritu de quienes dirigen toda la parte cultural en la ciudad. No tenemos por qué esperar de gente bien intencionada que de repente diga “voy a poner mi plata en este espacio” para que venga tal grupo o tal otro.
Susana Rinaldi, dans Página/12
- Quelle place, puisque c'est le genre le plus concurrentiel pour les musiciens, devrait occuper le tango sur ce point du débat ?
Susana Rinaldi : Je crois que de ce point de vue, c'est la musique qui paye le plus lourd tribut parce qu'il y a toujours un truc qui intervient pour que le genre soit déprécié. En tout cas, le tango est bien vu côté danse ou sur quelques facettes comme ce qui touche le maestro, l'instrumental mais la chanson, jamais. La chanson, c'est la cinquième roue du carosse. Et ça, que ça te plaise ou non, c'est ce que l'histoire nous dit. Et même comme ça, on sait qu'il y a eu des époques dans la ville de Buenos Aires au cours desquelles la musique a connu plus de possibilités de se faire connaître depuis des petites salles, mais aujourd'hui, les jeunes n'ont nulle part où s'exprimer. Ou alors il faut qu'ils payent ou qu'ils renoncent à toucher le moindre sou, ce qui revient au même, pour pouvoir faire connaître leur musique. Ça, c'est affreux et ça nous en dit long sur la pauvreté d'esprit de ceux qui dirigent toute la partie culturelle dans la ville. Nous n'avons pas de raison d'attendre de gens bien intentionné que tout d'un coup ils nous disent : je vais mettre mon argent dans cet endroit, pour que vienne tel goupe ou tel autre.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–El típico mecenas que pocas veces alcanza a resolver una situación colectiva...
S. R.: –Verdad, algo se está rescatando en ese sentido. Pero no se hace desde la televisión argentina, no sé por qué. La TV es un desastre... El hecho de que no se pueda aprovechar dignamente de la música argentina para promoverla, desarrollarla aunque sea para que sea la misma música la que pueda demostrar que no sirve o no va...
–¿Se refiere a la totalidad del ámbito televisivo?
S. R.: –A todo... Al privado, al estatal, todo. Te lo dice alguien que hace mucho tiempo que se promueve sola y que de repente dice “me gustaría tener un espacio en la televisión argentina”. ¡Nunca lo vas a tener!
Susana Rinaldi, dans Página/12
- Le mécène typique qui bien rarement parvient à résoudre une situation collective... (4)
Susana Rinaldi : Justement, on est en train de sauvegarder quelque chose du genre. Mais ce n'est pas grâce à la telévison argentine que ça se fait, je ne sais pas pourquoi. La télé, c'est une catastrophe... Le fait qu'on ne puisse pas tirer parti, dignement, de la musique argentine pour la promouvoir, la développer sinon pour que ce soit pour que la musique elle-même puisse démontrer qu'elle ne sert à rien ou que ça ne va pas...
- Faites-vous référence à la totalité du secteur télévisé ?
Susuna Rinaldi : à tout le secteur. Le privé, le public, tout. Et celle qui t'en parle, ça fait longtemps qu'elle assure elle-même sa promotion et qui d'un seul coup dit J'aimerais bien avoir une place à la télévison argentine. Jamais tu ne l'auras !
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–¿Cuál es la explicación de los productores?
S. R.: –Que la música argentina no da rating. ¿Qué quiere decir eso? Es un disparate enorme. ¿Cómo es posible que nuestra música sea redituable desde el hecho de que la gente pague lo que no tiene para escucharte y la TV no lo vea? Yo me formé en los ’70, una época en que la TV argentina hacía unos recitales maravillosos y te pagaban por eso. ¿Dónde empecé a mostrarme yo? ¿Por qué la gente supo si valía la pena escucharme o no? Fue gracias a la TV argentina, algo que ya no pasa.
Susana Rinaldi, dans Página/12
- Quelle est l'explication des producteurs ?
Susana Rinaldi : que la musique argentine ne fait pas d'audience. Qu'estce que ça veut dire, ça ? C'est une énorme ânerie. Comment est-il possible que notre musique soit rentable à partir du moment où les gens payent pour ce qu'ils n'ont pas pour t'écouter et la télé ne le voit pas ? Je me suis formée dans les années 70, une époque où la télé argentine donnait des récitals merveilleux (5) et on ne te payait pas pour ça. Où est-ce que j'ai commencé à me faire voir, moi ? Comment se fait-il que les gens savent si oui ou non ça valait la peine de m'écouter ? Grâce à la télé argentine, un truc qui n'existe plus maintenant.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–¿Traslada el mismo concepto al espectro radial?
S. R.: –Sí. ¿A mí qué me hace que haya una sola radio dirigida al tango? ¿Por qué una y no todas, en algún momento, así como todas pasan música extranjera? ¿No hay nadie que lo plantee?
–Bueno, cuando finalmente opere La Ley de Servicios de Comunicación Audiovisual sobre este estado de cosas se supone que va a haber un cambio más radical que gradual, en este sentido.
S. R.: –Bueno, la ley le ha dado el 2 por ciento a la música... Es un disparate. Por suerte también se ha nombrado la Ley de Música para seguir peleando y discutiendo sobre estos temas.
Susana Rinaldi, dans Página/12
- Transposez-vous le même concept dans le spectre radiophonique ?
Susana Rinaldi : Oui. C'est quoi l'intérêt pour moi qu'il n'y ait qu'une radio qui s'occupe de tango ? (6) Pour quoi une et pas toutes, à un certain moment, tout comme elles diffusent toutes de la musique étrangère ? Il n'y a personne pour se poser la question ?
Eh bien, quand la Loi sur les services de communication audiovisuelle (7) entrera en vigueur sur cet état de choses, on peut penser qu'il va y avoir un changement plus radical que graduel, sur ce point.
Susana Rinaldi : Eh bien, la loi a donné 2% à la musique... C'est une ânerie (8). Heureusement, on a parlé aussi d'une Loi sur la musique pour continuer à nous battre et à contester sur ces sujets.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–La LSCA también habla de agrandar el espacio para la difusión de música argentina, pero la referencia iba más bien dirigida hacia el lado de la amplitud y el pluralismo de ofertas mediáticas que la ley propone como espíritu.
S. R.: –Totalmente de acuerdo.
L. F.: –Sí, en ese sentido sí. Igual, quería que se haga referencia no solamente al tango. Claro, tanto a Susana como a mí, cuando decimos música lo que nos sale de adentro es el tango, pero ambos pensamos en toda la música nacional, sea el género que fuere. Lo que decía ella es cierto: hace años, yo actuaba con mis distintos conjuntos –con la orquesta, con Roberto Grela, con el cuarteto– en todos los canales de aire. Grandes valores, Séptimo piso, La botica del ángel... Y ahora lo único que quedó es el programa de Soldán, que lo pasan a la 1 de la mañana por el Canal 26.
Susana Rinaldi et Leopoldo Federico, dans Página/12
- La Loi sur le service de communication audiovisuelle parle aussi d'élargir l'espace pour la diffusion de musique argentine, mais la référence va nettement à l'amplitude et au pluralismes des offres médiatiques et c'est l'esprit de cette loi.
Susana Rinaldi : Totalement d'accord.
Leopoldo Federico : Oui, dans ce sens, oui. Mais quand même, je voulais qu'on ne fasse pas seulement référence au tango. C'est sûr, aussi bien Susana que moi, quand nous disons musique, ce qui vient de nous, c'est le tango, mais tous les deux nous pensons à toute la musique nationale, quel que soit le genre. Ce qu'elle disait est vrai : il y a des années, moi je jouais dans mes différents ensemble, avec mon orchestre, avec Roberto Grela (9), avec mon quatuor, sur toutes les ondes. Grandes Valores, Séptimo piso (7ème étage), La botica del ángel (la boutique de l'ange, ou la boutique de charme)... Et maintenant, tout ce qu'il reste, c'est l'émission de Soldán (10), qui passe à une heure du matin sur Canal 26 (11).
(Traduction Denise Anne Clavilier)
–No por quitarle legitimidad al reclamo, pero la división música nacional vs música extranjera a la que hacía alusión Susana hace ruido en el sentido de que una apuesta por la música nacional en bloque estaría quitándoles espacios a bellísimas expresiones universales. Para decirlo en bruto: si Cacho Castaña le va a quitar espacios a Pink Floyd, hay un problema. Eso se discutió mucho cuando se quiso –y de hecho se hizo– “monopolizar” el espacio de los medios para la música argentina.
S. R.: –No, eso es fascismo puro, claro. Lo que digo es “ni tanto ni tan poco”. ¿Por qué no poder escuchar a Horacio Salgán tocando “Flores negras” en algún momento? Esas cosas no ocurren precisamente por falta de espacios. Hay zambas, hay chacareras que son verdaderas obritas de arte. Ahora, ¿por qué uno sale de acá y puede presentarlas en cualquier lugar del mundo, con buena cantidad de público, y acá no? ¿Qué pasó? Pasó que alguien con poder algún día dijo “esto no sirve”, y a partir de entonces quedó el “esto no sirve”, cuando en cultura sirve todo, y todo tiene que tener su espacio para ser mostrado.
L. F.: –A diferencia de hace 30 o 40 años cuando, de tanto trabajo que había, te podías dar el lujo de elegir a qué baile ir o no, ahora hay una inmensa cantidad de músicos jóvenes que no existían en aquel momento, y que no tienen trabajo. Están dejando la vida para continuar con el legado del tango y no tienen medios para poder subsistir.
Susana Rinaldi et Leopoldo Federico, dans Página/12
- Loin de moi de contester la légitimité à cette revendication, mais la division musique nationale contre musique étrangère à quoi faisait allusion Susana fait murmurer dans le sens où miser sur la musique nationale en bloc ce serait priver d'espaces de belles expressions universelles. Pour le dire brutalement, si Cacho Castaña (12) prend la place des Pink Floyds, il y a un problème. Cela a été très contesté quand on a voulu, et de fait ça s'est fait, instituer un monopole sur l'espace de la musique argentine dans les médias.
Susana Rinaldi : Mais on, ça c'est du fascisme pur et simple. Ce que je dis c'est ni autant ni si peu. Pourquoi ne pouvons-nous pas écouter Horacio Salgán dans Flores negras à un moment ou à un autre ? Ces choses-là n'arrivent pas vraiment faute d'espace. Il y a des zambas, des chacareras qui sont des vraies petites oeuvres d'art. Alors pourquoi on peut quitter le pays et les présenter n'importe où dans le monde, avec une bonne quantité de public, et ici non ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Il s'est passé que quelqu'un avec du pouvoir a dit un jour Ça, ça ne sert à rien, et à partir de ce moment-là, il n'est plus resté que le ça ne sert à rien, alors que dans la culture tout sert à quelque chose, et tout doit avoir son espace où se faire connaître.
Leopoldo Federico : à la différence d'il y a 30 ou 40 ans, quand, avec tout le travail qu'il y avait, tu pouvait t'offrir le luxe de choisir à quel bal aller ou ne pas aller, maintenant il y a une immense quantité de musiciens jeunes qui n'existaient pas à ce moment-là, et qui n'ont pas de travail. Ils arrêtent de vivre pour continuer l'héritage du tango et ils n'ont pas de moyens de subsistance.
(Traduction Denise Anne Clavilier)
La conversation se poursuit avec d'autres exemples des mêmes types de dysfonctionnement structuraux, dont la mauvaise qualité du signal hertzien de Radio Nacional sur la route entre Haedo (dans la banlieue sud de Buenos Aires) et la capitale elle-même, mais elle se termine par une note plus optimiste de Susana Rinaldi :
Hay un giro en estos tiempos, hay una experiencia y hay otros dirigentes que la escuchan. También hay que decirlo, porque, si bien hay problemas estructurales, hay mucha más gente dispuesta a enfrentar las problemáticas, cada uno desde su lugar. El otro día escuché a Aníbal Fernández diciendo una frase del tango “Pan”, y me encantó, porque yo siempre sostuve la validez del tango como vehículo de denuncia social, y muchos me cayeron encima por eso.
Susana Rinaldi, dans Página/12
"Il y a un tournant en ce moment, il y a une expérience et il y a d'autres dirigeants qui écoutent la musique. Et aussi il faut le dire, parce que s'il y a bien des problèmes structurels, il y a beaucoup plus de gens disposés à affronter les problématiques, chacun pour sa part. L'autre jour, j'ai entendu Aníbal Fernández (13) dire une phrase du tango Pan (14) et ça m'a ravie parce que j'ai toujours soutenu la validité du tango comme véhicule de la critique sociale et on m'est pas mal tombé sur le paletot à cause de ça".
(Traduction Denise Anne Clavilier)
Pour en savoir plus :
lire l'intégralité de l'interview sur le site de Página/12
sur le thème du respect ou du manque de respect des droits des artistes, voir aussi l'interview de Litto Nebbia dans mon article du 1er mars 2010.
(1) Il s'agit de Leopoldo Federico. Le titre de Maestro est un titre très courant en Argentine, il ne présente aucun caractère solennel, ou plutôt il élève en dignité les relations les plus familières.
(2) Ce sont des droits qui sont très mal respectés et les nombreux internautes qui téléchargent avec tant de légèreté des morceaux piratés sur le net devraient prendre conscience que les musiciens argentins ont comme eux-mêmes besoin d'un toit au-dessus de la tête et de quelque chose dans leur assiette pour continuer à vivre et à nous enchanter. Ne piratez pas. Achetez les disques. En plus, ils ne sont pas chers.
(3) Le Maestro Federico a 84 ans.
(4) On voit bien dans quel sens le journaliste lui-même milite, pour la ville de Buenos Aires. Pour une politique publique et non pas pour le recours au mécénat privé, que Mauricio Macri, l'actuel chef du Gouvernement portègne, fait semblant de préférer (en fait, Macri favorise très peu le mécénat privé pour les affaires culturelles, on l'a bien vu l'année dernière avec le festival de tango de Buenos Aires qui a totalement manqué ce créneau-là, alors qu'il avait une occasion rêvée de demander à de nombreux secteurs économiques, dans le tourisme et dans la banque, d'apporter une aide concrète en accueillant les activités du festival contre une publicité qui aurait alors été légitime. Voir à ce propos mon article du 11 septembre 2010 à ce sujet).
(5) Susana Rinaldi fait sans doute ici allusion à quelques émissions qui virent Roberto Goyeneche, Osvaldo Pugliese, Aníbal Troilo sur le petit écran...
(6) La radio en question, c'est la 2x4, l'une des deux radios publiques de la ville de Buenos Aires, installée au 6ème étage du Complejo San Martín sur Avenida Corrientes. Vous pouvez l'écouter en direct via le site internet, dont vous trouverez le lien dans la Colonne de droite, dans la partie inférieure, dans la rubrique Ecouter.
(7) Une des réformes majeures votées par l'actuelle majorité sur un projet de loi du Gouvernement péroniste actuel, qui tarde à se mettre vraiment en place mais qui prévoit des quotas de diffusion pour la production culturelle nationale sur les stations de radio et les chaînes de télévision dans tout le pays. Página/12 est très en faveur de cette réforme, qu'il soutient depuis le début. Comme vous allez le constater, Susana Rinaldi n'y voit pas la solution miracle. Mais Susana Rinaldi est socialiste. Página/12 est péroniste et on peut même dire peroniste K, ultra-acquis à la politique du couple Kirchner. Les deux options appartiennent à la gauche argentine mais ce n'est pas l'union sacrée qui règnent entre elles. Pino Solanas, le candidat socialiste à la présidence du Gouvernement Portègne dans les élections du mois prochain, vient d'annoncer qu'il ne ferait aucun cadeau au candidat péroniste K, Daniel Filmus. Il y a du sport, je ne vous dis que ça !
(8) Susana Rinaldi a la réputation d'avoir très mauvais caractère, d'être assez dépourvue d'onction diplomatique et d'avoir le verbe haut. Elle a assez d'humour pour en faire rire une salle, comme j'ai pu le constater à Clásica y Moderna, quand je suis allée la voir dans Tres mujeres para el show (voir mon retour sur images du 16 novembre 2010 à ce sujet).
(9) Roberto Grela, grand guitariste de tango, qui fut aussi compositeur, et dont le nom est à jamais attaché à celui de Aníbal Troilo avec lequel il forma un duo et un quatuor qui ont leur place dans la légende du tango.
(10) Il s'agit de Silvio Soldán, un personnage médiatique tout à la fois très populaire et très contesté du paysage audiovisuel argentin.
(11) Comme vous pouvez le déduire du raisonnement du Maestro, tous les Argentins ne passent pas des nuits blanches, contrairement à la légende. La plupart des gens se couchent à des heures aussi raisonnables qu'en Europe pour pouvoir aller au boulot le lendemain (et attaquer souvent deux journées de travail en une seule). 1h du matin, ce n'est pas le primetime...
(12) Cacho Castaña : chanteur de variété très médiatique au talent très contesté par l'intelligentsia argentine. Il a néanmoins signé quelques très belles chansons, comme Café La Humedad ou Garganta con arena (un hommage à Roberto Goyeneche, à l'extrême fin de sa vie).
(13) L'actuel premier ministre de l'Argentine, un péroniste K pur jus.
(14) Pan : paroles de Celedonio Esteban Flores et musique de Eduardo Pereyra, un brulôt datant de 1932 sur la pauvreté effarante qui règnait alors dans les classes populaires en Argentine, touchée de plein fouet par la crise de 1929. Ce tango est traduit à la page 153 de mon anthologie Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, sortie en mai 2010 aux Editions du Jasmin, un ouvrage que je dédicacerai, comme prévu, demain, sur le stand de mon éditeur, au Salon des Editeurs indépendants du Quartier Latin, qui se tient jusqu'à demain soir au Lycée Henri IV, à Paris.