Sin pan y sin trabajo, Ernesto De La Cárcova (1894) Museo Nacional de Bellas Artes - Buenos Aires |
Sociedad
de Trabajo, una historia de dos siglos : nouvelle exposition
thématique à la Casa del Bicentenario, Riobamba 985, à
Palermo (à ne pas confondre avec le Musée national du
Bicentenaire, qui se trouve à Monserrat, derrière la
Casa Rosada) : images, œuvres artistiques, installations, extraits
de films de fiction, de documentaires, de reportages et documents
écrits sur tout ce qui, en deux cents ans d'indépendance,
a fait la cohésion du travail dans la société,
la famille, l'espace public et privé en Argentine...
L'exposition
s'est ouverte le 17 avril dernier, elle accueille les visiteurs du
mardi au dimanche et pendant les jours fériés, de 15h à
21h, jusqu'au 1er décembre prochain.
Le
thème du travail a été et reste central dans la
problématique de la construction nationale en Argentine, pays
essentiellement agricole dont dès les premières années
de l'indépendance l'immensité du territoire a posé
des questions techniques et technologiques de développement
économique et d'infrastructures matérielles et
sociales. L'exposition dont je vous parlais il y a quelques jours au
Museo Histórico de Buenos Aires Cornelio de Saavedra (voir mon article à ce sujet) sur l'apparition du chemin de fer en 1856
traite de cet aspect de l'histoire nationale. Ajoutez à cela
que l'Argentine, au sous-sol beaucoup moins valorisé que
d'autres vice-royaumes du temps colonial (il ne contient que peu de
minerais), est un pays pétrolier, ce qui implique extraction,
raffinage et exportation (on l'a vu récemment encore avec la
renationalisation de YPF, dont Repsol a été exproprié,
voir mes articles sur le thème). Depuis toujours la condition
des travailleurs, d'abord à la campagne, ensuite dans
l'industrie balbutiante, aujourd'hui à la fois dans
l'agriculture et dans les services, a suscité une intense
réflexion dans les courants de gauche, qui en ont
régulièrement fait un axe de leurs plans politiques une
fois que leurs leaders ont accédé au pouvoir (le
général San Martín à Cuyo entre 1814 et
1816, Hipólito Yrigoyen et Marcelo de Alvear de 1916 à
1930, Juan Domingo Perón qui s'est forgé son destin
politique et mythique dès 1943 en tenant de main de maître
le marocain du Secrétariat au Travail créé
spécialement pour lui dans le gouvernement militaire d'union
sacrée dit du GOU, politique qu'il a tâché de
systématiser jusqu'au moment où il a été
renversé en septembre 1955, et à nouveau les Kirchner, mari et femme, depuis l'élection de Néstor en 2003, après le
krach financier et bancaire de la Noël 2001). Ce thème
est encore celui qui irrigue toute la dévotion argentine à
San Cayetano, qui donne lieu dans tout le pays à de très
nombreux pèlerinages, dont celui de Buenos Aires, dans le
quartier de Liniers, est le plus connu et le plus fréquenté.
L'exposition
rassemble donc entre autres quelques reproductions de grandes œuvres
de la peinture nationale, dont le célèbre Sin pan y sin
trabajo, de Ernesto De La Cárcova (1866-1927), exposé
pour la première fois en 1894, en pleine vague d'immigration.
Ce tableau doit être à l'Argentine un peu ce que Les
mangeurs de pommes de terre ou Les Glaneuses sont à la
France... Le chef-d'œuvre engagé par excellence. Le même
thème hante le répertoire classique du tango, comme
vous pouvez le constater dans Barrio de Tango, recueil bilingue de
tangos argentins (ed. du Jasmin).
Pour
aller plus loin :
lire
l'article de Página/12 de lundi sur le sujet (une telle exposition ne pouvait qu'attirer son intérêt)
visiter
le site Internet de la Casa del Bicentenario
voir
la galerie de photos de l'exposition sur la page Facebook du Musée