Hier, deux responsables patronaux du
secteur industriel ont pris leurs distance avec le programme
électoral du chef du Gouvernement portègne, l'ultra-libéral et homme d'affaires Mauricio Macri, pour le second tour de l'élection présidentielle,
le dimanche 22 novembre, derrière l'actuel Gouverneur de la Province
de Buenos Aires et ancien vice-président, le péroniste kirchneriste
Daniel Scioli, qui approfondirait l'œuvre déjà accomplie par ses
deux prédécesseurs, Néstor Kirchner et Cristina Fernández de
Kirchner.
Página/12 titre ce matin : "Feu orange pour l'industrie" |
Les deux mandataires patronaux,
représentant l'un l'union industrielle et l'autre le secteur de la
métallurgie (1), se sont exprimés sur des médias d'opposition comme
Radio Mitre, Radio América et Ambito, le quotidien
référent en matière économique en Argentine. Tous deux
s'inquiètent de ne pas entendre le candidat néolibéral s'exprimer
sur l'industrie et notamment les PME, le gros du tissu en Argentine,
un pays dont la balance commerciale est tirée par l'agriculture et
les services et où depuis douze ans, l'actuel gouvernement s'efforce
d'encourager le secteur de la transformation. Les propos de ces deux
responsables n'ont donc pas tout à fait le poids qu'ils auraient
dans des pays plus industrialisés et dans leurs propos on entend
clairement le peu d'attention que Macri leur porte, à l'inverse de
son concurrent qui a déjà tenu avec le patronat industriel des
réunions de consultation.
Bien que aucune autre voix autorisée du secteur n'ait publiquement renchéri sur ces propos, la
presse généraliste s'en fait écho ce matin et indique une
direction encore peu empruntée par un débat politique où la
rivalité entre deux hommes très différents l'un de l'autre par
leur culture et leur personnalité pèse pour le moment plus que
l'exposé précis de programmes concrets et discriminants.
Ajoutons pour comprendre les enjeux
qu'en Argentine, un industriel, quand bien même il aurait connu une
vraie réussite entrepreneuriale, exerce un métier peu considéré
car le prestige social reste là-bas attaché à la possession de
terre agricole et de bétail, seule capable d'ouvrir les portes des
cercles huppés (avec la possession de très vastes vignobles
travaillant à l'exportation en haut de gamme).
Pour en savoir plus :
lire les déclarations d'hier de Juan Carlos Sacco, secrétaire général de l'Union Industrielle
Argentine, dans Ambito Financiero
lire les déclarations d'hier de Gerardo Venutolo, président de l'Adimra (la fédération de la
métallurgie argentine), dans Ambito Financiero
lire l'article de ce matin dans La
Nación
lire l'article de La Prensa (ce matin
aussi)
lire l'article de Página/12, le seul
journal à mettre ces déclarations en une. C'est aussi le seul des
quotidiens nationaux à soutenir la candidature de Daniel Scioli,
dont le décompte définitif des voix du premier tour, le 25 octobre,
fait apparaître une avance de trois points sur Mauricio Macri, soit un
peu plus que le résultat annoncé le 26 au matin.
A lire également dans Ambito, l'analyse de l'économiste hétérodoxe Aldo Ferrer sur
le choix entre deux modèles de pays, enjeu de ce second tour ainsi
que le plaidoyer pro domo de Mauricio Macri, dont le projet
d'abandonner l'actuel contrôle des changes est vertement critiqué
par divers économistes qui y voient les prémices d'un nouvel
affaiblissement de la monnaie nationale, non-convertible depuis la
faillite du système à Noël 2001 après dix ans de politique
néolibérale et de dérégulation tous azimuts.
(1) En Argentine, même si une partie
des entreprises de capitaux nationaux fabriquent encore des produits
moins valorisés, comme de l'électro-ménager "Industria Argentina",
du matériel informatique de marques nationales non ou très peu
exporté, des machines agricoles et de l'outillage de tout niveau, la
métallurgie développe une activité de recherche et développement
qui tend à la positionner comme secteur de pointe, avec l'aide des
pouvoirs publics et des partenariats avec plusieurs universités.
Elle investit désormais des applications ultra-techniques et
innovante et de l'ingénierie à haute valeur ajoutée sur le marché
mondial : transports maritimes et aériens, espace ou médecine.
La République argentine a récemment fait lancer à Kourou deux
satellites géostationnaires de communication entièrement conçus,
développés et fabriqués sur le sol national d'où ils ont été
acheminés vers le port spatial européen de Guyane pour leur mise en
orbite puis en exploitation.