lundi 23 août 2021

Página/12 défend les zones humides [Actu]

"Avec de l'eau aux chevilles", dit le gros titre
avec cette image terrible de la côte industrielle du Paraná
presque à sec
En haut, l'annonce du décès du premier porteur de delta
à Córdoba (l'homme avait violé sa quarantaine à son retour de Lima)
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Au moment où un phénomène zoologique gêne depuis une bonne semaine la vie quotidienne des habitants de Nordelta, un quartier privé résidentiel situé dans le delta du Paraná au nord de Buenos Aires, envahi par des carpinchos (rongeurs endémiques des vallées du Río Paraná et du Río Uruguay), le quotidien de gauche prend fait et cause pour les zones humides et la biodiversité qu’elles abritent, en lien avec la manifestation en faveur d’une loi qui protégerait ces types géographiques.

Hier, une famille de carpinchos se dégourdit les pattes en ville !

Nordelta a été construite sur un polder gagné sur une zone lacustre et les carpinchos, qui ressemblent à des cochons d’Inde géants (ils ont la taille d’un gros chien), seraient en train de recoloniser leur habitat dénaturé où ils sont soudain revenus en hardes fournies et organisées. Ils font beaucoup de dégâts dans les jolis jardins soignés par les habitants aisés de ce quartier privé, qui est ouvert sur les marais mais côté terre se trouve barricadé derrière une enceinte gardée jour et nuit et où il faut montrer ses papiers pour entrer. Les visiteurs à quatre pattes (et grosses incisives) se promènent aussi en ville, où ils provoquent des accidents automobiles et mordent les petits chiens qui leur aboient dessus ou les menacent de leurs grognements hostiles. Sans doute ces animaux sauvages se sont-ils mis à la recherche de nourriture sur leur ancien territoire (ils sont herbivores).

Et indiscrets avec ça !
(Photo Gustavo Iglesias)

Or sur une zone de plusieurs dizaines d’hectares dans le sud de Buenos Aires, qui fut la propriété de Boca Juniors qui y disposait de grandes surfaces d’entraînement, voilà que le gouvernement de la Ville autonome de Buenos Aires (droite néolibérale) envisage d’autoriser un grand promoteur à y bâtir deux tours de luxe. La Boca faisant partie de la zone populaire et même très populaire de Buenos Aires, il s’agit de la énième opération de gentrification à outrance de la capitale argentine et d’une menace sérieuse pour la Réserve écologique, gigantesque polder gagné sur les hauts-fonds du Río de la Plata pour donner de l’air à la ville. Au fil du temps, la Réserve est devenue un havre de biodiversité botanique et zoologique (papillons et autres insectes et surtout beaucoup d’oiseaux, dont des espèces protégées). Hier, des habitants de Buenos Aires ont donc organisé une manifestation à bicyclette contre les futures tours et pour le maintien de cette zone de marais, ce qu’est naturellement toute la région où Buenos Aires a été bâtie depuis cinq siècles.

Depuis quelques jours, les internautes s'amusent
de la fureur des habitants de Nordelta

© Denise Anne Clavilier


Pour aller plus loin :

lire l’article de Página/12 sur les conséquences économiques catastrophiques de la baisse du débit du Paraná depuis deux ans (l’immense rivière continentale est quasiment à sec sur plusieurs segments de son cours en Argentine)
lire l’article de Página/12 sur la manifestation dans la Costanera Sur
lire l’article de Clarín sur l’invasion des carpinchos à Nordelta