Travail d'un élève du Colegio Las Cumbres de Buenos Aires (il s'agit d'un groupe scolaire privé bilingue espagnol-anglais) |
Avant-hier, les propos de Beatriz Sarlo contestant la souveraineté argentine de jure sur les Malouines et son argumentation décousue ont soulevé la vague de condamnations que l’on pouvait attendre. Et ce non seulement dans la majorité mais aussi dans l’opposition. Certaines voix du PRO se sont fait entendre, non sans surprise puisque l’Argentine est en campagne électorale et que tous les partis serrent les rangs.
Daniel
Filmus, le responsable gouvernemental de la question des Malouines, a
réagi comme c’était son devoir ainsi que le gouverneur de Tierra
del Fuego, Gustavo Melella, qui a l’archipel dans sa compétence
territoriale virtuelle, et le directeur du Museo nacional de las
Islas Malvinas y del Atlántico
Sur, qui est un ancien combattant de la guerre de 1982. Tous
soulignent l’ignorance historique et juridique dont cette
intellectuelle a fait preuve dans ces déclarations absurdes.
Un
sénateur radical (donc de l’opposition), Pablo Daniel Blanco, a lui aussi réagi avec force. Il est vrai qu’il est élu de Tierra del Fuego. Il
a peut-être raison mais ce serait bien étrange : quel est
l’intérêt de Beatriz Sarlo, qui a exprimé un mépris
incommensurable pour l’actuel gouvernement, de jouer ainsi contre
son camp alors qu’approchent les élections de mi-mandat ?
Página/12 répond en allant chercher dans l’histoire une analyse du Foreign Office d’avant-guerre : en 1936, alors que la Grande-Bretagne soutenait le gouvernement de fait issu du coup d’État de septembre 1930 (le premier de l’ère constitutionnelle argentine), un diplomate avait fait valoir qu’il n’était pas possible de justifier en droit l’occupation de l’archipel et que toute tentative dans ce sens ne ferait que montrer les Britanniques sous l’aspect de bandits internationaux. Si c’est eux qui le disent !
Le
quotidien de gauche ajoute qu’en avril 1982, dès l’attaque des
forces armées argentines contre les îles, Margaret Thatcher fit
retirer des archives en libre accès public les documents relatifs aux
Malouines. Documents dont six allaient pourtant être rendus publics par
le supplément dominical du Times une semaine plus tard. Autrement
dit, d’après Página/12,
les Britanniques connaissent parfaitement l’amplitude de leur
mauvaise foi dans cette affaire qui dure depuis 1833. Le refus
obstiné du Royaume-Uni d’entamer ne serait-ce qu’un dialogue à
propos de l’archipel, comme le commande une résolution de l’ONU,
semblerait donner raison à la rédaction.
Photo satellitaire des Malouines extraite des cartes de géographie offertes par l'Instituto Geografico Nacional argentin Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Jusqu’au Brexit, l’Union Européenne et les pays qui la composent sont restés loyaux au Royaume-Uni et l’ont soutenu contre l’Argentine. Cette solidarité a déjà connu quelques brèches. Elles pourraient s’élargir avec le temps, surtout avec un Boris Johnson à Downing Street.
Pour
aller plus loin :
lire l’article de Página/12 sur les réponses des officiels (Daniel Filmus et les autres)
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarín
lire l’article de La Nación
Ajout du 7 août 2021 :
Beatriz Sarlo semble
vraiment convaincue de ce qu’elle disait. Elle
vient de remettre une pièce dans la machine en répondant vertement
au directeur du musée des Malouines (jeune appelé lors de la guerre
de 1982, rappelons-le).
Pour aller plus loin :
lire l’article
de La
Nación
sur la contre-offensive de Beatriz Sarlo
lire cette
synthèse mordante et caustique de Página/12
sur ce qui apparaît comme une calamiteuse entrée en campagne pour
la droite : scandales de corruption, contrebande d’armes,
aberrante fuite à l’étranger du principal conseiller de Mauricio
Macri quand il était président et palanquée de propos
anticonstitutionnels sur le statut des Malouines.