Plusieurs collectifs d'acteurs
culturels, d'artistes et d'intellectuels de gauche, appellent
aujourd'hui, à midi, à une assemblée générale au Centro Cultural
de la Cooperación Floreal Gorini (CCC), situé face au Teatro San Martín,
sur Avenida Corrientes (1543) : Carta Abierta (lettre ouverte),
Fundación DAR, Frente de Artistas y Trabajadores de las Culturas
(remarquez le pluriel du mot culture), d'autres centres culturels et
des syndicats. Le ton est combatif, comme si souvent avec cette
gauche qui ne sait pas se positionner autrement que dans le rapport
de force (1).
Façade du CCC telle qu'elle figure sur la page Facebook de l'institution |
Cette assemblée générale est
convoquée à la suite à la lettre ouverte de Charly García, dont je vous parlais hier, au ministre des Médias publics, Hernán
Lombardi, qui représente la politique culturelle que toutes ces
organisations ont combattue et vomie pendant les huit ans d'exercice
du pouvoir de Mauricio Macri à la tête de la Ville Autonome de
Buenos Aires.
"No
todos somos Charly, dit l'un des responsables de la manifestation,
pero así es como empiezan o darse cuenta de que no pueden hacer todo
lo que quieren."
"Nous ne sommes par tous Charly [et
c'est une claire référence au slogan du début de l'année après
les attentats à Paris] mais c'est comme ça qu'ils vont commencer à
se rendre compte qu'ils ne peuvent pas faire tout ce qu'ils veulent." (Traduction © Denise Anne Clavilier) (2).
Les initiateurs du mouvement
souhaitent que celui-ci ne sombre pas dans une démarche idéologique,
dans un discours monolithique, mais conserve et cultive la diversité
sociale, politique et disciplinaire qui fait sa richesse. Et c'est
un trait emblématique du mouvement coopératif que de cultiver le
pluralisme entre les coopérants eux-mêmes. C'est un premier échelon
où en faire l'apprentissage civique par l'expérience concrète.
Les acteurs qui se mobilisent ce midi
et appellent à les rejoindre veulent défendre les acquis du
gouvernement précédent au premier rang desquels ils placent -non
sans raison- l'existence d'un ministère national de la Culture. Pour
l'heure, rien n'a été fait par le nouveau ministre pour casser ce
qui avait été mis en place par les prédécesseurs : Canal
Encuentro reste en place, Paka Paka, le CC Kirchner et Tecnópolis
aussi, qui étaient les quatre institutions phares de cette politique
culturelle, je n'ai pas vu que l'INCAA (cinéma et audiovisuel) soit
démantelé, ni le réseau des musées nationaux, ni le MICA (marché
des industries culturelles)... Il n'en reste pas moins qu'ils ont
raison d'être vigilants : c'est le rôle de l'opposition et la
fonction de ce nouveau paysage politique argentin.
Il faut maintenant que le CCC et les
autres institutions qui défendent la culture populaire s'inventent
une stratégie et un discours conforme à la nouvelle situation, ne
serait-ce que pour être crédibles au regard des concitoyens. De
toute évidence, ce n'est pas encore acquis et même la prise de
conscience du changement qui semble bien s'être opéré n'est pas
faite.
Et comme on pouvait s'y attendre, quel
est le seul journal qui parle de cette manifestation ? Je vous
le donne en mil : Página/12, comme d'hab !
A côté de l'article de Página/12,
vous pouvez aussi consulter le site Internet du CCC et sa page Facebook. Et je profite de cet article pour saluer les quelques amis
que j'ai dans cette institution et leur dire que je comprends leurs
inquiétudes sans avoir aucune raison, pour le moment, de les
partager.
Ajout du 30 décembre 2015 :
Il est probable que cet appel n'a pas connu le succès, car le lendemain, Página/12 n'en a même pas parlé.
Toutefois, aujourd'hui, el Espacio Carta Abierta, qui participait à cet appel à réfléchir ensemble, revient à la charge dans un éditorial qu'il consacre à un supposé lexique du nouveau Gouvernement qui travestirait le vocabulaire ordinaire (ce qui est d'autant plus culotté que le péronisme n'est pas le dernier en Argentine à se prêter à des impostures lexicales !). L'article est désolant, les arguments sont indigents, souvent de mauvaise foi et les auteurs appuient leurs propos plus souvent sur des vaticinations que sur des actes avérés de ce gouvernement. C'est aussi peu convaincant que l'éditorial de Horacio González de lundi, dans le même journal, et donc j'ai parlé hier, dans un article que j'ai consacré à l'interview-programme de Hernán Lombardi.
Ajout du 30 décembre 2015 :
Il est probable que cet appel n'a pas connu le succès, car le lendemain, Página/12 n'en a même pas parlé.
Toutefois, aujourd'hui, el Espacio Carta Abierta, qui participait à cet appel à réfléchir ensemble, revient à la charge dans un éditorial qu'il consacre à un supposé lexique du nouveau Gouvernement qui travestirait le vocabulaire ordinaire (ce qui est d'autant plus culotté que le péronisme n'est pas le dernier en Argentine à se prêter à des impostures lexicales !). L'article est désolant, les arguments sont indigents, souvent de mauvaise foi et les auteurs appuient leurs propos plus souvent sur des vaticinations que sur des actes avérés de ce gouvernement. C'est aussi peu convaincant que l'éditorial de Horacio González de lundi, dans le même journal, et donc j'ai parlé hier, dans un article que j'ai consacré à l'interview-programme de Hernán Lombardi.
(1) C'est le produit de l'histoire dans
un pays et un continent où l'oligarchie a toujours su s'imposer par
la force au reste de la population et n'a guère eu de scrupule quant
aux moyens qu'elle y employait.
(2) Il me semble bien qu'ils le savent
déjà, eu égard à la faible différence du premier tour, à
l'équilibre politique dans les Provinces, où une légère majorité
des Gouverneurs sont kirchneristes, comme l'a très bien montré la
photo commentée de Clarín que j'ai diffusée il y a quelque jours,
et à la composition politique des Chambres, où Cambiemos a une
légère majorité chez les Députés et le Frente para la Victoria
une nette majorité au Sénat. Et si Macri est si conciliant, c'est
peut-être aussi parce qu'il est conscient que le peuple souverain
l'a mis dans cette situation qui ne permet pas du tout de faire tout
et n'importe quoi (ce n'était pas le cas quand il gouvernait la
Capitale fédérale, où les majorités étaient beaucoup plus
nettes, tant dans la ville que dans le pays tout entier).