Ce matin, pour la première fois depuis
très longtemps, s'est tenue à la Casa Rosada une première réunion
partielle du Gouvernement pour faire un point sur les actions déjà
engagées et les prochaines à mettre en route. Plusieurs ministres
n'y participaient pas, notamment ceux de la Justice, de la Défense,
de l'Education, de la Culture, des Médias publics et des Sciences et
Technologies. Par conséquent, parmi les personnalités absentes, on
trouve des titulaires de ministères régaliens et d'autres.
Ce type de réunion était traditionnel
en Argentine avant l'arrivée des Kirchner, mari et femme, au pouvoir,qui avaient relancé le style personnaliste, qu'on a surnommé en France ces dernières années l'omni-président. Toutefois il
ne s'agissait pas, on le voit, d'un Conseil des Ministres tel que nous
l'entendons mais d'une simple réunion de travail avec le Président.
Cette rencontre n'a pas de calendrier fixe, elle est beaucoup moins
fréquente que ne l'est un Conseil des Ministres dans les pays
européens (une fois par semaine en général), et elle ne joue aucun
rôle institutionel dans le processus de prise de décision de
l'Exécutif. Mais c'est néanmoins un progrès quant au processus
collaboratif et collégial de gouvernement tel que Mauricio Macri avait
annoncé vouloir le mettre en place et tel qu'il le pratiquait quand
il gouvernait Buenos Aires.
Et les démarches visant à moderniser
l'Etat ne s'arrêtent pas là : le Gouvernement vient d'annoncer
qu'il allait vérifier le bien-fondé de 63 000 contrats de travail
dans la fonction publique sur les trois dernières années. Il s'agit
de contrôler qu'il n'y a pas dans ce grand nombre de nominations ce
qu'en France on appelle emplois fictifs. Le travail réellement
effectué par les titulaires de ces contrats sera examiné et il sera
mis à un terme à tous ceux qui relèvent en fait d'un mode de
rétribution sur les deniers publics de militants qui devraient
émarger au budget de leur formation politique. En Argentine, on
appelle cela des ñoquis, des gnocchis en traduction littérale, en
fait des gens payés à ne rien faire, des profiteurs.
Cette annonce intervient sur fonds de
scandale quelque peu artificiel à Radio Nacional, dont la
directrice, María Seoane, une militante kirchneriste très fervente,
vient de démissionner pour protester contre l'accusation que le
Gouvernement vient d'émettre contre elle parce qu'elle aurait
renouvelé le contrat de trois journalistes kirchneristes rétribués
à des hauteurs faramineuses pour deux ou trois heures d'intervention
à l'antenne chaque semaine. Mais dans sa lettre de démission, María
Seoane dément formellement avoir signé ces contrats : en
effet, elle n'aurait pas eu la compétence d'engager Radio Nacional
sur le plan financier ou patrimonial. Ce qui veut donc dire qu'elle
n'en était pas la directrice mais simplement la responsable de
l'information et des programmes. Ce n'était pas ce qu'on pouvait
comprendre en écoutant ses discours, notamment celui que je lui ai
entendu tenir à la soirée des 70 ans de la Radio ! Mais ça
expliquerait sa difficulté à envisager des projets un tant soit peu
innovants ainsi que son impuissance (ou sa réticence) à attribuer à
RAE, la station internationale de Radio Nacional, un studio en bonne
et due forme après que l'ancien studio, dûment rénové, a été
attribué à une autre équipe, obligeant les animateurs de RAE à
monter et descendre en permanence dans tout le bâtiment en fonction
des trous dans les grilles d'occupation des différents studios (des
conditions de travail très pénibles tout au long de cette dernière
année). La démission de María Seoane vient compléter celle du
président de Radio-Télévision Argentine, le cinéaste Tristán Bauer, qui
l'avait justifiée, il y a deux semaines, de façon similaire, comme un protestation contre
des propos tenus à son endroit par le nouveau Gouvernement.
Il va
maintenant falloir regarder de près qui le ministre des Médias publics, Hernán Lombardi, nommera à
leur place.
Pour aller plus loin :
sur la réunion de travail du
Gouvernement
lire l'article de Clarín
lire le communiqué officiel de la Casa
Rosada avec vidéo et série de photos
sur la recherche des ñoquis ou emplois
fictifs
lire l'article de Clarín
sur la démission de María Seoane
lire l'article de Clarín
lire l'article de La Nación.