Photo d'archives de la chaîne TN (groupe Clarín) |
Tandis que le juge d'instruction
fédéral Daniel Rafecas hérite de plusieurs plaintes pour
malversation, corruptions, enrichissement illicite et abus de l'usage
de la chaîne de télévision publique contre l'ex-présidente
Cristina de Kichner (ça tombe comme à Gravelotte !), voilà qu'un autre juge vient d'inculper la
présidente de Madres de Plaza de Mayo, Hebe de Bonafini, pour
incitation à la violence, pour un appel qu'elle a lancé à
manifester le jour même de l'investiture, contre Mauricio Macri, qu'elle désignait alors comme son "ennemi".
Cet appel de Hebe de Bonafini était des plus contestables. Et oui, c'était bien un appel séditieux. Traiter
d'ennemi le président élu démocratiquement juste parce qu'il n'a
pas les mêmes idées que vous est par excellence un acte anti-démocratique. Mais elle n'a pas été suivie. Personne ne l'a
rejointe le jour J, elle était toute seule sous son auvent sur une
Plaza de Mayo qui allait être envahie par une foule en liesse. L'appel a été lancé dans le vide et la dame a plus de quatre-vingt
ans et c'est une mère que la dictature militaire a privée de ses
enfants en les tuant. La laisser tranquille ne ferait aucun tort à la démocratie et on pourrait se contenter de combattre ses idées antidémocratiques par le débat et avec des arguments politiques. Ce serait plus efficace et plus digne que de la traîner devant un tribunal (devant lequel elle pourrait être convoquée de manière plus justifiée pour rendre compte de l'usage qu'elle a fait des fonds publics qui lui ont été attribués pendant des années et qui est particulièrement trouble).
Cette inculpation, pour de simples
paroles plus stupides que dangereuses, sent la revanche
anti-kirchneriste. Cela pue !
Pendant ce temps, alors qu'un juge qui
s'était chargé d'un certain nombre de procès contre Mauricio
Macri, lorsque celui-ci était Chef de Gouvernement de la Ville
Autonome de Buenos Aires, vient d'annoncer son départ à la retraite
(il ne peut pas se promener dans la rue sans se faire insulter), à
quelques jours de la Nativité, la Conférence Episcopale Argentine
vient d'appeler une nouvelle fois à la réconciliation et à la
guérison des "liens
abîmés" entre les
Argentins (et les liens ont été abîmés par les deux camps depuis
les années 1930, voire plus tôt encore...).
Au-delà des efforts politiques du
Président et d'un certain nombre de personnalités de droite et de
gauche, comme Daniel Sioli, les gouverneurs, la grande majorité des
maires de la Province de Buenos Aires, Estela de Carlotto qui accepte
de dialoguer avec le nouveau ministre de la Culture, l'ancien directeur de la Culture de la Province de Buenos Aires qui devient
directeur des théâtres municipaux de la capitale fédérale, etc.,
à l'heure où le Gouvernement lève le contrôle des changes, ce qui
entraîne automatiquement la dévaluation si redoutée de la monnaie
nationale, qui devrait coter aujourd'hui à 14 pesos pour 1 dollar
US sans marché noir des changes, et une épouvantable flambée des
prix pendant les fêtes, ce sera de toute évidence un chantier
difficile et plein de chausse-trappes, que de rabibocher entre eux les citoyens de ce
pays divisé.
Et pourtant d'un point de vue
anthropologique, c'est bien le moment où le processus devrait enfin
déboucher sur un certain apaisement puisque toutes les grandes
réconciliations nationales s'accomplissent environ un demi-siècle
après l'événement traumatisant. Or le coup d'Etat s'est produit il
y aura 40 ans le 24 mars prochain tandis que la démocratie et
l'ordre constitutionnel sont revenus il y a 32 ans, ce qui correspond
à un peu plus d'une génération (1).
Pour aller plus loin :
lire l'article de Clarín sur
l'inculpation de Hebe de Bonafini
lire l'article de La Prensa sur le même
sujet
lire l'article de La Prensa sur
l'appel de la CEA à la réconciliation en ces fêtes de Noël et ce
jubilé de la Miséricorde qui se célèbre dans toute l'Eglise
catholique partout dans le monde.
Et la dame est coriace : un peu plus tard dans la journée, elle a vertement répliqué à son inculpation en redisant les mêmes choses... en assimilant clairement le nouveau gouvernement à celui de la Dictature militaire (à cause du programme économique). Lire à ce propos l'article de Clarín qui fait monter la sauce (parce que Clarín est très hostile à Madres de Plaza de Mayo).
Et la dame est coriace : un peu plus tard dans la journée, elle a vertement répliqué à son inculpation en redisant les mêmes choses... en assimilant clairement le nouveau gouvernement à celui de la Dictature militaire (à cause du programme économique). Lire à ce propos l'article de Clarín qui fait monter la sauce (parce que Clarín est très hostile à Madres de Plaza de Mayo).
(1) Les historiens comptent quatre
générations par siècle.