Decir
pan al pan, comme on dit en Argentine : "appeler le pain pain".
C'est ce qu'a fait avant-hier dimanche le ministre Hernán Lombardi,
en charge de la réforme des médias nationaux (radio, télévision,
agence de presse ainsi que deux institutions culturelles qui lui ont
été bizarrement rattachées, le centre culturel CCK et le parc
scientifique et technologique saisonnier, Tecnópolis) (1), dans une
interview à trois qu'il a accordée à La Nación, où il s'est fait
accompagner par ses deux adjoints, Gabriela Ricardes en charge des
contenus publics (Tecnópolis, le CCK, les deux chaînes culturelles
Canal Encuentro et Paka Paka ainsi que la Banque Audiovisuelle de
Contenus universels argentins, de son petit nom le BACUA, peu ou prou
l'équivalent de l'INA en France), et Jorge Sigal, en charge des
médias publics (radio, télévision, agence de presse).
Photo La Nación |
Malgré
une certaine hostilité, pour ne pas dire une hostilité certaine aux
pratiques et même aux personnes du gouvernement précédent (2), le
nouveau ministre a parlé clair et on attend bien entendu qu'il
traduise ses propos en actes de gestion qui implanteront dans les
faits l'ouverture et le pluralisme dont il sait très bien parler.
Quoi qu'il en soit, il a le mérité d'expliquer les enjeux
économiques qui sous-tendent la politique générale de ce
gouvernement qui veut obtenir la démission des hauts responsables
nommés par Cristina de Kirchner et qui n'acceptent pas de se mettre
au service du nouveau Président, pourtant démocratiquement élu,
qui pensent qu'ils ont légitimité à conserver leur ligne d'action,
sous prétexte qu'ils ont été nommés pour un mandat qui court
toujours, alors qu'un changement global de politique a été
enclenché par un vote du peuple souverain (3).
Extraits
-¿Están
sentados en lo que fue el ministerio del Relato? [la entrevista se
realiza en la oficina que ocupó en Tecnópolis, Javier Grosman]
-(Lombardi)
Fue no sólo el ministerio del relato sino en muchos aspectos fue un
aparato propagandístico muy fuerte, concentrado y unilateral que se
montó durante 12 años. Y esto desde nuestro punto de vista ha sido
muy pernicioso para la Argentina y también, desde mi punto de vista,
para el anterior gobierno que terminó creyéndose ese propio relato
y se fue alejando cada vez más de la realidad. Fue un relato muy
pobre intelectualmente y en valores.
La
Nación
- Vous
êtes assis dans ce qui fut le ministère du Récit ? (4)
[L'interview se tient dans le bureau que Javier Grosman a occupé à
Tecnópolis]
(Lombardi) - Cela n'a pas été que le ministère du récit. Sur de nombreux
aspects, ça a été un appareil de propagande très costaud,
concentré et unilatéral qu'on a monté pendant douze ans. Et ceci
de notre point de vue a été très pernicieux pour l'Argentine et
aussi, de mon point de vue, pour l' ancien gouvernement qui a fini
par croire à son propre récit et a de plus en plus perdu le contact
avec la réalité (5). Cela a été un récit très pauvre sur le
plan intellectuel et en terme de valeurs (6).
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
[…]
Nuestra
misión es aportar a una fuerte ampliación de la ciudadanía, donde
cada argentino sea un ciudadano libre, respetuoso, con espíritu
crítico, incentivado para el conocimiento y la vida en sociedad.
Esto es muy distinto a construir un pensamiento único alternativo al
pensamiento único dominante. Esto es que se exprese la enorme
diversidad regional y de los orígenes. Nosotros debemos respetar
simultáneamente el aporte de las culturas precolombinas y también
el aporte de las corrientes inmigratorias. No somos lo uno o lo otro,
somos lo uno y lo otro. Debemos reconocer el pensamiento de las
grandes ciudades pero también el de las regiones y de los pequeños
pueblos. Reconstruir un sentido auténticamente federal.
La
Nación
Notre
mission est de contribuer à élargir [l'accès de tout] à nos
concitoyens, pour que chaque Argentin soit un citoyen libre,
respectueux, doté d'un esprit critique, encouragé à connaître et
à vivre en société. Et ceci est très différent de construire une
pensée unique alternative à la pensée unique dominante (7).
Il faut que s'exprime l'énorme diversité régionale et celle des
origines. Nous devons respecter simultanément la contribution des
cultures précolombiennes et aussi celle des courants d'immigration
(8). Nous ne sommes pas l'un ou l'autre, nous sommes l'un et l'autre.
Nous devons reconnaître la pensée des grandes villes mais aussi
celle des régions (9) et des petits villages. Reconstruire un sens
du fédéralisme authentique. (10)
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
En
cada una de las áreas la palabra federalismo está atravesando todo.
Pluralismo, tolerancia, diversidad y que todas las opiniones se
puedan expresar. Y otro eje va a ser la fuerte impronta de futuro.
Pararnos en nuestra historia pero enamorarnos del futuro, ese es el
concepto con el cual vamos a desmontar este ministerio de la
propaganda. Vamos a hacer un aporte a la sociedad plural de los
argentinos.
Para
nosotros esto es esencial. Cada cosa concreta que hagamos va a estar
impregnada de estos valores.
-
(Sigal) Nosotros no solamente respetamos la diversidad porque es un
derecho de las personas sino que decimos que sale de allí las cosas
nuevas, de los diferentes pensamientos salen las mejores cosas.
-
(Lombardi) No es sólo un concepto ético, es un concepto
arquitectónico.
La
Nación
Dans
chacun des secteurs, le mot fédéralisme touche à tout. Pluralisme,
tolérance, diversité et que toutes les opinions puissent s'exprimer.
Et un autre axe sera la forte empreinte du futur. Nous arrêter sur
notre histoire, oui mais aussi tomber amoureux de notre futur, ça,
c'est la notion à travers laquelle nous allons démonter ce ministère de la
propagande. Nous allons réaliser une contribution à la société
plurielle des Argentins.
Pour
nous, ça, c'est essentiel. Chaque chose concrète que nous allons
faire va être imprégnée de ces valeurs-ci.
(Sigal) - Nous, nous n'allons pas nous contenter de respecter la diversité parce que c'est
un droit de la personne. Non, ce que nous disons, c'est que c'est là la source des idées nouvelles. Des modes de pensée différents, c'est le meilleur qui sort.
(Lombardi) - Ce n'est pas qu'une notion éthique, c'est une notion architectonique.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
[…]
-¿Qué
va a pasar con Tecnópolis?
-(Ricardes)
Tecnópolis es un parque de arte, ciencia y tecnología, que va a
continuar con sus muestras como estaba previsto. En líneas
generales, las muestras empezaban en julio y terminaban en noviembre.
Se va a empezar a trabajar ahora con los socios que tiene el parque,
los ministerios de Ciencia, Educación y Cultura en las nuevas
muestras. Vamos a trabajar en un parque que no sea un organismo de
propaganda de entes gubernamentales sino que tienda a mostrar el
enorme potencial, la creatividad y la innovación de los argentinos.
También vamos a buscar asociaciones estratégicas con otros parques
similares en el mundo. Y además esperamos darle una itinerancia en
el interior del país con asociaciones con diferentes provincias, que
puedan articular también con actores locales.
-(Lombardi)
El concepto de modernidad. Este va a ser un lugar donde se pueda
exhibir el futuro. Este año en particular va a estar dedicado a la
celebración del bicentenario. Tanto el CCK como Tecnópolis tendrán
una enorme interrelación con los medios audiovisuales, va a ser un
polo de creación de contenidos.
La
Nación
- Que
va-t-il se passer à Tecnópolis ?
(Ricardes) - Tecnópolis est un parc à thème autour de l'art, de la science et
de la technologie qui va continuer avec ses expositions comme c'était
prévu. En ligne générale, les expositions commençaient en juillet
et se terminaient en novembre. On va travailler avec les partenaires
du parc, les ministère des Sciences, de l'Education et de la Culture
sur les nouvelles expositions. Nous allons travailler sur un parc qui
ne soit pas un organisme de propagande d'institutions
gouvernementales mais qui tendent à montrer l'énorme potentiel, la
créativité et l'innovation des Argentins. Nous allons aussi
chercher des associations stratégiques avec d'autres parcs
similaires dans le monde (11). Et en plus, nous espérons le rendre
itinérant dans l'intérieur du pays en partenariat avec différentes
provinces, des partenariats qui puissent aussi s'articuler avec des
acteurs locaux.
(Lombardi) - L'idée de modernité. Ce parc va devenir un lieu où on pourra
exposer le futur. Cette année en particulier va être consacrée à
la célébration du bicentenaire (12). Tant le CCK que Tecnópolis
auront une énorme interaction avec les médias audiovisuels. Ce sera
un pôle de création de contenus.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-¿Los
presupuestos que cada uno de estos entes se van a mantener?
-(Lombardi)
Son los que están votados en la ley de presupuesto. En todos los
casos hay un sistema laberíntico donde hay recursos que provienen de
distintos ministerios. Eso no es solamente mucha desorganización
sino también muy poca transparencia. Hay que hacer un trabajo de
orfebre para rescatar y ordenar todas las partidas. En los últimos
15 días estuvimos trabajando en ese ordenamiento.
La
Nación
- Les
budgets de chacune de ces entités vont être maintenus ?
(Lombardi) - Ce sont ceux qui ont été votés dans la loi du budget. Dans tous
les cas, il y a un système labyrinthique où les ressources
proviennent de différents ministères. Tout ça, ce n'est pas
seulement beaucoup de désorganisation mais aussi une bien faible
transparence. Il y a un travail d'orfèvre à faire pour préserver
et ordonner toutes les participations. Au cours des quinze derniers
jours, nous n'avons pas cessé de travailler sur cette mise en ordre.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-Con
no menos de 5000 trabajadores en todos los medios y áreas, el
personal es otro gran capítulo para el nuevo ministerio
-(Lombardi)
Obviamente, el de los recursos humanos es un gran capítulo que
atraviesa todo. Sobre todo en el sistema de medios, vamos a rescatar
a gente muy profesional, muy valiosa que tiene muchos años de
trabajo, que ha convivido con una politización extrema que se generó
en los últimos años y casi te diría en los últimos meses. Nada de
eso va a tener lugar dentro del sistema. Todo el que trabaja tiene
que estar muy tranquilo, que se va a respetar su trabajo. Y todo el
que no trabaja, tendrá que estar bien intranquilo porque no se va a
respetar su condición de ñoqui.
La
Nación
- Avec
pas moins de 5000 salariés dans tous les médias et les secteurs, le
personnel est l'autre grand poste pour le nouveau ministère.
(Lombardi) - C'est clair. Le poste ressources humaines est un poste important qui
touche à tout. Surtout dans l'organisation des médias, nous allons
préserver des gens très professionnels, très précieux, qui ont
derrière eux beaucoup d'années de travail qui ont cohabité avec
l'extrême politisation de ces dernières années et même, serais-je
tenté de dire, des derniers mois. Rien de tout cela ne se produira
dans ce groupe. Tous ceux qui travaillent n'ont pas à s'inquiéter,
on va respecter leur travail. Et tous ceux qui ne travaillent pas,
ils peuvent s'inquiéter parce qu'on ne va pas respecter leur
qualité de tire-au-flanc.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-¿Qué
va a pasar con el CCK?
-(Ricardes)
Es una situación diferente de la de Tecnópolis porque es un
organismo que, digamos, nació prematuramente y en el que convivían
los ministerios de Planificación y Cultura. Tiene estructuras
paralelas, áreas que no se articulan y todo eso se ve reflejado en
una artística que para nuestra manera de ver no está a la altura de
un centro cultural que tiene que ser un faro para América latina.
Además, todo se financia a través de las universidades. No hay
estructura, no hay organigrama, no hay director ni gente de carrera.
Hay que crear toda esta estructura para empezar a pensar. Barajar y
dar de nuevo. Así como funciona no lo hace bien, hay mucho dinero
público que se invirtió en esto y amerita una nueva mirada. No hay
un concepto de programación ni curatorial ni de muestras. Los
espacios conviven programados caóticamente, de diferentes áreas,
artes y personas.
-(Lombardi)
El CCK no tuvo hasta ahora director. Que un organismo cultural no
tenga director es muy sintomático del desorden porque es quien debe
impregnar con su visión el organismo.
-(Ricardes)
Por otro lado, es un espacio que mucha gente no conoce y más allá
de la anécdota del nombre creo que eso se debe a que no se trabajó
para desarrollar una política de contenidos y cultural, sino que se
tomó más que nada como un bastión de la cultura militante que
resulta muy expulsiva para una enorme cantidad de ciudadanos. Creemos
que esto se debe revertir, que es un centro cultural maravilloso y
que hay que empezar a trabajar en el diálogo que no tuvo en su
nacimiento. Eso va a ser un enorme trabajo.
La
Nación
- Que
va-t-il se passer au CCK ?
(Ricardes) - C'est une situation très différente de celle de Tecnópolis parce
que c'est un organisme qui, si je puis dire, est né prématuré et
dans lequel cohabitaient les ministères de la Planification (13) et
de la Culture. Il a des structures parallèles, des secteurs qui ne
s'articulent pas entre eux et tout ça se reflète dans une politique
artistique qui, selon notre façon de voir les choses, n'est pas à
la hauteur d'un centre culturel qui doit être un phare pour
l'Amérique latine. Qui plus est, tout est financé à travers les
universités. Il n'y a pas de structure, il n'y a pas d'organigramme,
il n'y ni directeur ni personnel professionnel. Il faut créer toute
cette structure pour commencer à penser. Battre les cartes et les
redistribuer. Tel que ça fonctionne en ce moment, ce n'est pas bon.
Beaucoup d'argent public a été investi et ça mérite qu'on y
regarde de plus près. Il n'y a pas de notion générale de
programmation, ni de conservation ni de commissariat pour les
expositions. Les espaces font cohabiter des programmes chaotiques, de
secteurs différents, de disciplines et de personnes.
(Lombardi) - Le CCK n'a encore jamais eu un directeur. Qu'un organisme culturel
n'ait pas de directeur est très symptomatique d'un certain désordre parce
qu'il faut bien quelqu'un pour imprégner le lieu de sa vision des
choses.
(Ricardes) - Par ailleurs, c'est un espace que beaucoup de gens ne
connaissent pas et au-delà de l'anecdote du nom [qui lui a été
donné, celui de Néstor Kirchner, NdT], je crois que cela est dû au
fait qu'aucun travail n'a été fait pour développer une politique
culturelle et de contenus, mais que [le centre] a été pris surtout
comme un bastion de la culture militante qui se révèle très
excluante pour une énorme quantité de nos concitoyens. Nous
croyons qu'il faut retourner la situation, que c'est un centre
culturel merveilleux et qu'il faut commencer à travailler dans le
dialogue qui n'a pas eu lieu à sa naissance. Cela va être un
travail énorme.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
[…]
Dans
le paragraphe suivant, sur une suggestion du journaliste, qui ne
brille pas par sa pugnacité, reconnaissons-le, mais flirte plutôt
avec la flagornerie, Hernán Lombardi donne un exemple de réussite
qui n'aurait pas coûté aussi cher que l'exorbitant CCK : le
travail qu'il a lui-même réalisé à La Boca, avec la Usina del
Arte, quand il était ministre de la culture du Gouvernement
portègne, et qui aurait pu être dupliqué dans toutes les provinces
pour le prix investi dans les travaux du CCK. Ce manque d'humilité
dévalorise passablement son propos pourtant intéressant...
-¿Estuvo
tomado el edificio del CCK por los trabajadores?
(Ricardes)
No, hicieron un abrazo por una defensa de la gratuidad, que
aprovechamos para aclarar que no está en juego, y del nombre. Son
dos temas que no están en la agenda: el nombre es un tema del
Congreso y la gratuidad se va a mantener. Tuvimos una charla con los
trabajadores y no hay demasiados problemas. Sí hay incertidumbre por
la modalidad de contratación. Contratos que nosotros revisaremos en
función del proyecto que el centro cultural va a tener. Entendemos
que están contratados de manera precaria
(Lombardi)
El 95% no tiene más de cinco o seis meses de contrato. Esos
contratos vencen el 31 de diciembre.
La
Nación
- Le
bâtiment du CCK a-t-il été occupé par son personnel ?
(Ricardes) - Non, il a manifesté pour défendre la gratuité [des activités
publiques] et nous en avons profité pour expliquer que ce n'était
pas remis en question, et pour défendre la dénomination. Ce sont
deux points qui ne sont pas à l'ordre du jour : la dénomination
dépend du Congrès et la gratuité, on va la maintenir. Nous avons
eu une discussion avec les salariés et il n'y a pas trop de
problèmes. Ce qu'il y a, c'est de l'incertitude à cause de la
modalité de recrutement. Des contrats de travail que nous allons
revoir en fonction du projet qui sera celui du Centre culturel. Nous
avons compris que les gens avaient été embauchés sur des bases
précaires.
(Lombardi) - 95% d'entre eux ont un contrat qui ne dépasse pas les 5 ou 6 mois.
Ces contrats prennent fin le 31 décembre.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-
¿Qué pasará con Encuentro, Paka Paka y DeporTV?
(Ricardes)
Educar es un ente que compartimos con el Ministerio de Educación.
Ese ministerio va a seguir ocupándose del contenido específico para
estudiantes, padres y educadores. Y los canales de televisión son de
nuestra responsabilidad. Vamos a continuar con los tres canales,
vamos a revisar las grillas de contenidos, vamos a rescatar los
ciclos que nos parezcan interesantes y vamos a aportar otras miradas.
(Lombardi)
La semana que viene presentaremos al equipo que encabezará estos
canales. Seguramente circularán contenidos de estos y otros medios
dentro del sistema. Nosotros tenemos una visión positiva de
Encuentro, más allá de cierto sesgo que tiñó todo en los últimos
meses.
La
Nación
- Que
se passera-t-il avec Canal Encuentro, Paka Paka et DeporTV ?
(14)
(Ricardes) - Educar est une structure que nous partageons avec le Ministère de
l'Education. Ce ministère va continuer à s'occuper du contenu
spécifique pour les élèves, les parents et les éducateurs. Et
les chaînes de télévision relèvent de notre responsabilité. Nous
allons continuer avec les trois chaînes, nous allons revoir les
grilles de programmation, nous allons conserver les émissions qui
nous paraissent intéressantes et nous allons apporter d'autres
contributions, avec un autre regard.
(Lombardi) - La semaine qui vient, nous présenterons l'équipe qui sera à la
tête de ces chaînes. Ce qui est sûr, c'est que leurs contenus et
ceux d'autres médias circuleront à l'intérieur du système. Nous
avons une vision positive de Canal Encuentro, au-delà d'une certaine
distorsion qui a tout déformé ces derniers mois.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-¿Cómo
se va a resolver la cuestión del directorio de Radio y Televisión
Argentina (RTA), que se rige por la ley de medios?
(Lombardi)
Estamos hablando de Canal 7, Radio Nacional sus FM y las 50 emisoras
que la integran en todo el país. En la ley de medios audiovisuales
está claro qué es RTA, sus objetivos y cómo se compone su
directorio, que tiene siete miembros. Dos son designados por el Poder
Ejecutivo, tres por el Congreso, uno por las universidades y otro por
los trabajadores (estos últimos son a su vez designados por el
Consejo Federal de Comunicación Audiovisual). Fueron designados hace
dos años con un mandato de cuatro años. ¿Con qué filosofía
encaramos esta transformación? Nosotros estamos convencidos de que
hay que darle al sistema la combinación de mantenimiento de las
cosas buenas que se hicieron y corrección de las malas. Esto
significa un recambio institucional dentro de la misma organización.
Aspiramos a que todo el mundo reflexione y permita este cambio, que
dará continuidad a RTA.
El
Ejecutivo tiene sólo dos directores. Uno ya renunció, que es
Tristán Bauer. Falta el ingeniero Alberto Cantero, con quien me voy
a reunir mañana y al que ya le hemos pedido un paso al costado. Lo
que estamos pidiendo que nos dejen designar a los dos directores del
Ejecutivo para darle continuidad a las cosas buenas que se hicieron.
La
Nación
- Comment
va se résoudre le problème de la direction de Radio et Télévison
Argentines (RTA) qui est régi par la loi des médias ? (15)
(Lombardi) - Nous parlons là de Canal 7, Radio Nacional, ses modulations de
fréquence et ses 50 antennes locales dans tout le pays. Dans la loi
sur les médias audiovisuels, ce que sont RTA, ses objectifs et la
manière dont se compose son comité directeur, de sept membres,
c'est très clair. Deux sont désignés par le pouvoir exécutif,
trois par le Congrès, un par les universités et un autre par les
[représentants des] salariés (lesquels sont désignés de leur côté
par le Conseil fédéral de communication audiovisuel). Ils ont été
désignés il y a deux ans pour un mandat de quatre ans. Quelle est
notre philosophie pour envisager cette transformation ? Nous
sommes convaincus qu'il faut donner au système une combinaison entre
le maintien des bonnes choses qui ont été faites et la correction
des mauvaises. Cela entraîne un changement institutionnel profond à
l'intérieur de l'organisation elle-même. Nous souhaitons que tout
le monde réfléchisse et permette ce changement qui fera que RTA
continue.
L'Exécutif
n'a que deux directeurs. L'un a déjà démissionné, c'est Tristán
Bauer. Pas l'ingénieur Alberto Cantero (16), avec lequel je vais
avoir une entrevue demain et à qui nous avons demandé de se
retirer. Ce que nous demandons, c'est qu'ils nous laissent désigner
les deux directeurs de l'Exécutif pour continuer les bonnes choses
qu'ils ont faites.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-Pero
si Cantero no renuncia, ¿Podrían intervenir RTA como se hizo con la
Afsca y la Aftic?
(Lombardi)
Hay varios mecanismos legales, uno de esos es ese. Nosotros instamos
a todo el mundo a que sea razonable. Esto es central para los pasos
posteriores, para la designación de las autoridades en Canal 7 y
Radio Nacional. Creo que son importantes los hechos se dieron estos
días, aún antes de asumir: la renuncia de Bauer, de la directora de
Radio Nacional, María Seoane, y los gerentes del noticiero en Canal
7, Carlos Figueroa -que había sido jefe de campaña de Mariano
Recalde- y Víctor Taricco. También se fue el presidente de Telam,
Fabián Rodríguez. Y a todo esto se suma que el grupo Indalo decidió
retirar 6,7,8, que era un programa suyo.
Con
esto ya se empieza a sentir el recambio institucional, con lo cual
además estamos ahorrando cuantiosas indemnizaciones y costos al
Estado. Hay que tener mucho cuidado con esto. Con firmeza y paciencia
hemos venido logrando estos objetivos.
La
Nación
- Mais
si Cantero ne démissionne pas, pourriez-vous prendre le contrôle
direct de RTA comme cela s'est fait à la AFSCA et la AFTIC ?
(Lombardi) - Il y a plusieurs mécanismes légaux, dont celui-là. Nous demandons
instamment à tout le monde de se montrer raisonnable. C'est crucial
pour les démarches postérieures, pour la désignation des
dirigeants à Canal 7 et Radio Nacional. Je crois que les faits qui
ont eu lieu ces jours derniers, avant même l'investiture du
gouvernement, sont importants : la démission de Bauer, de la
directrice de Radio Nacional, María Seoane, et les directeurs de
service du journal télévisé de Canal 7, Carlos Figueroa, qui avait
été directeur de campagne de Mariano Recalde- (17) et Víctor
Taricco. Le président de Télam, Fabián Rodríguez, est parti lui
aussi. Et à tout ça, il faut ajouter que le groupe Indalo s'est
décidé à retirer 6,7,8, qui était l'un de ses programmes (18).
A partir de là, on commence à sentir un grand changement institutionnel, grâce à quoi nous réalisons en plus de substantielles économies pour l'Etat. Il faut aussi être très attentif à cet aspect des choses. Avec de la fermeté et de la patience, on va parvenir à atteindre ces objectifs...
A partir de là, on commence à sentir un grand changement institutionnel, grâce à quoi nous réalisons en plus de substantielles économies pour l'Etat. Il faut aussi être très attentif à cet aspect des choses. Avec de la fermeté et de la patience, on va parvenir à atteindre ces objectifs...
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-Pero
hay quienes siguen resistiendo...
-(Lombardi)
Todas estas patrullas perdidas se engloban en un concepto muy
equivocado y de baja comprensión del tiempo que estamos viviendo.
Detrás de todo esto está la idea de resistencia. La resistencia
peronista se hizo del 55 al 73 considerando que Perón estuvo
proscripto y luego al régimen dictatorial del 76 al 83. Entendemos
el concepto de resistencia pero es anacrónico y ética y
políticamente bajísimo hacerle resistencia al gobierno
constitucional de los argentinos, que asumió hace dos semanas. ¿De
qué resistencia están hablando? ¿Resistencia a la voluntad
popular, a la democracia, a la república? Es intolerable. No pueden
existir estas patrullas perdidas. Es una cosa escandalosa que hemos
naturalizado.
La
Nación
- Mais
il y en a qui continuent à résister...
(Lombardi) - Tous ces barouds d'honneur correspondent à une
conception très erronée, à une très mauvaise compréhension de
l'époque que nous sommes en train de vivre. Derrière tout ça, il y
a la notion de résistance. La résistance péroniste a eu lieu de 1955
à 1973 parce que Perón était proscrit et ensuite contre le régime
dictatorial de 1976 à 1983. Nous comprenons la notion de résistance
mais elle est anachronique et, sur le plan éthique et politique, c'est nullissime de faire de la résistance contre le
gouvernement constitutionnel des Argentins, qui est entré en
fonction il y a deux semaines. De quelle résistance parle-t-on ?
Résistance à la volonté populaire, à la démocratie, à la
république ? C'est intolérable. Ces barouds d'honneur, ça ne doit pas exister. C'est un scandale qui a fini par nous paraître quelque chose de normal.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-(Sigal)
Nosotros reclamamos como actitud para gobernar la posibilidad de
cambiar las cosas porque no estamos de acuerdo con muchas de las que
se hicieron. Por eso la ciudadanía decidió cambiar la
administración del Estado. En el área que me toca a mi estamos
frente a lugares que se han distorsionado. La Radio Nacional, el
canal oficial y la agencia Télam no son lugares para irradiar
propaganda partidaria. Allí tienen que estar representada la
sociedad argentina. En los medios públicos no hubo debate. Debatir
no es bajar línea, es escuchar, responder y llegar a una síntesis.
Inevitablemente,
para montar algo nuevo hay que desmontar cosas viejas. Ahí tenemos
un trabajo fuerte, yo soy muy consciente de lo que significa este
anquilosamiento y retraso que ha habido en los medios del Estado.
-(Ricardes)
Escuchamos periodismo, cultura y ciencia militante, como si todo eso
bien hecho no fuera militante por sí mismo. ¿Cómo no creer en el
poder revolucionario del arte y la cultura cuando está bien
ejercida?
-(Sigal)
Una sociedad plural existe si vos respetás todas las voces. La
homogeneidad no es democrática. Son cosas muy elementales pero se
han convertido en extrañas. Nosotros no venimos a construir un
contrarrelato, que sería absurdo.
La
Nación
(Sigal) - Pour gouverner nous revendiquons la possibilité de changer les
choses parce que nous ne sommes pas d'accord avec beaucoup de celles
qui se sont faites. C'est pour cette raison que nos concitoyens ont
décidé de changer la politique à la tête de l'Etat. Dans le
secteur qui me concerne, nous sommes face à des institutions qui ont
été détournées de leur objectif. Radio Nacional, la chaîne publique et l'agence
Télam ne sont pas des institutions destinées à diffuser de la
propagande de parti. C'est le lieu où la société argentine doit se
voir représentée. Dans les médias publics, il n'y a pas eu de
débat. Débattre, ce n'est pas mettre abaisser le pavillon,
c'est écouter, répliquer et parvenir à une synthèse.
Inévitablement,
pour monter quelque chose de nouveau, il faut démonter des choses
anciennes. Et là-dessus, nous avons beaucoup de travail, je suis
très conscient de ce que signifie cette ankylose et ce retard qu'il
y a eu dans les médias de l'Etat.
(Ricardes) - Nous entendons les journalistes, les hommes de culture et les
scientifiques qui militent. Comme si tout cela, quand c'est bien
fait, ce n'était pas du militantisme en soi ! Comment ne pas croire au
pouvoir révolutionnaire de l'art et de la culture quand il est
bien exercé ? (19)
(Sigal) - Une société plurielle existe à condition que tu respectes toutes les voix.
L'homogénéité ce n'est pas démocratique. Ce sont des choses très
élémentaires mais elles se sont transformées en bizarreries. Nous,
nous ne venons pas construire un contre-récit, ça serait absurde.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-¿Cuáles
son los modelos a seguir en la radio y televisión públicas?
-(Lombardi)
Nosotros aprendemos de todos. Podemos aprender de la TV francesa, la
BBC o la TV Nacional de Chile, que son modelos distintos entre sí,
pero que se pueden adaptar a la realidad y la idiosincrasia
argentinas. Nosotros tenemos que operar sobre la realidad argentina,
que es distinta de la francesa, la británica o la chilena. Una cosa
que sí vamos a hacer es un manual de estilo de los medios públicos,
cuya redacción vamos a encargar a un consejo de intelectuales.
-(Sigal)
Necesitamos recuperar el objetivo de los medios públicos que estuvo
adormecido detrás de la propaganda. La propaganda te convierte en un
sujeto pasivo. La idea del periodismo militante subestimó al
periodista, al que deja sin la capacidad de pensar por cuenta propia.
Eso es una aberración. Es la idea que se instaló la ex presidenta,
la idea de que el periodista es alguien comprable por unos pesitos.
La
Nación
[…]
- Quels
sont les modèles que la radio et la télévision publiques devraient
suivre ?
(Lombardi) - Nous, nous apprenons de tout le monde. Nous pouvons apprendre de la
télé française, de la BBC ou de la télé nationale du Chili, qui
sont des modèles différents l'un de l'autre, mais qui peuvent être
adaptés à la réalité et aux particularités argentines. Nous
devons opérer sur la réalité argentine, qui est différente de la
réalité française, britannique ou chilienne. Une chose que nous
allons faire, là c'est clair, c'est un manuel avec des règles de
conduite des médias publics dont nous allons confier la rédaction à
un conseil d'intellectuels.
(Sigal) - Nous avons besoin de maîtriser la raison d'être des médias publics
qui s'est endormie derrière son rideau de propagande. La propagande
te transforme en un sujet passif. L'idée du journalisme militant
sous-estime le journaliste, qu'il prive de sa capacité à penser par
lui-même. Et ça, c'est une aberration. C'est l'idée dans laquelle
s'est installée l'ex-présidente, l'idée que le journaliste c'est
quelqu'un qu'on peut acheter avec quelques sous. (20)
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
-¿Es
posible hacer periodismo desde el Estado?
-(Lombardi)
Es una pregunta filosófica. Nosotros creemos que sí, es posible
desde lo público no desde lo gubernamental.
-(Ricardes)
Es otra también la misión, la difusión de otra información o de
realidades locales que los medios privados no cubren.
La
Nación
- Est-il
possible de faire du journalisme dans des organismes d'Etat ?
(21)
(Lombardi) - C'est une question philosophique. Nous, nous croyons que oui, c'est
possible dans un cadre public, pas au sein d'un gouvernement.
(Ricardes) - C'est aussi que la mission est différente, il s'agit de diffuser une
autre information, parler de réalités locales que les médias
privés ne couvrent pas.
(Traduction
© Denise Anne Clavilier)
Pour
aller plus loin :
lire
l'intégralité de l'interview dans La Nación de dimanche
lire
l'article de La Nación sur l'analyse du ministre de l'Intérieur sur
la situation à l'AFSCA, la haute autorité fédérale de
l'audiovisuelle reprise en main directement par le Gouvernement
obligé de révoquer un directeur qui entendait faire de la
résistance depuis ses fonctions
lire
l'éditorial de Página/12 de lundi, signé par Horacio González. L'ex-directeur de la Bibliothèque nationale, qui ne mentionne même
plus cette fonction alors que son remplaçant, Alberto Manguel,
n'arrive qu'en juillet, y répond indirectement à Hernán Lombardi. Cet article s'avère très pénible à lire à cause d'une langue de bois très épaisse dont abuse ce sociologue, qui savait pourtant être clair et intéressant avant l'alternance. Il en découle une argumentation incompréhensible, où il peine à justifier
l'emploi du concept de "résistance" dans le contexte pleinement démocratique qui
est aujourd'hui celui de l'Argentine.
Vous
pouvez lire aussi l'article d'aujourd'hui, dans La Nación, sur les
contrats 2016 de quelques vedettes kirchneristes de Radio Nacional.
C'est tristement édifiant sur la manière dont certaines personnes ont abusé (mais les mêmes injustices se produisent aussi par chez nous pour les vedettes du micro qui absorbent l'immense part de la masse salariale au détriment des travailleurs plus modestes mais néanmoins indispensables à la bonne marche de l'ensemble).
Ajouts du 6 janvier 2016 :
lire aussi cet article de Página/12 qui rapporte le point de vue du personnel du CCK soutenu par deux syndicats : les salariés se plaignent du manque de dialogue avec les nouveaux dirigeants,
lire l'article de La Nación sur la situation des salariés précaires dont le contrat, qui prenait fin le 31 décembre, n'a pas été renouvelé et qui devraient dans les jours qui viennent avec chacun un entretien sur le poste occupé et l'éventuelle embauche ferme. Cet article est plus équilibré et moins polémique.
Quand on lit les deux analyses, on prend conscience qu'il a sans doute chez certains kirchneristes l'idée qu'une confiscation de cette infrastructure publique à leur profit est légitimée par le fait que le centre a été pensé et conçu par Cristina de Kirchner. Ils ne semblent pas avoir pris conscience que le vote du peuple souverain est au-dessus de leurs desiderata individuels.
Le discours, qui se soutenait très bien lorsque ces mêmes personnes étaient dans la majorité, se transforme maintenant en un déni de démocratie assez préoccupant et donne raison (à mes yeux a posteriori) à l'ancienne opposition qui m'a souvent surprise (pour ne pas dire choquée) par ses accusations ultra-violentes et souvent insultantes contre la majorité de despotisme et d'appropriation (des accusations de despotisme et d'appropriation de l'Etat que j'écoutais sans en accepter le bien-fondé à cause de leur caractère éructant, parfois franchement haineux et de l'absence d'argument pour les fonder, en bonne Européenne habituée à construire une argumentation dans tous les domaines). Je constate que l'expression de l'hostilité civique et son ton quasi-haineux ainsi que la mauvaise foi, à moins qu'il ne s'agisse que de cette déroutante absence d'argumentation qui se tienne, ont changé de camp.
Ajouts du 7 janvier 2016 :
lire l'article de La Prensa, où Lombardi explique la raison du non-renouvellement de 600 contrats de travail du CCK issus d'un montage irrégulier de prêt de main d'œuvre de la part de trois universités nationales de la périphérie portègne, trois universités très marquées par le kirchnerisme. Le ministre y confirme ce qu'il disait déjà dans la longue interview de La Nación : le CCK a commencé à fonctionner sans qu'il y ait eu livraison des travaux, sans garantie et même avec d'éventuels problèmes de sécurité pour les personnes fréquentant ce lieu avant cette étape-clé avant ouverture.
lire la depêche de Télam sur l'analyse syndicale de cette même situation des personnels du CCK, où le montage financier très compliqué est présenté comme normal par le représentant syndical alors que c'est une vraie usine à gaz !
Ajout du 23 janvier 2016 :
Dans ses conversations de l'été, des interviews vidéos souvent très intéressantes, La Nación a mis en ligne hier un entretien d'environ une demi-heure avec les deux sous-secrétaires, Graciela Ricardes et Jorge Sigal. Ils commentent les récents événements médiatico-politiques du mois de janvier, sans langue de bois à ce qu'il me semble depuis mon expérience des médias publics en Europe, et exposent leur plan de travail pour les six mois à venir.
Cela peut se regarder et s'écouter en cliquant sur ce lien.
Bien entendu, les militants kirchneristes ne manqueront pas de dénoncer un discours mensonger pour endormir la vigilance du citoyen de gauche. A l'heure qu'il est, je ne vois aucune raison de sombrer dans ce pessimisme. Leur discours est cohérent avec le modèle démocratique et pluraliste qu'ils disent vouloir mettre en place en Argentine. Sans se risquer dans une autre langue que la sienne, la gauche kirchneriste pourrait facilement s'en convaincre en consultant le portail Web de la RTVE : il verrait que le modèle d'un grand groupe audiovisuel public démocratique est bien celui-là.
(1)
Ce rattachement est un peu étrange. Certes ce sont deux institutions
qui ont été fondés par le gouvernement précédent et ont servi
d'écrin à une certaine propagande kirchneriste pendant que les
activités similaires dans l'opposition servait à la communication
inverse. Mais il y en a d'autres, comme la Casa del Bicentenario para
exemple et elle a elle aussi servi de support à beaucoup de propos
typiquement kirchneristes. Alors pourquoi ces deux-là alors que tout
le reste est resté dans l'escarcelle du ministre de la justice. Pour
moi, jusqu'à présent, c'est mystère et boule de gomme !
(2)
Il a en particulier employé des expressions très méprisantes en
parlant de traque aux ñoquis (pour désigner des employés payés à
ne rien faire, dans ce qui s'apparente à des accusations d'emplois
fictifs) et, sur suggestion du journaliste, qui se montre assez
complaisant avec ses interlocuteurs, il s'est livré à des
généralisations vexatoires, en suggérant qu'il y aurait eu des
malversations partout dans les différents organismes dont il a
maintenant la charge tout en avouant qu'en fait, il n'en sait rien.
Il a répondu en trois phrases, la première aurait été suffisante.
Jugez-en plutôt :
-¿Podría
haber hechos de corrupción?
(Lombardi)
Si hubieran conductas penales, serán derivadas a la Justicia
inmediatamente. En todos estos lugares las podría haber. No nos
gusta prejuzgar, pero damos la certeza que si las hubiera irán a la
Justicia. (La Nación).
Tandis qu'avec ces trois phrases, il a tendu
une perche merveilleuse à Horacio González qui s'est empressé de
répondre sur Página/12 aujourd'hui.
(3)
Il y a ici une très mauvaise interprétation de la hiérarchie des
actes politiques de la part de certains membres de l'ancienne
majorité. En démocratie, dans un Etat de droit, l'acte politique
souverain par excellence, c'est celui du corps électoral et non pas
celui d'un mandataire passé qui ne peut pas prolonger son action
au-delà de la durée de son mandat par nomination interposée (cette
dernière solution relève de l'Ancien Régime, sous lequel la
souveraineté revient non pas à la Nation, qui s'exprime à travers
le corps électoral, mais au Prince, qui n'est responsable devant
personne, sauf devant Dieu lorsqu'il s'agit d'une monarchie de droit
divin). On a ici un nouvel exemple de cette confusion si fréquente
en Argentine entre Etat et Gouvernement, une confusion que Hernán
Lombardi a le mérite de dénoncer depuis le premier jour et sans
varier dans la clarté des concepts qu'il manie.
(4) Le récit en question,
c'est la version de l'histoire du pays proposée par Cristina de
Kirchner, une vision marquée au sceau de l'idéologie, donc qui tord
la réalité dans un sens précis, et qui a été et reste partagée
par une bonne partie de l'opinion publique. Depuis les élections
primaires d'août, ce récit s'est d'ailleurs radicalisé en
accentuant les divisions entre les Argentins au point que des gens
jusqu'alors plutôt favorable à Cristina de Kirchner ont fini par
s'en détacher et il semble que ses aspects les plus caricaturaux ont
été révélés par la modération de la nouvelle majorité après
le second tour. Ce récité épouse bien souvent les thèses de ce
qu'on appelle en Argentine le revisionismo, courant idéologique qui
a son propre institut national, fondé par Pacho O'Donnell, qui l'a
abandonné il y a quelques mois parce qu'il lui semblait que la ligne
politique tournait un peu trop au consensus. Au long des trois
mandats kirchneristes, Pacho O'Donnell a plutôt durci ses positions,
au point d'avoir aujourd'hui une mentalité qui frise la guerre
civile. Ce n'est pas bon signe à l'issue d'une période politique qui
se vante d'avoir renforcé la démocratie.
(5) Ce n'est pas faux !
(6) Très pauvre, c'est
peut-être exagéré. C'est moins riche qu'un vrai pluralisme, c'est
sûr, mais ça a indéniablement de la tenue et de la cohérence.
Voilà un jugement de valeur qu'il aurait mieux valu ne pas
prononcer, il ne fait que raidir l'opposition en la méprisant.
(7) Or c'est précisément
de cette manière que s'envisage le revisionismo par exemple, comme
une alternative à l'histoire mitriste (de Bartolomé Mitre, 1821-1906). Comme si l'évolution de
l'histoire aujourd'hui devait se construire comme une alternative à
une conception des choses qui remonte à 1860... Et c'est aussi cette
substitution d'une pensée unique par une autre pensée unique que
l'opposition continue de craindre avec ce changement de majorité.
Avec les nominations extrêmement brillantes qui ont été faites
dans le secteur culturel, ce risque me paraît s'éloigner à grands
pas. D'autant qu'est sans doute arrivée l'époque où l'Argentine
peut s'élever au rang d'une démocratie mûre quand elle a un Pape
qui jette sur elle la lumière depuis Rome. Et un tel projecteur sur
soi, ce n'est pas n'importe quoi pour un pays qui a une aussi haute
opinion de lui-même que l'Argentine. Il faut être à la hauteur.
Visiblement, Macri en a conscience et on se souvient de ce que la
même situation avait provoqué en Pologne jusqu'au dernier souffle
de Jean-Paul II (même si maintenant, dix ans après sa mort, ce bel
élan retombe...)
(8) Allusion essentiellement à la
grande vague migratoire des années 1880-1930 mais il y a eu aussi de
l'immigration tout au long de l'histoire argentine, depuis les années
1520 jusqu'à aujourd'hui. L'un des pères de l'Argentine
indépendance, Manuel Belgrano (1770-1820), était le fils d'un
Italien.
(9) En dehors de la mégalopole qu'est
le Gran Buenos Aires avec ses 11 millions d'habitants, l'Argentine se
compose de cinq grandes régions géo-culturelles que j'ai
personnellement voulu respecter dans mon recueil, Contes animaliers d'Argentine, paru en juin 2015 (Editions du Jasmin) : le
nord-ouest (autour de Tucumán, Salta et Jujuy, premier noyau de
présence chrétienne dans l'actuelle Argentine), le nord-est appelé
aussi Litoral ou Mesopotamia entre les fleuves Paraná et Uruguay,
marqué par les républiques agraires et largement métissées des
Missions jésuites (Entre Ríos, Corrientes et Misiones), le Centre
ou les Pampas avec les Provinces actuelles de Santa Fe, Buenos Aires,
La Pampa et Córdoba, Cuyo autour de Mendoza, San Juan et San Luis et
l'immense Patagonie qui va jusqu'au cercle polaire avec la Tierra de
Fuego. A chacune de ces régions correspondent des musiques
spécifiques, bien reconnaissables, des spécialités gastronomiques,
des événements historiques marquants, des productions agricoles qui
dépendent du paysage et du climat, donc des modes et des rythmes de
vie différents...
(10) Cela semble être déjà la
réalité au moins sous des aspects non directement culturels. Je
n'ai pas souvenir d'avoir vu Cristina aller visiter des provinces
sinistrées s'il ne s'agissait pas de provinces qui lui étaient
proches, par des liens personnels ou des liens politiques. Je ne me
souviens pas de l'avoir vu visiter une province dont le Gouverneur ne
soit pas dans son alliance ou son parti. En quinze jours depuis son
investiture, Mauricio Macri s'est rendu dans trois provinces
affectées par des catastrophes sociales ou naturelles sans s'arrêter
à des considérations partisanes. C'est une rupture avec la pratique
précédente.
(11) Si cela se fait, ce sera une
véritable et profonde rupture. L'Argentine officielle sous les
Kirchner était très autarcique dans ces domaines comme en d'autres.
Ce qui est très péroniste. A ceci près que Perón a gouverné en
pleine guerre froide et au tout début de l'existence de l'ONU, ce
qui est un contexte très différent de celui qui prévaut
aujourd'hui.
(12) 2016 sera la dernière année des
six au cours desquelles l'Argentine aura célébré sa révolution et
son indépendance. Le 9 juillet 2016, ce sera le bicentenaire de la
Déclaration d'indépendance (votée à Tucumán). Le 15 janvier
2017, on fêtera sans doute celui du départ de la plus grande épopée
de cette période fondatrice, le départ de l'Armée des Andes, sous
la conduite de José de San Martín. Il va falloir voir comment
l'Argentine va célébrer le bicentenaire de la victoire de
Chacabuco, le 12 février 2017. La bataille s'est produite sur le sol
chilien, à quarante kilomètres environ au nord de Santiago. En tout
cas, pour la nouvelle majorité, c'est une occasion qu'elle
n'espérait même pas avoir de mettre sa marque sur ces célébrations
à si haute valeur symbolique pour un jeune pays.
(13) Ce ministère n'existe plus dans
l'actuel organigramme gouvernemental.
(14) Canal Encuentro est la chaîne de
télévision culturelle généraliste. Paka Paka une chaîne
culturelle et éducative pour les enfants. DeporTV est la chaîne de
télévision consacrée au sport.
(15) Ley de medios : une des lois
les plus emblématiques du gouvernement précédent, qui s'efforce de
limiter la constitution de groupes hégémoniques dans le monde des
médias et des fournisseurs d'accès Internet. Le Président Macri a
d'ores et déjà annoncé qu'il voulait lui apporter des
modifications profondes, voire la rendre tout à fait inefficace et
revenir à la situation antérieure. C'est en tout cas ce que le
Groupe Clarín, encore et toujours hégémonique, attend de lui pour
prix du soutien à sa campagne électorale.
(16) En Argentine, on donne toujours
leur titre universitaire aux gens. Ingeniero est ici l'un de ces
titres. Mauricio Macri porte lui-même ce titre.
(17) Mariano Recalde a été le
candidat au Gouvernement portègne. Jusqu'au 10 décembre 2015, il
était aussi le PDG d'Aérolineas Argentinas. Vous voyez un peu le
cumul des fonctions ! Qu'on ne nous dise pas après ça que
Radio Nacional était un bastion du pluralisme en Argentine, comme
osait le prétendre María Seoane dans une note de service que j'ai
lue il y a deux ans et demi, après des élections de mi-mandat,
pendant que j'attendais un journaliste dans un couloir : elle y
félicitait le personnel d'avoir su rendre compte des résultats en
respectant l'indispensable pluralisme. Je n'en croyais pas mes yeux.
(18) 6,7, 8 était un programme de débat
tous les soirs en semaine mais un débat entre des participants tous
d'accord sur le fond pour soutenir la politique de Cristina Kirchner
et ridiculiser l'opposition. C'était censé être une émission de
réflexion sur la manière dont les médias rendaient compte de
l'actualité. Parmi les participants réguliers, il y avait la
journaliste de Página/12, Sandra Russo, qui a écrit l'une des
biographies de Cristina de Kirchner, il y a quatre ans. J'ai regardé
une ou deux fois l'émission : c'était vif et plein d'esprit
(d'esprit méchant) et il est sûr qu'à la longue, tous les soirs du
lundi au vendredi, et encore plus si vous étiez du bord opposé,
cela ne pouvait que devenir très vite absolument insupportable.
L'émission a été diffusée à l'antenne pour la dernière fois
mercredi dernier et dimanche, les animateurs vedettes se sont
retrouvés dans un parc de Buenos Aires en plein air pour faire une
nouvelle émission, non diffusée, mais qui a rassemblé une foule de
militants kirchneristes. La page Facebook de l'émission est
d'ailleurs toujours alimentée et conserve son ton querelleur et
clivant.
(19) Cela peut faire sourire de voir
des gens classés à droite dire cela mais c'était l'analyse que
faisait déjà Georges Pompidou, grand connaisseur de l'art
contemporain, lorsqu'il était président de la République, installé
dans un conservatisme tranquille sans une once de pensée de
gauche...
(20) Quel mépris ! Il y a
pourtant beaucoup de journalistes kirchneristes ou péronistes ou
plus globalement de gauche ou anti-libéraux qui le sont non pas
parce qu'ils ont été achetés mais parce que ce sont leurs
convictions. C'est très grave de dire que les autres expriment une
pensée adverse parce qu'on les a achetés. Or c'est une théorie qui
était déjà celle de l'opposition avant les élections. Sur ce
point, ils n'ont pas changé.
(21) C'est intéressant qu'un
journaliste de La Nación pose la question. Comme si les journalistes
qui travaillent dans les grands médias publics en Europe par exemple
étaient contraints de travailler à la soviétique ou à la
chinoise. Il a beau de se réclamer de l'ouverture, ce bonhomme n'a
même pas pris la peine d'étudier la manière dont ses confrères
étrangers excercent leur métier. Ce n'est pourtant pas difficile de
s'informer. Il lui suffirait de s'informer auprès des correspondants
à l'étranger de la rédaction (Elisabetta Picqué, à Rome, pour ne
citer qu'un nom) et d'étudier un tout petit peu les sites Internet
de RTVE (sans sortir de l'espagnol), de la RAI (l'italien, ce n'est
pas bien difficile pour un Argentin) ou d'aller regarder du coté de
la BBC ou des radio-télévisions irlandaise, belge, française,
autrichienne, etc. Il est aussi recroquevillé derrière les
frontières nationales que les kirchneristes qu'il déchire à belles
dents et avec tant de gourmandise malsaine.