jeudi 28 août 2008

¿Día del Abogado o día de los Ñoquis?

Le 29 août, c’est du 2 en 1...

Pour le premier, c’est seulement une fois dans l’année et je n’en ai vu la publicité qu’à un seul endroit : une confiserie-chocolaterie de luxe située avenida Corrientes. Devinez où ? à la hauteur de Plaza Lavalle, à l’un des angles de laquelle sont rassemblés les grandes institutions judiciaires fédérales. On appelle ordinairement ce coin-là Los Tribunales. No comment !
Or donc dans cette chocolaterie, il y a tout pour la fête de demain, notamment d’adorables plaques de bons voeux, en chocolat, pour décorer ces gros gâteaux débordant de crème qu’on trouve partout en ville dans les devantures des confiterías. Il y a des plaques pour les messieurs, qui leur souhaitent Feliz Día del Abogado, et des plaques pour les dames, qui s’ornent d’un élégant Feliz Día de la Abodaga, le tout en belles anglaises caligraphiées en pâte de sucre blanc. C’est mignon tout plein. Un peu trop tape à l’oeil commercial mais mignon. On en croquerait... Et comme ce commerçant semble avisé, il avait avant-hier d’ores et déjà prévu le 4 septembre. Dans sa vitrine, on trouvait déjà des plaques pour souhaiter une bonne fête aux secrétaires (Feliz Día de la Secretaría), les patrons d’abord, les secrétaires juste derrière.

Ainsi donc, très bonne fête à tous les avocats, en particulier ceux qui passent par ce blog, ceux qui écoutent du tango à leurs rares moments perdus, ceux d’Argentine et d’Europe, en particulier un que je connais et apprécie dans le coeur historique de la Capitale des Gaules (1) et d’avance bonne fête aux secrétaires et j’ai une pensée pour toutes ces dames si gentilles qui m’accueillent toujours avec un merveilleux sourire à la Academia Nacional del Tango. Et aussi à Catherine, que je connais personnellement à Paris.

La fête des ñoquis (et une fois n’est pas coutume, vous avez remarqué : c’est du pluriel aussi en porteño), c’est tous les mois, chaque 29 du mois, sauf en février, en plein cagnard estival... (qu’est-ce que vous allez vous faire bouillir une casserole d’eau quand il fait 40º à l’ombre !). Le 29 du mois, il n’y a plus grand monde qui ait beaucoup de sous, alors on mange des gnocchis... Vous aviez déjà reconnu ce merveilleux plat italien dans son habit castillan...

Parce que les ñoquis (gnocchis en francophonie), c’est vachement bon surtout avec de la sauce tomate et du Parmigianito (sic) râpé par dessus et que pour réaliser ces recettes, on a juste besoin de pommes de terre (pápas) ce qui en fait un plat très bon marché et apte à caler les estomacs de toute une famille. Ajoutez à ça que du matin au soir et/ou du soir au matin les Argentins (et les Uruguayens aussi) sirotent le mate, une infusion traditionnelle typique de ce coin du monde, qui hydrate, désaltère, stimule tout l’organisme de bas en haut, métabolisme et neurones ensemble, et apaise la faim. C’est pour cela que nous en trouvons, nous aussi, en Europe dans la plupart des tisanes drainantes et amincissantes où l’âcreté et l’amertume du breuvage sont maquillées par différents arômes articifiels de pomme à la canelle ou de fruits rouges... Dommage parce que le mate tel quel, c’est loin d’être mauvais...

El Día de los Ñoquis, c’est donc le grand jour pour les boutiques de pâtes fraîches dans tout Buenos Aires et sur toute la côte occidentale du Río de la Plata. La ville est pleine de ces boutiques de fabricación propia (pâtes fraîches maison). On trouve même des vraies pâtes fraîches jusque dans les supermarchés, conditionnées en barquettes de polysthyrène et sous film plastique, des vraies, pas les produits industriels de marque, à longue durée de conservation, dont nous autres Européens non italiens sommes inondés.

Un de mes amis très chers, coordinateur de la Ciudad del Tango au CCC Floreal Gorini de son état, sans attendre le 29 du mois, m’a fait savourer quasi à mon arrivée, des ñoquis maison selon une recette à lui (que je ne lui ai pas demandé et j’ai eu tort) et c’était rico, rico comme on dit ici (2). Dans un colectivo (bus) brinquebalant et filant à toute allure en pleine nuit, après le spectacle, il m’a dit qu’il les faisait avec des pommes de terre, de la farine de blé et de la muzzarella (à ne pas confondre avec sa cousine transalpine au lait de bufflone, bien connue sous nos cieux sous le nom de mozzarella). A Buenos Aires, en Argentine mejor dicho (3), les immigrants ont peu à peu tout recréé de leur pays natal. Buenos Aires a une forme suraigüe de Complexe de Robinson Crusoe : les habitants ont tout refait comme à l’identique avec les moyens du bord. Donc ce n’est pas identique et ça donne des musiques, une peinture, des paysages urbains, des saveurs, tous assez différents mais tout aussi bons que les originaux, adaptés et mélangés beaucoup plus que copiés. Et par-dessus, ils ont collé le même nom

Et les ñoquis de Walter valent les 10 000 km au-dessus de l’Atlantique. Son amitié bien davantage, naturellement.

Demain, je suis invitée à manger les ñoquis ailleurs, de l’autre côté de la ville, chez un poète, médecin, avec des montagnes de souvenirs partagés avec des gens aussi essentiels dans l’histoire du tango que le poète Enrique Cadícamo et le chanteur compositeur fondateur du Viejo Almacén à Monserrat, Edmudo Rivero. Quand je vous aurais invités à aller écouter ses poèmes mis en musique et chantés par Melingo, qui revient en octobre en tournée sous nos lattitudes, vous aurez reconnu Luis Alposta (cf. article sur la tournée de Melingo).

Mais je vous parlerai de lui pour autre chose que pour les ñoquis... Mais les ñoquis, c’est très important, jusque dans le tango.

En Buenos Aires son las 3 y media de la tarde
(1) La Capitale des Gaules, antiguo titulo de la ciudad romana de Lugdunun, hoy Lyon en la valle del Rhodano.
(2) rico en gastronomie, ça veut dire très bon, délicieux.
(3) mejor dicho : plutôt, pour être plus exact, pour employer le mot juste...
(4) la pava : la gamelle