L’avocat Daniel Pastor, qui avait été choisi fin mai par Mauricio Macri pour diriger l’école de la police portègne (Academia de Policia Metropolitana), a finalement remis sa démission sans avoir jamais exercé ses fonctions à la tête de cette toute nouvelle institution de Buenos Aires.
Sa nomination avait jeté un froid avant les élections du 28 juin. En effet, dans des publications professionnelles spécialisées, Daniel Pastor a soutenu que les crimes contre l’humanité devaient pouvoir être prescrits, ce qui est contraire à toute la jurisprudence dans le monde entier. Il s’est permis de contester différents jugements rendus par des tribunaux internationaux des droits de l’homme, dont le tribunal international compétent pour les violations des droits fondamentaux en Amérique du Sud, et son hostilité aux organisations de défense des droits de l’homme est connu de tous les spécialistes et militants argentins en la matière. Au début juin, Página/12 avait sorti toutes les armes de son humour ravageur et de ses jeux de mots bien affûtés pour dénoncer le choix du Chef du Gouvernement portègne, assimilant Daniel Pastor à un berger allemand (pastor aleman), lui-même assimilé à un chien SS (voir mon article avec reproduction de la une de ce quotidien le 3 juin).
Daniel Pastor, jeune avocat brillant et bien propre sur lui, à qui on donnerait le Bon Dieu sans confession en voyant sa tête de premier de la classe (1), semble avoir rencontré de sérieuses difficultés après sa nomination puisqu’il aurait à plusieurs reprises dû reculer la date de sa prise de fonction, sous des prétextes variés, d’incompatibilité d’agenda et d’engagements antérieurs, jusqu’à finalement remettre, au début de ce mois ou à la fin août, sa démission au ministre de la justice portègne, Guillermo Montenegro, qui l’a acceptée le 4 septembre. L’information n’a toutefois été publiée au Bulletin officiel de la Ville que le 29 septembre (hier) et sans qu’il y soit fait écho sur le portail officiel de Buenos Aires, vitrine Internet du Gouvernement portègne.
Il semble qu’il y ait eu à la Legislatura des oppositions fortes à cette nomination (ça se comprend, dans une assemblée où le Gouvernement ne dispose pas de la majorité) et que pendant la période de non prise de fonction, pendant laquelle nul ne sait qui a dirigé de fait la Academia de Policia Metropolitana, Daniel Pastor ait tout de même participé à l’établissement des programmes d’enseignement et à la structuration des études.
Certains députés de la Legislatura sont bien déterminés à tirer l’affaire au clair et à passer le ministre à la question sur ce sujet. Il est en effet de première importance de savoir si les manuels qui serviront à former les futurs agents de la force publique de la Ville Autonome de Buenos Aires ont ou non des relents d’idéologie anti-démocratique.
Página/12 triomphe donc aujourd’hui et y va de son calembour habituel : un pastor que abandonó a su rebaño (un berger qui abandonne son troupeau).
Pour en savoir plus :
Lire l’article de Página/12 d’aujourd’hui (en espagnol)
Lire l’article de Barrio de Tango au moment de la désignation officielle tant controversée (en français).
(1) Ressemble un peu à Agnan adulte, ce garçon ! Un peu trop lisse, un peu trop brillant pour être vraiment franc du collier (sans allusion aucune à son nom de famille, qu’allez-vous imaginer là !). En plus, il a des lunettes, lui aussi. Comme ça, les copains peuvent pas lui taper dessus... Mais les journalistes de Página/12 ne faisant pas exactement partie de sa bande de copains, eux, ils ne se gênent pas pour lui régler son compte. N’oublions pas que le modèle du Petit Nicolas, dont l’adaptation au cinéma sort aujourd’hui en France, est sans doute à chercher dans les salles de classe et la cours de récréation du Lycée Français de Buenos Aires, où René Goscinny avait fait toute sa scolarité dans les années 30 qu’en Argentine on appelle la Decada Infame (c’est vous dire si ces 13 années de dictature et de gouvernements anti-constitutionnels ont laissé de bons souvenirs aux Argentins).