Portrait traditionnel du "Manchot de Lépante", comme on l'avait surnommé après une blessure de guerre reçue lors de cette fameuse bataille contre les Turcs (par Juan de Jauregui) |
Depuis
plusieurs mois, on savait que la découverte d'une sépulture
collective dans le bâti d'une église de trinitaires déchaussées
de Madrid pouvait être celle où avait été enseveli en 1616 le
corps de Miguel de Cervantes y Saavedra, le plus grand écrivain de langue
espagnole de tous les temps, le père de la littérature
hispanophone.
Hier,
l'équipe pluridisciplinaire qui effectuait les fouilles, ont
confirmé avec solennité l'identification des restes du grand
artiste. Si ce n'est une surprise pour personne, c'est une émotion
profonde pour tous les hispanisants, dont je fais partie.
Ce qu'il reste de son cercueil : la plaque avec ses deux initiales principales |
La
presse argentine et uruguayenne n'en fait toutefois pas ses gros
titres. On voit que les sud-américains se séparent peu à peu de
leur identité espagnole, même si les journaux ont à faire à une
grosse actualité, notamment en Argentine où chaque jour apporte de
la nouveauté sur le front de la campagne électorale comme celui de
l'enquête sur le suicide de Alberto Nisman (1).
Pourtant le personnage de Don Quichotte reste très important dans l'imaginaire de tous les hispanophones et inspire tant les Argentins que les Uruguayens. Dans Deux cents ans après, j'ai traduit la fantaisie qu'il avait inspiré à Horacio Ferrer (El Quijote del Arrabal).
Pour
aller plus loin :
lire
l'article de Clarín (à quoi s'ajoute un article sur Sancho Panza et
l'homme qui aurait inspiré le personnage à Cervantes, dont on ne
sait ce qu'il est devenu)
(1)
Je dis « suicide » parce que, malgré l'opposition féroce des représentants de la famille à cette explication, l'enquête s'achemine lentement et de manière continue vers cette conclusion alors que l'on découvre par ailleurs que le
procureur pourrait avoir eu des mœurs curieuses pour un juge
fédéral : une relation de plus en plus louche, peut-être
illégale, avec l'un de ses salariés, l'informaticien dont il a
emprunté l'arme qu'on a retrouvée dans sa main après sa mort, des
comptes bancaires à l'étranger sur des banques nord-américaines
engagées dans les démêlés de la dette argentine dont cet informaticien serait co-titulaire avec lui, le contrat de
travail de cet homme qui aurait pu servir à un détournement d'argent régulier depuis au moins plusieurs mois sinon plusieurs années et la
peur de son ex-épouse que la fouille des ordinateurs, téléphones
et autres tablettes électroniques du défunt magistrat dévoile sa vie privée (et comment peut-on mener une enquête criminelle sur une mort violente sans fouiller au plus intime la vie privée de la victime ?)... La vraie qualification du fait déclencheur de l'enquête présente est "mort suspecte".