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José de San Martín (1778-1850), futur
libérateur sud-américain, a commencé sa carrière militaire en
Espagne. En 1804, il est déjà capitaine en second et sert à Cadix,
la capitale de la province militaire de son affectation d’origine
(21 juillet 1789). C’est l’époque où l’Espagne, depuis la fin
des années 1780 (1), développe la riziculture, notamment sur la
côte méditerranéenne, autour de Valence (2). Cette nouveauté
agricole et le climat chaud de la région ont favorisé
l’acclimatation de nombreux moustiques dont le transmetteur de la
fièvre jaune et de 1804 à 1806 une sévère épidémie ravage toute
l’Andalousie et les zones voisines du nord. La première année,
Cadix en est l’un des principaux centres.
C’est
dans ces circonstances tragiques que San Martín se fit
remarquer dès 1804, à 26 ans, par le capitaine-général
d’Andalousie, le marquis de Solano. A cet âge, San Martín
est déjà acquis aux idées diffusées par la Révolution française,
qu’il a dû découvrir six ans plus tôt, à Toulon, lorsqu’il y
avait fait escale alors que le général Bonaparte y avait rassemblé sa flotte de
l’expédition d’Orient. Solano et lui partagent les mêmes idéaux
et la même formation francophone. Leur relation va dépasser les
rapports hiérarchiques. C’est sans doute Solano qui a fait entrer
San Martín dans sa première loge maçonnique (3), une pratique
nettement plus clandestine dans l’Espagne d’Ancien Régime
qu’elle ne l’avait été dans la France pré-révolutionnaire
puisque même certains membres de la famille royale étaient initiés.
Lorsque le 17 août 1850, San Martín mourut, dans son exil
volontaire à Boulogne-sur-Mer, en France, sa fille trouva dans le
portefeuille de son père un petit portrait de Solano. Il ne s’en
séparait jamais (4).
En
cette même année 1804, un autre libérateur sud-américain se
trouve en Espagne, empêché d’entrer à Cadix par les mesures
d’isolement dont le capitaine San Martín est l’un des
garants : Bernardo O’Higgins (1778-1842), celui avec lequel
San Martín fera toute sa campagne d’émancipation du Chili
puis celle du Pérou (1814-1822). O’Higgins rentre alors
d’Angleterre où son père, un Irlandais au service du roi
d’Espagne, l’a envoyé faire ses études. En attendant que la
ville lui soit ouverte et qu’il puisse s’embarquer pour son Chili
natal, le jeune homme tombe malade. Il s’est vu mourir aux portes
de Cadix avant de surmonter l’infection et de pouvoir accomplir son
destin politique.
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C’est
cette expérience de l’épidémie, si formatrice dans le parcours
du jeune San Martín, que je raconte dans ces deux pages de
San Martín, à rebours des conquistadors, unique biographie en
français de ce héros révolutionnaire, parue aux Éditions du Jasmin (5).
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(1)
C’est une évolution économique à laquelle Manuel Belgrano, qui
fait ses études en Espagne de 1786 à 1793, avait été très
sensible. En 1790, à tout juste 20 ans, il écrivait depuis Madrid à
son père pour lui souffler l’idée de tenter la culture du riz. Or
le bassin du Río de la Plata est très propice à cette activité,
avec son abondance en eau et en limons fertiles. Cf. Manuel Belgrano– L’inventeur de l’Argentine, paru en février dernier aux
Éditions du Jasmin. Aujourd’hui, les provinces de la Mésopotamie argentine
produisent bel et bien du riz sans que cette céréale n’ait encore
conquis une place à sa mesure dans la gastronomie nationale.
(2)
C’est l’époque où naît la paella valenciana, celle que les
Français trahissent en y ajoutant du chorizo, une spécialité de
l’intérieur des terres, inconnue alors sur ce qui devait devenir
la Costa Blanca.
(3)
L’obédience maçonnique de San Martín reste de nos jours un
grand mystère. Lui-même a scrupuleusement respecté le secret
absolu sur cet engagement, ses ayant-droits l’ont imité et les
loges elles-mêmes ont disparu au cours des années 1840-1850, avec
la mort de leurs derniers membres, les combattants de l’indépendance
sud-américaine. Ce que nous savons, c’est que la franc-maçonnerie était
philosophiquement et sans doute rituellement beaucoup plus variée
qu’aujourd’hui, une grande partie de ses aspirations ayant été
canalisées dans d’autres organisations à partir des
restaurations, après la chute de Napoléon en 1814-1815.
(4)
Solano était mort en 1808 des suites d’une émeute populaire qui
avait bien failli tuer San Martín lui aussi. Le jeune officier
n’avait pas pu sauver la vie de son chef, qui aura sans doute été
aussi son initiateur et son frère en loge.
(5)
Disponible en version papier (dans toutes les bonnes librairies dès
qu’elles pourront ouvrir) et en format e-book sur le site français
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