lundi 1 février 2010

Ici, le Beste Clet’che est de sortie : c’est Carnaval à Dunkerque [Coutumes]

A l’inverse des départements américains de Guyane et des Antilles, sur le territoire européen de la France, la signification authentique du Carnaval a quasiment disparu. C’est à peine si on s’y déguise encore à Mardi Gras. Et nombreux sont les faux carnavals, sans racine, qui surgissent ici et là, sortant de nulle part, pâles imitations qui du carnaval de Venise, qui du carnaval de Rio, l’un et l’autre revêtus d’un prestige bien supérieur à celui de traditions locales plus anciennes, non dénuées d’intérêt mais qui sont trop souvent tombées dans l’oubli.

Quelques villes néanmoins, surtout dans la partie septentrionale du pays, ont su conserver et soutenir une tradition propre, quitte à en faire parfois aussi un atout touristique...

L’année dernière, je vous avais parlé du Carnaval de Nice dans le sud de la France. Et pour la Belgique, je vous avais aussi cité celui de Binche, le plus célèbre des carnavals de la partie francophone de ce royaume fédéral et trilingue, qui aura lieu cette année les 14, 15 et 16 février, les derniers jours avant l’entrée en Carême (voir mon article de l'année dernière sur le Carnaval de Binche et celui de Montevideo, deux festivités pour le prix d'une seule).

Carnaval de Dunkerque sous la Restauration, dans la première moitié du 19ème siècle


Cette année, partons pour le carnaval de Dunkerque, dont le nom semble bien signifier église de la dune ou église dans les dunes, ville côtière des Flandres, une région à forte identité culturelle en France, à ne pas confondre avec la Flandre, l’une des entités fédérées du royaume susnommé.
Le carnaval de Dunkerque puisse ses thématiques dans les activités de port de pêche qui, avec l’artisanat du drap, constituèrent longtemps, jusqu’à la révolution industrielle, l’essentiel de la vie économique du littoral de la Mer du Nord : la pêche et le hareng, poisson emblématique de la zone, se retrouvent onc dans les noms des bandes, les costumes et les traditions de ce carnaval. Et malgré la crise endémique de la pêche depuis des décennies et la disparition traumatisante de l’industrie textile, partie très loin (Europe de l’Est, Afrique du Nord et Asie du Sud-Ouest), le Carnaval n’en est pas moins resté ce moment de l’année où chacun peut sortir son Beste Clet’che, son plus beau vêtement, son plus beau costume, comme on dit sur place, en flamand dunkerquois (1).

Cette année, le carnaval de Dunkerque a commencé le 23 janvier et se poursuivra jusqu’au 6 mars. Il dure donc un mois et demi, soit deux fois plus longtemps que celui de Buenos Aires. Il se prolonge en fait presque jusqu’à la mi-carême (qui tombera cette année le jeudi 11 mars).
12 bals sont prévus à raison d’un ou deux par week-end ainsi que 7 bandes ou défilés, le week-end aussi. Au programme sont encore inscrites deux sorties processionnelles des célèbres Géants du Nord.
Celui de Dunkerque s’appelle le Reuze (de Reuzen). Son costume fait penser à celui d’un légionnaire romain. Le Reuze provient sans doute d’une légende historique qui pourrait trouver ses racines dans cette espèce de guerre de razzias qui opposa pendant plusieurs décennies les habitants de la région, Francs passablement romanisés, et les Vikings, navigateurs scandinaves à la recherche de terres plus hospitalières un peu plus au sud.
En 2010, les géants de Dunkerque se promèneront sur deux parcours différents, les dimanches 18 et 25 février au matin.

Le carnaval de Dunkerque est aussi le rendez-vous des carnavaleux de la ville voisine de Boulogne-sur-Mer, la ville la plus importante sans doute en France en cette année de bicentenaire pour les passionnés de l’Argentine, puisque c’est là que mourut le Général José San Martín, que les Argentins surnomment el Padre de la Patría. C’était le 17 août 1850, le héros avait un peu plus de 72 ans.

La Grand-Place de Dunkerque un jour de Carnaval


A savoir sur Dunkerque :
Commençons par le commencement : où et comment danser le tango argentin à Dunkerque ? Question capitale pour un blog intitulé Barrio de Tango et consacré à cette culture-là, là-bas surtout c’est vrai mais un peu ici aussi : rapprochez-vous de l’association Tango del Mar, qui organise une pratique tous les jeudis, mais uniquement pour ses adhérents (malheureusement, la salle, exiguë, ne leur permet pas d’accueillir les praticiens de passage), des cours à deux niveaux (débutants et initiés) le mercredi. Ils ont mis sur leur site un lien direct avec la 2 x 4, la radio 100% tango de la ville de Buenos Aires (à laquelle vous pouvez aussi accéder directement depuis ce blog. Le lien se trouve dans la rubrique Ecouter de la Colonne de droite, en partie basse).

Et pour demain, jour de la Chandeleur, il faut savoir que les Flandres sont elles aussi un bon terroir à crêpes (et à gaufres) (2). Des desserts de saison que les Flamands aiment préparer à la bière, la boisson locale typique, qui rend la pâte très légère et presque croustillante...

Pour aller plus loin :
Voir la page du Carnaval de Dunkerque sur le site de la Ville
Voir le blog du Carnaval de Dunkerque
Voir le site de l’association des Amis du Reuze
Visiter le site de Tango del Mar (association dunkerquoise de tango argentin)
Accéder à la recette des crêpes flamandes (à la bière mais sans sucre ni sel) sur le site de la Cuisine de A à Z (3)
Accéder à la recette des crêpes flamandes sucrées (cassonade) de la Cuisine de A à Z (4)
Ecouter sur Canal Académie l’émission avec Sylvie Barnay sur les traditions françaises de la Chandeleur (10 minutes en téléchargement gratuit sous format Mp3)
Ecouter sur Canal Académie l’émission avec Sylvie Barnay sur Carnaval, Mardi Gras et Mercredi des Cendres (8 minutes en téléchargement gratuit sous format Mp3)
Visiter le site de la ville de Boulogne-sur-Mer, qui abrite le musée argentin Museo San Martín installé dans la maison où vécut le général pendant les deux dernières années de sa vie (ce bel hôtel particulier appartient à la République argentine et dépend donc de l’Ambassade).

(1) Comme l’italien d’aujourd’hui ou le grec de l’Antiquité, le flamand (ou néerlandais) se décline en de nombreuses variantes locales, dont chacune se reconnaît à des particularités de vocabulaire et de prononciation, depuis Calais, au nord de la France, jusqu’à la pointe nord des Pays-Bas.
(2) En France, la Bretagne passe pour être la région par excellence des crêpes.
Et il y a aussi plein d’associations de tango en Bretagne : Ty Tango à Vannes, Tango del Avel à Douarnenez, l’Atelier de Tango de la Maison d’Ergué Gabéric à Quimper, BraiseTango à Rennes, la Mersa del Oeste à Brest désormais sans milonga et sans locaux (souhaitons-leur de tout retrouver prochainement...). Sans oublier l’ACFA, Association Culturelle Franco-Argentine, établie à Ploërmel et dont vous trouverez le lien dans la rubrique Cambalache (casi ordenado), section Les centres d’information, dans la partie basse de la Colonne de droite.
(3) Ce que ne dit pas cette page Internet :
Pour faire la pâte :
Mélanger les oeufs et l’huile à la farine puis délayer progressivement en intégrant peu à peu lait et bière pour éviter la constitution de grumeaux.
Laisser reposer la pâte au moins une demi-heure.
Puis étalez-la par petites quantités successives à l’aide d’une louche à bec sur une poêle à crêpe chaude et préalablement huilée ou beurrée (à l’aide d’une demi-pomme de terre piquée au bout d’une fourchette. Très commode pour graisser une poêle sans risquer de se brûler).
(4) beaucoup plus détaillée, la recette !