Plusieurs militants politiques et sociaux avaient appelé à ce défilé : les dirigeants du Partido Obrero, organisateurs de la manifestation ouvrière qui a si mal tourné, Jorge Altamira et Marcelo Ramal, des dirigeants de la CTA (Centrale des Travailleurs Argentins, un syndicat alternatif anti-système), la présidente de Madres de Plaza de Mayo Linea Fundadora, Nora Cortiñas (1), le député portègne Pino Solanas (oui, le cinéaste, devenu homme politique à gauche toute !) et diverses autres personnalités.
La presse revient longuement aujourd’hui sur les faits, leurs origines, leurs causes et leurs conséquences, par des analyses passionnées et partisanes.
Photo La Nación
La manifestation des partis de gauche esquina Corrientes et Callao (à gauche de l’image, vous voyez l’enseigne du célèbre disquaire Zivals)
Hier en rapportant les faits (voir mon article du 21 octobre 2010), je n’ai pas illustré mon propos de photos. La Une de Página/12 exhibait le cadavre du jeune homme. Certes, c’est un réflexe culturel très argentin (et très hispanique en général) mais pour notre sensibilité européenne non espagnole, c’est plus choquant qu’autre chose et j’ai préféré m’en abstenir pour rendre hommage de ce côté-ci de l’Atlantique à ce garçon à notre manière de francophones. Aujourd’hui, Página/12 fait sa une avec la manifestation qui a parcouru les rues de Buenos Aires hier soir et à laquelle le blessé, Nelson Aguirre, touché à une jambe et à une fesse et brièvement hospitalisé pour recevoir les soins inhérents à ces blessures sans gravité excessive, était dans le cortège, en chaise roulante. Deux filles de l’autre victime, la femme de ménage uruguayenne Elsa Rodríguez, touchée à la tête, étaient elle aussi dans le cortège. Leur mère se trouve toujours entre la vie et la mort, en soins intensifs à l’hôpital Argerich, à Buenos Aires, où les médecins l’ont placée en coma artificiel.
Ci -dessous : les militants ouvriers le long de la voie de chemin de fer, après la mort de leur compagnon. Cela vous donne une idée de ce à quoi ressemblait le quartier de tango (barrio de tango) décrit par Homero Manzi dans Sur et dans Barrio de Tango : el terraplén dont il y est question, c’est ça, cette levée de terre au-dessus de laquelle circulait un train, qui, lui, a maintenant disparu. Vous voyez : le tango ne parle pas d’une ville imaginaire ou désincarnée !
Avec le temps, on en sait un peu plus sur cette femme humble, arrivée en Argentine sans savoir lire ni écrire, qui vit à Berazategui, une ville de la banlieue sud dans le Gran Buenos Aires, d’où elle va trois fois par semaine faire des ménages dans la capitale pour un salaire de 10 $ de l’heure ($ = peso argentin). Clarín lui consacre un article entier, avec un ton certes un peu misérabiliste (il faut bien que la rédaction montre une fois de plus son hostilité au Gouvernement en place) mais qu’il est bon de lire. Ne serait-ce que pour se faire sa propre idée.
Pour aller plus loin :
Lire l’article de Página/12 sur l’accord de réintégration des travailleurs externalisés de Ferrocarril Roca au sein de leur entreprise d’origine signé au Secrétariat d’Etat au Travail (gouvernement fédéréal).
Lire l’article principal de La Nación (opposition de droite libérale)
(1) En l’occurrence, l’autre association, Madres de Plaza de Mayo, fortement péroniste (or le Gouvernement est attaqué dans cette histoire), a pris position à travers un communiqué de presse de l’Université Populaire Madres de Plaza de Mayo que j’ai trouvé hier dans ma boîte mail en rentrant de mon travail.