L’événement était d’importance et il était fort attendu. Il était annoncé depuis le début du mois, ce qui est une anticipation considérable dans une ville aussi merveilleusement douée pour l’improvisation que Buenos Aires.
Pour fêter les 50 ans de la fondation du Quinteto Real, de Horacio Salgán et Ubaldo de Lío, Horacio Salgán et Leopoldo Federico devaient remonter ensemble sur scène au Centro Cultural Torcuato Tasso, à San Telmo, vendredi et samedi derniers. Et ils l’ont fait. Et ils doivent recommencer le week-end prochain et le suivant.
Photo Hernán Zenteno
La Nación avait annoncé ce grand rendez-vous des tangueros par un grand article paru le 9 octobre dernier où Mauro Apicella repassait la carrière de ces deux monstres sacrés en agrémentant son texte de quelques citations extraites d’une interview conjointe.
Clarín et Página/12 ont publié chacun leur article dans leur édition de vendredi (voir mon article du 16 octobre 2010 sur l’interview croisée des deux hommes dans Pagína/12), l’article digital de Clarín étant comme si souvent moins fouillé et moins nourri que celui de son concurrent pro-gouvernemental (c’est comme ça, j’observe).
Et La Nación est revenue sur les deux concerts, dans un article paru hier et à nouveau signé Mauro Apicella, un article qui raconte avec admiration et tendresse le rendez-vous de vendredi soir. A lire et à déguster à petites gorgées par tous les amoureux de leur musique, qui n’ont pas la chance de pouvoir aller les écouter là-bas, rue Defensa au numéro 1575… (Faites-vous aider par Reverso, le site de traduction en ligne dont vous avez le lien dans la rubrique Cambalache casi ordenado, dans la partie basse de la Colonne de droite. Un régal).
Et ce matin, à nouveau sous la plume de Karina Micheletto, Página/12 revient elle aussi sur ce retour en scène des deux troesmas, après un premier événement qui s’était produit cet automne, pendant les fêtes du Bicentenaire, au pied de l’Obélisque (voir mon article du 25 mai 2010 sur l’événement)… Extraits :
La celebración de los cincuenta años del Quinteto Real fue la excusa para que el pianista y el bandoneonista compartieran por un rato el escenario. “Shusheta”, “La llamó silbando” y el clásico “A fuego lento” marcaron un momento inolvidable para los amantes del tango.
Se habló de “momento histórico”, y la frase, que suele quedar grande, pretenciosa, soltada gratuitamente en tantas ocasiones, se ajustó esta vez a la realidad. Una pequeña multitud –tantas almas como lo permitió la capacidad del lugar– se reunió el viernes pasado para presenciar lo que iba a ser un acontecimiento, aquello que había corrido de boca en boca entre los amantes del tango: Horacio Salgán y Leopoldo Federico volvían a tocar juntos. Se reunían para celebrar los cincuenta años del Quinteto Real, otro hito del orden de lo extraordinario, por la dificultad de la continuidad en el género, por las características que Salgán imprimió a su conjunto, tan exquisitas como poco convocantes en un principio. Fue en el Centro Cultural Torquato Tasso, el local de San Telmo que suele ser escenario de las incursiones de Federico y del Quinteto Real. El fanatismo de los presentes, entre gritos, aplausos cerrados, entusiastas pedidos de bises y halagos tangueros al final, terminó de delinear lo que efectivamente quedará en el recuerdo como un momento histórico. La fiesta se repitió el sábado, y habrá más los próximos dos viernes y sábados de octubre. […]
Karina Micheletto, Página/12
La célébration des cinquante ans du Quinteto Real fut l’excuse qu’ont trouvée le pianiste et le bandonéoniste pour partager un moment sur scène. Shusheta (1), La llamó silbando (il l’a appelée en sifflant) et le classique A fuego lento (à feu dou) (2) ont marqué un moment inoubliable pour les amateurs de tango.
On a parlé de moment historique et la phrase, qui d’ordinaire est grandiloquente, prétentieuse, lâchée gratuitement à tant et tant d’occasions, était bien adaptée à la réalité cette fois. Une petite foule -autant d’âmes que le permettait la capacité de la salle- s’est réunie vendredi dernier pour assister à ce qui allait être un événement, celui qui avait couru de bouche à oreille parmi les amateurs de tango : Horacio Salgán et Leopoldo Federico jouaient à nouveau ensemble. Ils se réunissaient pour fêter les cinquante ans du Quinteto Real, autre morceau de choix dans l’ordre de l’extraordinaire, à cause de la difficile continuité dans le genre, à cause des caractéristiques que Salgán avait imprimées à son ensemble, aussi exquises que peu appréciées au début. Cela s’est passé au Centro Cultural Torcuato Tasso, l’endroit de San Telmo qui est le décor habituel des incursions de Leopoldo Federico et du Quinteto Real. Le fanatisme des personnes présentes, entre les cris, les applaudissements à tout rompre, les demandes enthousiastes de bis et les compliments tangueros de la fin, a fini par dessiner ce qui restera effectivement dans notre mémoire comme un moment historique. La fête a recommencé samedi et il y en aura encore les deux prochains vendredis et samedis d’octobre. […]
(Traduction Denise Anne Clavilier)
Pour aller plus loin :
Lire l’article de La Nación du 9 octobre 2010Lire l’article de Clarín du 15 octobre 2010
Lire l’article de La Nación du 17 octobre 2010
Lire l’article de Página/12 du 18 octobre 2010
(1) Shusheta est un tango de Juan Carlos Cobián pour la musique (qui date des années 20) et Enrique Cadícamo pour le texte (qui date du début des années 40) et qui fait partie du corpus de tangos, valses, candombes et milongas que j’ai rassemblés dans le texte original et traduits en français dans Barrio de Tango, publié aux Editions du Jasmin (mai 2010, France). Il se situe à la page 72.
(2) La llamó silbando et A fuego lento sont deux tangos composés par Horacio Salgán. A fuego lento est considéré, à tort ou à raison, comme son œuvre la plus emblématique. C’est en tout cas la plus connue et la plus facilement identifiée avec son auteur dans le monde entier.