La esquina Centenera y Tabaré (pour le mot esquina, voir Trousse lexicale dans la partie médiane de la Colonne de droite) est un carrefour du quartier de Nueva Pompeya. C’est le poète Homero Manzi qui l’a rendu célèbre en la citant précisément dans un tango intitulé Manoblanca, et qui reproduit le discours qu’un cuarteador (ce qu'on pourrait traduire par désembourbeur) tient à une paire de chevaux de trait, Manoblanca et Porteñito : une scène de désembourbement d’une carriole vue mille fois dans les chemins de terre de ce coin, après la pluie (et Dieu s’il peut pleuvoir à Buenos Aires, du début du printemps jusqu’à la fin de l’automne), un croquis comme pris sur le vif de la vie quotidienne dans ce sud de la ville de Buenos Aires, en fait un souvenir raconté à 20 ans d’écart, alors même que ces scènes se faisaient de plus en plus rares à Nueva Pompeya avec les progrès techniques de l’urbanisation (dallage des trottoirs, asphaltage des chaussées, travaux hydrauliques de drainage…).
Dans Manoblanca, le cuarteador a rendez-vous avec sa bonne amie dans cette esquina ce soir-là et il presse les chevaux pour ne pas arriver en retard.
La esquina Centenera y Tabaré est aussi un coin de la ville que décrivent d’autres tangos du même Homero Manzi, Barrio de Tango, Sur, Mi taza de café (1), et qu’un autre poète, Cátulo Castillo, lui aussi pensionnaire à la même époque que Manzi dans le même collège Luppi, établi à cette adresse, fait revivre dans d’autres tangos, comme Tinta Roja (Encre rouge), sous des formes littéraires qui semblent parfois mystérieuses et difficiles à comprendre mais qui cessent de l’être dès qu’on peut se figurer ce quartier et ce qu’il fut pour les deux jeunes garçons de leurs 12 à leurs 17 ans.
Si uno quiere encontrar datos para adentrarse en la vida cotidiana de la ciudad y su gente, la poesía del tango siempre es referencia ineludible. Y vale tanto para antes como para ahora. Por eso, si se trata de conocer cómo era el barrio de Nueva Pompeya y qué se mantiene aún en esa zona del sur porteño, hay que recurrir a la obra de Homero Manzi, un santiagueño nacido en Añatuya pero que supo reflejar y querer a Buenos Aires como pocos.
Eduardo Parise, Clarín, 18 octobre 2010
Si on veut trouver des faits pour pénétrer la vie quotidienne de la vie et de ses habitants, la poésie du tango est toujours une référence incontournable. Et elle est valable pour hier autant que pour aujourd’hui. Ainsi donc, s’il s’agit de savoir comment était le quartier de Nueva Pompeya et ce qu’il en reste encore dans cette zone du sud portègne, il faut recourir à l’œuvre de Homero Manzi, un homme né dans la province de Santiago del Estero, à Añatuya, mais qui sut refléter et aimer Buenos Aires comme peu de poètes.
(Traduction Denise Anne Clavilier) (2)
Le reste de l’article de Clarín raconte l’histoire de la relation entre Manzi adolescent et ce quartier, dans des termes, une langue et sous une forme tous différents de ce que j’ai moi-même tâché de faire en français à la page 240 de mon bouquin mais pour un contenu très similaire, pour ne pas dire identique.
Alors si ça vous dit d’aller lire ça dans le texte, avec la saveur d’origine, n’hésitez pas à vous connecter à cette page de Clarín dans l’édition digitale d’aujourd’hui, 18 octobre 2010.
(1) Ces trois tangos figurent dans le corpus traduit dans mon livre, Barrio de Tango, paru en mai 2010 aux Editions du Jasmin. Ils se trouvent respectivement aux pages 48, 234 et 99. Je n'ai pas intégré Manoblanca... On ne peut pas tout intégrer dans un seul volume qui soit à peu près commode à consulter et à lire, y compris hors de chez soi.
(2) J’ai rarement trouvé dans les colonnes d’un quotidien argentin une aussi sûre formule de la constatation quasi ethnographique qui me poussa moi-même à écrire cette anthologie hors norme dont la structure originale fut si difficile à imposer à une maison d’édition (ou plus exactement qui rendit si difficile la rencontre avec une maison d’édition qui veuille bien l’accepter et la respecter comme telle).