mercredi 3 octobre 2012

Mauvaises manières sans frontières [Actu]


Il n'y a pas que Berlusconi et Sarkozy pour s'exprimer comme des charretiers dans la vie politique... La droite argentine use, elle aussi, d'un vocabulaire pour le moins scabreux lorsqu'elle parle de la Présidente en exercice, dont vous savez déjà qu'elle ne se ralliera jamais à ses robes noires... Il faut néanmoins ajouter que ces noms d'oiseaux orduriers n'ont jamais été employés en public, devant une batterie de micros et de caméras comme le faisaient nos anciens dirigeants, mais plutôt dans des cercles restreints, dans l'entre-soi droitier de certains beaux quartiers... Manque de bol, l'insulte a un jour été proférée sur une fréquence de radio qui a interféré avec celle de l'hélicoptère présidentiel, dans des échanges qui semblaient bel et bien relever d'un complot contre la vie de la Chef d'Etat... L'insulte hante depuis la gauche kichneriste et c'est avec cette injure et avec l'actuelle atonie de la droite (1) que le duo Rudy et Paz s'amusait hier dans la vignette de une de Página/12... Ce qui donne ce dialogue imaginaire entre un journaliste faussement objectif (2) et l'habituelle caricature de l'oligarque estanciero à gros sourcils et grosse moustache qui symbolise la droite gorila (anti-péroniste).


Le journaliste : Pourriez-vous résumer le programme de l'opposition en une ou deux idées ?
Le Gorila (3) : Des idées ? Hummm !
Le journaliste : "Case-toi, pauv' con !" ne compte pas. (4)
Le Gorila : Flûte alors !
(Traduction Denise Anne Clavilier)

C'est juste un tout petit peu too much, mais c'est très drôle. Plus humoristique en tout cas, alors que la posture idéologique est la même, que le dessin sur les incongruités du Front National en France (voir mon article du 28 septembre 2012 sur la réaction du duo aux propositions laïcardes de Marine Le Pen).

(1) La droite a été si écrasée aux élections d'il y a un an qu'elle n'a plus d'idées un tant soit peu consistantes et manque considérablement de punch. Même l'idée quelque peu saugrenue d'accorder le droit de vote aux mineurs à partir de 16 ans ne la fait pas sortir du bois avec des arguments recevables.
(2) Les journalistes politiques ne sont pas objectifs en Argentine. Ce sont tous des militants, d'un bord ou d'un autre mais des militants, que ce soit dans les journaux, à la télévision ou à la radio, et chaque support a sa ligne politique où vous n'accédez jamais directement à la pensée opposée. La distance qui sépare en Europe le journaliste du politique, qui est son objet d'observation, le journaliste argentin ne la connaît pas. C'est vrai aussi, et comment, de Rudy et Daniel Paz et de tous les autres dessinateurs de presse.
(3) Gorila est un terme, peu amène, inventé à la fin des années 1940 par les péronistes (Página/12 est péroniste) pour désigner les anti-péronistes et ça reste dans le vocabulaire politique pour désigner la droite anti-sociale.
(4) La vraie citation de Rudy n'est pas celle-là mais l'expression qu'il emploie sonne de la même manière à une oreille argentine aux Francophones (du monde entier) cette saillie sarkozienne... L'opposant dit littéralement : "Va-t-en, jument !" Ce qui est l'une des pires insultes qu'on puisse adresser à une femme. C'est encore pire que le français "chienne". C'est cette insulte de yegua qui a été captée sur la radio de l'hélico présidentiel il y a quelques années et que les kichneristes ont gardée en travers du gosier.