Le
bilan des décès semble désormais effectivement
fixé au chiffre de 51 morts mais les sinistrés sont 350
000. 350 000 personnes pour lesquelles hier deux grands du rock
nacional se sont mobilisés pour animer deux méga-concerts
destinés à collecter des fonds, des vivres et des
articles de première nécessité avec une pléiade
de musiciens argentins : León Gieco était à
Avellaneda, dans la banlieue sud de Buenos Aires, et Fito Páez
à Palermo, au Planetarium.
Des
milliers de personnes, dans une grande variété
d'appartenances philosophique, idéologique et métaphysique,
se sont déplacées pour apporter des vêtements,
des vivres, des matelas, des sommiers, des médicaments pour
les collectes de solidarité. Página/12, le chantre de
l'anticléricalisme argentin (et vous savez maintenant que ce
courant est déterminé) souligne la présence de
nombreux uniformes de scouts dans cette fourmilière
industrieuse et énergique.
Les
gens ont parfois apporté des objets en mauvais état, de
la vaisselle abîmée, des chaises bancales, mais tout a
été accepté, car tout cela est mieux que rien
pour ceux qui ont tout perdu dans la violence de l'inondation.
Le
quotidien raconte comment les cris habituels avaient changé de
sens au cours de cette grande nuit de solidarité : ainsi ce
garçonnet qui crie "Comida. Comida" (à manger, à
manger) non pas pour proposer, comme c'est si souvent le cas dans les
rues de Buenos à l'approche de l'heure du déjeuner, des
empanadas qu'il vend à l'unité en les tirant d'une
boîte en plastique où sa mère les a rangées
en les sortant du four vingt minutes avant, mais pour signaler qu'il tenait un point de collecte des
vivres...
Les
biens ainsi collectés étaient immédiatement
entreposés dans les camions qui partaient les uns après
les autres vers La Plata (à 80 km plus au sud) au fur et à
mesure qu'ils étaient pleins, sous les applaudissements des
bénévoles.
La
Présidente Cristina de Kirchner a aussi fait une nouvelle visite sur place, dans la
capitale provinciale, pour faire le points avec différentes
organisations bénévoles d'aide, de soutien et de
collecte, dont une école, la Faculté de Journalisme de
l'Université de La Plata, une des plus connues du pays (je
suppose que l'étudiant qui m'a contactée il y a
quelques jours pour un article sur Alorsa s'y active de tout son cœur
et je le salue très cordialement) et, par surprise, elle s'est
aussi rendu à l'église San José (Saint-Joseph)
qui est devenu le quartier général de Cáritas Argentina
à La Plata. Elle a donc tenu à rendre visible la
diversité du pays à l'occasion de ce déploiement
de solidarité. Comme quoi, à quelque chose malheur est
bon : il est assez exceptionnel en Argentine que tous les courants du
pays se voient ainsi reconnus et honorés à part égale.
Du coup, Página/12 a recueilli les commentaires du responsable
local de Cáritas, Eduardo Martínez (il les a peut-être
choisis mais je ne pense pas qu'il les ait trahis) :
“Esto
que estamos viendo es la consecuencia de que ella haya estado aquí”,
señaló Martínez, al referirse a la llegada de
seis camiones con colchones, frazadas y alimentos y agregó:
“Habló con la gente, vio lo que se estaba haciendo y nos
preguntó qué necesitábamos. Esto es un claro
ejemplo de que estamos trabajando en conjunto”.
"Tout
ce qu'on voit là, c'est le résultat de sa visite ici
[au lendemain de la catastrophe], dit Martínez à propos
de l'arrivée de six camions avec des matelas, des couettes,
des vivres" et il a ajouté : "elle a parlé
avec les gens, elle a vu ce qui se faisait et elle nous a demandé
de quoi nous avions besoin. Voilà un exemple incontestable
qu'on est en train de travailler ensemble".
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
C'est
une des premières fois, sinon la première, que je
constate qu'on parle d'elle, dans un secteur social qui n'est pas le
camp kirchneriste, comme on parlerait ici en Europe d'un chef d'Etat
issu d'une longue tradition démocratique et qui, dans un cas
comme celui-là, abandonne spontanément et immédiatement
les petits clivages politiciens...
C'est
d'autant plus remarquable qu'on est en période électorale
et que la Présidente est allée aussi rendre visite aux
équipes de la Campora, qui sont elles indubitablement "son"
camp.
En
savoir plus :
lire
l'article de Página/12 sur les concerts de collecte
lire
l'article de Página/12 sur la nouvelle visite de la Présidente
sur la zone sinistrée.