lundi 8 avril 2013

Les Argentins se mobilisent autour des sinistrés [Actu]


Le bilan des décès semble désormais effectivement fixé au chiffre de 51 morts mais les sinistrés sont 350 000. 350 000 personnes pour lesquelles hier deux grands du rock nacional se sont mobilisés pour animer deux méga-concerts destinés à collecter des fonds, des vivres et des articles de première nécessité avec une pléiade de musiciens argentins : León Gieco était à Avellaneda, dans la banlieue sud de Buenos Aires, et Fito Páez à Palermo, au Planetarium.

Des milliers de personnes, dans une grande variété d'appartenances philosophique, idéologique et métaphysique, se sont déplacées pour apporter des vêtements, des vivres, des matelas, des sommiers, des médicaments pour les collectes de solidarité. Página/12, le chantre de l'anticléricalisme argentin (et vous savez maintenant que ce courant est déterminé) souligne la présence de nombreux uniformes de scouts dans cette fourmilière industrieuse et énergique.

Les gens ont parfois apporté des objets en mauvais état, de la vaisselle abîmée, des chaises bancales, mais tout a été accepté, car tout cela est mieux que rien pour ceux qui ont tout perdu dans la violence de l'inondation.

Le quotidien raconte comment les cris habituels avaient changé de sens au cours de cette grande nuit de solidarité : ainsi ce garçonnet qui crie "Comida. Comida" (à manger, à manger) non pas pour proposer, comme c'est si souvent le cas dans les rues de Buenos à l'approche de l'heure du déjeuner, des empanadas qu'il vend à l'unité en les tirant d'une boîte en plastique où sa mère les a rangées en les sortant du four vingt minutes avant, mais pour signaler qu'il tenait un point de collecte des vivres...

Les biens ainsi collectés étaient immédiatement entreposés dans les camions qui partaient les uns après les autres vers La Plata (à 80 km plus au sud) au fur et à mesure qu'ils étaient pleins, sous les applaudissements des bénévoles.

La Présidente Cristina de Kirchner a aussi fait une nouvelle visite sur place, dans la capitale provinciale, pour faire le points avec différentes organisations bénévoles d'aide, de soutien et de collecte, dont une école, la Faculté de Journalisme de l'Université de La Plata, une des plus connues du pays (je suppose que l'étudiant qui m'a contactée il y a quelques jours pour un article sur Alorsa s'y active de tout son cœur et je le salue très cordialement) et, par surprise, elle s'est aussi rendu à l'église San José (Saint-Joseph) qui est devenu le quartier général de Cáritas Argentina à La Plata. Elle a donc tenu à rendre visible la diversité du pays à l'occasion de ce déploiement de solidarité. Comme quoi, à quelque chose malheur est bon : il est assez exceptionnel en Argentine que tous les courants du pays se voient ainsi reconnus et honorés à part égale. Du coup, Página/12 a recueilli les commentaires du responsable local de Cáritas, Eduardo Martínez (il les a peut-être choisis mais je ne pense pas qu'il les ait trahis) :

Esto que estamos viendo es la consecuencia de que ella haya estado aquí”, señaló Martínez, al referirse a la llegada de seis camiones con colchones, frazadas y alimentos y agregó: “Habló con la gente, vio lo que se estaba haciendo y nos preguntó qué necesitábamos. Esto es un claro ejemplo de que estamos trabajando en conjunto”.

"Tout ce qu'on voit là, c'est le résultat de sa visite ici [au lendemain de la catastrophe], dit Martínez à propos de l'arrivée de six camions avec des matelas, des couettes, des vivres" et il a ajouté : "elle a parlé avec les gens, elle a vu ce qui se faisait et elle nous a demandé de quoi nous avions besoin. Voilà un exemple incontestable qu'on est en train de travailler ensemble".
(Traduction Denise Anne Clavilier)

C'est une des premières fois, sinon la première, que je constate qu'on parle d'elle, dans un secteur social qui n'est pas le camp kirchneriste, comme on parlerait ici en Europe d'un chef d'Etat issu d'une longue tradition démocratique et qui, dans un cas comme celui-là, abandonne spontanément et immédiatement les petits clivages politiciens...

C'est d'autant plus remarquable qu'on est en période électorale et que la Présidente est allée aussi rendre visite aux équipes de la Campora, qui sont elles indubitablement "son" camp.

En savoir plus :
lire l'article de Página/12 sur les concerts de collecte
lire l'article de Página/12 sur la nouvelle visite de la Présidente sur la zone sinistrée.