"Venise sans toi" (sous entendu Macri)
Hier,
des pluies torrentielles, les plus importantes depuis un siècle
en cette saison, sont tombées sur Buenos Aires en ce mois
d'avril ordinairement assez humide (1). Elles ont provoqué
des débordements des cours d'eau deltaïques enfouis sous
la ville pendant l'urbanisation galopante des cinquante premières
années du XXe siècle, notamment les arroyos
Medrano et Vega, qui sont parmi les plus capricieux du réseau
fluvial qui alimente le Río de la Plata. Les services
météorologiques avaient bien annoncé un jour
pluvieux mais prévoyaient des précipitations fréquentes
et faibles.
Depuis
l'arrivée au Gouvernement de la Ville de Mauricio Macri, les
travaux d'urbanisation permanents (en tant que chef d'entreprise,
Macri est lui-même un important acteur de travaux publics) et
le manque de budget consacré à l'entretien des
infrastructures y compris hydrauliques provoquent régulièrement
des catastrophes de ce genre.
Cette
fois-ci, c'est tout le nord de Buenos Aires et une bonne partie de
l'ouest de la ville qui sont sinistrés, donc en bonne partie
les zones résidentielles et chics où vivent les
électeurs partisans de la politique menée par Mauricio
Macri (Palermo, Recoleta, Belgrano, Nuñez...). Mais le sud de la ville a lui aussi été
touché, comme Villa Lugano et Mataderos, quartiers des plus populaires. Les inondations ont fait six morts à Buenos
Aires, dont un électricien du métro dans la station Los
Incas, du côté de Villa Urquiza, et deux morts dans la
petite couronne. En tout, onze quartiers (sur 48) sont affectées et plusieurs communes dans la banlieue nord-ouest. Près d'un demi-million de personnes sont touchés dans leurs biens et une bonne partie d'entre eux a dû être évacuée vers des zones encore sèches mais on prévoit que la pluie continue jusqu'à vendredi. Les transports publics sont très perturbés.
Le métro a cessé de circuler sur plusieurs lignes. Le
trafic aérien intérieur a même été
interrompu, l'aéroport domestique (Aeroparque Jorge Newbery)
se trouvant en zone inondable et inondée, entre Palermo et le fleuve. Les photos que j'ai vues dans la presse depuis hier soir
sont spectaculaires : je connais quelque peu certaines zones
affectées et elles sont méconnaissables...
Mauricio
Macri est rentré précipitamment de ses vacances, cette
fois-ci c'était au Brésil (il est souvent en vadrouille et prend en
général ses vacances à l'étranger,
notamment en Europe, une destination hors de prix pour les
Argentins). Il a parlé de "catastrophe naturelle" (ben voyons !)
et s'est défaussé une nouvelle fois sur le gouvernement national, déclarant en substance que l'inondation était due à
l'absence d'autorisation de travaux dans les bassins de rétention du Medramo et du
Vega. Il est à craindre que s'il avait eu ces autorisations,
les travaux n'auraient de toute manière pas été faits puisque c'est ainsi qu'il procède depuis son entrée en fonction en décembre 2007. Par ailleurs, le bétonnage
galopant de certains espaces verts qui étaient autant de zones
capables d'absorber en partie les précipitations saisonnières
ne sont pas le fait du Gouvernement national mais bien des choix politiques de sa part, dont il n'assume jamais les conséquences
désastreuses lorsqu'elles adviennent.
A La Plata, on déplore vingt-cinq morts. De mémoire d'hommes, on n'avait jamais vu cela.
Les ONG locales s'organisent pour lever des fonds et venir en aide aux sinistrés.
Pour
aller plus loin :
sur
un ton très hostile à Macri
lire
l'éditorial sur les causes du désastre dans Página/12
lire
l'article sur les déclarations de Macri, dans Página/12
sur
un ton moins hostile mais néanmoins critique
lire
l'article de Clarín sur le retour précipité de
Macri, dont Clarín ne craint pas de dire qu'il ne l'a pas décidé
spontanément mais sur le conseil d'un de ses ministres (la
remarque n'est pas tendre et elle peut être désastreuse si les Portègnes savent la lire à
la lumière de la responsabilité politique en démocratie
et elle est en pleine contradiction avec les déclarations
faites par le Chef du Gouvernement à son retour en conférence
de presse pleine de rodomontades).
L'humour
ne perdant jamais ou presque jamais ses droits à Buenos Aires,
qui en a vu d'autres, les deux dessins de Página/12 traitent
du sujet ce matin.
Miguel
Rep décline la version "Tout ça, c'est la faute au
gouvernement" avec ce clin d'œil biblique
Bizarre,
cet ordre divin !
J'en
ai assez de tous ces gouvernants qui ne prévoient jamais rien,
moi je te le dis...
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
Paz
et Rudy ont choisi un dialogue plus traditionnel entre têtes de
turc habituelles.
Le
fonctionnaire de Buenos Aires : Le TC 2000 (2) a gâché
la tranquillité de beaucoup de gens à Recoleta, dans
Barrio Norte et à Palermo.
Mauricio
Macri : Tu vois ? Après ils vont encore dire que je n'embête
que les pauvres.
(Traduction
Denise Anne Clavilier)
(1) Le choix de ce jour pour publier une nouvelle polémique artificielle autour du soi-disant passé du Pape n'en est que plus étrange. Franchement, les Portègnes ont autre chose à faire aujourd'hui que de disserter sur le sexe des anges ou des rumeurs sans preuve.
(2)
Course automobile traditionnelle qui s'est déroulée
cette année dans les rues de Recoleta pendant la Semaine
Sainte et a fait semble-t-il des gros dégâts dans l'environnement très verdoyant du quartier.