mardi 2 avril 2013

Página/12 n'en finit pas de surprendre [Actu]


Le menu du petit-déjeuner semble avoir définitivement changé à la rédaction de  : on n'y bouffe plus du curé à longueur d'année... Voilà qu'en ce mardi de Pâques, le quotidien publie un reportage très respectueux et sans obséquiosité sur le pèlerinage que le Pape a fait hier sur la tombe de saint Pierre, dans la crypte de la Basilique homonyme. Le journal en profite même pour citer quelques uns des passages les plus spirituels du message du lundi de Pâques, dont il est tout surpris qu'il soit férié en Italie et au Vatican (il ne l'est pas en Argentine). Sans nom particulier pour cette fête inconnue, Página/12 traduit le terme italien : Lundi de l'Ange (Lunedì dell'Angelo) (à cause des lectures du jour qui racontent la visite de l'ange à Marie de Magdala près de la tombe vide).

Je vous présente l'intégralité de cet article, simplement intitulé Visite de François avec ce seul commentaire, "Le Pape est allé dans la nécropole". Article court et très dense en informations de valeur.

François et le cardinal Comastri, sur le site archéologique
photo Osservatore Romano

El papa Francisco se convirtió en el primer pontífice en descender a las catacumbas de la Necrópolis vaticana, donde se acercó a la antigua tumba de San Pedro y se detuvo a rezar (foto). “El Santo Padre realizó hoy (por ayer) por la tarde una visita de devoción a la tumba de San Pedro en la Necrópolis que se encuentra bajo la Basílica vaticana”, informó un comunicado. La nota señaló que en la capilla Clementina, el lugar más cercano a la tumba del príncipe de los apóstoles, el pontífice “se detuvo en plegaria silenciosa, en recogimiento profundo y conmovido”.
Jorge Bergoglio decidió visitar la antigua necrópolis enterrada por Constantino para hacer construir la primitiva basílica de San Pedro, y fue sacada a la luz en las excavaciones autorizadas en 1939 por Pío XII. Así quedaron expuestos el altar mayor y 22 tumbas, pero todavía hay una parte enterrada e inexplorada.

Le Pape François est devenu le premier pontife à descendre dans les catacombes de la Nécropole vaticane, où il s'est rendu sur l'antique tombe de Saint Pierre et s'est arrêté pour prier (photo). (1) "Le Saint Père a fait aujourd'hui (c'est-à-dire hier) dans l'après-midi une visite spirituelle sur la tombe de Saint Pierre dans la Nécropole qui se trouve sous la Basilique vaticane", a indiqué un communiqué. L'article signale que, dans la chapelle Clémentine, le lieu le plus proche de la tombe du premier des apôtres, le pontife "s'est arrêté pour une prière silencieuse et un recueillement profond et ému".
Jorge Bergoglio (2) a décidé de visiter l'antique nécropole enfouie sous terre par Constantin pour faire construire la basilique Saint-Pierre primitive et mise au jour pendant les excavations autorisées en 1939 par Pie XII. C'est de cette manière qu'ont été exposés l'autel majeur et 22 tombes mais il y a encore une partie enfouie et inexplorée.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Por la mañana, el Papa dijo que el misterio de las Pascuas puede “operar profundamente en nosotros y en éste, nuestro tiempo, para que el odio deje el lugar al amor, la mentira a la verdad, la venganza al perdón, la tristeza a la alegría”. Decenas de miles de fieles, en particular de Sudamérica, se habían congregado en la Plaza San Pedro, en el día posterior a la multitudinaria asistencia a la misa pascual, para asistir a la oración dedicada a la Virgen. Francisco exhortó a que “la fuerza de la Resurrección de Cristo pueda alcanzar a cada persona, especialmente a quien sufre, y a todas las situaciones más necesitadas de confianza y esperanza”.

Dans la matinée, le Pape avait dit que le mystère de la Pâque peut "opérer profondément en nous et en ce temps qui est le nôtre, pour que la haine cède la place à l'amour, le mensonge à la vérité, la vengeance au pardon, la tristesse à la joie" (3). Au lendemain de la messe pascale à laquelle ont participé une multitude de gens, des dizaines de milliers de fidèles, en particulier d'Amérique du Sud, s'étaient rassemblés sur la place Saint-Pierre pour assister à la prière dédiée à la Vierge (4). François a exhorté [la foule] pour que "la force de la Résurrection du Christ puisse atteindre chaque personne, spécialement celui qui souffre, et toutes les situations où l'on a le plus besoin de confiance et d'espérance".
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Para el pontífice, “el bautismo que nos hace hijo de Dios, la eucaristía que nos une a Cristo, deben convertirse en vida, traducirse en posturas, comportamientos, gestos, decisiones”. “Pero todo pasa a través del corazón humano, si me dejo alcanzar por la gracia de Cristo resucitado, si le permito cambiarme en ese aspecto mío que no es bueno, que puede hacer mal a mí y a los otros, permito a la victoria de Cristo afirmarse en mi vida, prolongar su acción benéfica”, sostuvo.
Al finalizar, el Papa saludó a los fieles desde la ventana del estudio pontificio. En su italiano particular y con un tono calmo dijo: “Buena Pascua y buen almuerzo en familia”. En Italia ayer fue día no laborable por la llamada “Pasquetta”, la jornada siguiente al domingo de Pascua.

Pour le pontife, "le baptême qui nous rend enfant de Dieu, l'eucharistie qui nous unit au Christ doivent se transformer en vie, se traduire en postures, en comportements, en gestes, en décisions". "Mais tout passe à travers le cœur de l'homme, si je me laisse pas atteindre par la grâce du Christ ressuscité, si je lui permets de me transformer dans cet aspect de moi qui n'est pas bon, qui peut me faire du mal à moi et aux autres, je permets à la victoire du Christ de s'affirmer dans ma vie, de prolonger son action bénéfique", a-t-il soutenu.
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Por su parte, el teólogo brasileño Leonardo Boff saludó desde Costa Rica la designación del papa Francisco y dijo sentirse entusiasmado y confiado en que el pontífice restaure una desacreditada Iglesia. “Yo pienso que hay algo providencial (en su elección), que es el Papa del tercer milenio y que puede ser un arquetipo, una referencia mundial de autoridad moral, espiritual, que nos llama a amar la tierra, salvar la humanidad, salvar la vida”, aseguró Boff durante una entrevista en un programa radial. Los obispos argentinos instaron, en sus mensajes pascuales, a optar por los pobres, tal como pidió el papa Francisco, y a fortalecer el diálogo en el país, al que definieron como “la casa de todos”.

De son côté, le théologien brésilien Leonardo Boff (5) a salué depuis le Costa Rica la désignation du Pape François et a dit se sentir enthousiasmé et confiant dans le fait que le pontife allait restaurer une Eglise discréditée. "Je pense qu'il y a quelque chose de providentiel (dans son élection), que c'est le Pape du troisième millénaire et qu'il peut être un archétype, une référence mondiale en matière d'autorité morale, spirituelle, qui nous appelle à aimer la terre, sauver l'humanité et sauver la vie" a assuré Boff dans une entrevue dans une émission de radio. Les évêques argentins ont insisté, dans leurs messages de Pâques, sur la priorité aux pauvres, tout comme l'a demandé le pape François, et à renforcer le dialogue dans le pays, qu'ils ont défini comme "la maison commune" (6).
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Si on regarde dans le reste de la presse, on ne trouve rien dans La Nación sur le sujet et dans Clarín, on lit un article fourre-tout, quelque peu décousu, qui mêle sans aucun lien entre eux les mêmes citations extraites du même communiqué officiel, l'annonce d'une invitation au Pape à venir visiter la Terre Sainte envoyée par le Patriarche de ces lieux et l'écho à de soi-disant rumeurs insistantes à Rome qui veulent que le Pape s'apprête à nommer des femmes à des hauts postes de la curie, le tout ne reposant que sur le radio moquette du petit monde des journalistes présents à Rome et qui occupent le temps comme ils peuvent en s'arrangeant pour avoir toujours quelque chose à dire même quand ils n'ont rien à se mettre sous la dent. J'ai rarement vu un point d'actualité où la différence qualitative entre les deux quotidiens était aussi nette qu'ici... Du contenu, et un contenu difficile à manipuler mais cependant manié avec respect, dans un cas, et un maigre fourbi somme toute assez mondain dans l'autre.

Le communiqué de presse du Vatican précise quant à lui que le Pape s'est aussi rendu sur la tombe de cinq de ses prédécesseurs, tous enterrés à proximité du site archéologique, et qu'il est ensuite rentré à pied à la Maison Sainte Marthe où il a choisi de résider (et Radio Vatican d'ajouter qu'il est "rentré à pied comme d'habitude". Cette bonne vieille routine, quoi !)

Pour aller plus loin :
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(1) La photo ne représente pas ce moment mais celui où l'un des deux conservateurs laïcs du site archéologique lui explique le plan de ce très ancien cimetière remontant au règne de Néron, à une époque où les chrétiens n'ont pas encore développé leur corpus iconographique et symbolique apparu lors des règnes suivants (le poisson et le berger avec la brebis sur les épaules, bien avant la croix encore trop traumatique quand elle est toujours un supplice en vigueur et qui plus est fréquent). On y a trouvé le corps d'un homme recouvert d'un tissu de pourpre or il est vraisemblable que les premiers chrétiens aient pu avoir ce type de geste pour honorer Pierre et une tradition interrompue a toujours désigné ce lieu comme celui où il avait été mis en terre après son supplice.
(2) C'est bien dur d'accepter le changement de nom et d'adhérer à sa signification. Il est vrai qu'il faut pour cela entrer assez profondément dans les traditions bibliques. Dans les deux Testaments, le changement de nom est une opération par laquelle Dieu donne une nouvelle mission à un homme ou une femme qu'il a appelé(e) et qui par là même change de vie. Dans l'Ancien Testament, l'épisode le plus connu est celui du changement de nom de Abram et Saraï qui deviennent Abraham et Sarah au moment où Dieu leur promet qu'ils auront une descendance aussi nombreuse que les grains de sable au bord de la mer et dans le Nouveau Testament, c'est le moment où Jésus prend Simon à part et le nomme Pierre. La même chose est arrivé à Saül de Tarse, devenu après Damas et sa spectaculaire conversion, Paul, de son nom de gens romaine lorsqu'il décida de voyager dans toute la Méditerranée avec son statut de citoyen romain (ce qui était exceptionnel pour les Juifs, sauf pour les habitants de cette ville qui avaient rendu de signalés services à Tibère qui les avait remerciés en leur octroyant le droit de cité) pour annoncer la foi chrétienne au monde païen.
(3) Ces propos reproduisent très sagement la source vaticane. Le Pape paraphrase ici une prière attribuée à saint François d'Assise qui est très connue et très pratiquée dans toutes les couches de la population catholique et même au-delà (la prière est aussi récitée dans certaines églises protestantes qui n'ont pas répudié l'héritage spirituel des grands saints même quand elles en refusent les dimensions cultuelles).
(4) Il s'agit du Regina Coeli (reine du ciel), une salutation à la Vierge qui se dit pendant tout le temps de Pâques (jusqu'au Dimanche de la Pentecôte) en lieu et place de l'Angelus, qui consiste en une triple salutation avec l'Ave Maria (Je vous salue Marie). Ceci dit, la prière n'est pas dédiée à la Vierge, mais adressée à la Vierge. Ils font de gros efforts mais on voit qu'ils ont séché le cathé...
(5) Un des leaders de la théologie de la Libération. Resté sur les rails du dogme catholique, il est néanmoins entré en grand contentieux avec Jean-Paul II, qui avait même osé le chapitrer en public sur un tarmac d'aéroport, humiliation qui a été très mal vécue dans toute la gauche démocratique en Amérique du Sud et ailleurs aussi (une partie de ce courant a versé dans le marxisme au cours des années 70 et 80, ce qui lui a valu d'être rejeté d'une manière peu nuancée par Jean-Paul II, d'où cette vision qu'a Página/12 d'un Jean-Paul II main dans la main avec l'ultra-capitalisme prôné par Reagan et Thatcher).
(6) L'expression employée par Jorge Bergoglio le 8 mai 2010 dans son homélie à Luján que je vous ai traduite hier dans l'article n° 3000 de ce blog.