mercredi 10 septembre 2008

Le panier de la ménagère [actu]

Un almacén sur Corrientes dans le quartier de Villa Crespo. Sur la vitrine tous les prix des fromages et des charcuteries. Cliquez dessus pour la voir en plus grande résolution et lire les affiches...


En Argentine, l’inflation annuelle est d’environ 25% l’an. C’est pourquoi, autant que je le peux, je vous présente les prix de l’année dernière à la même époque à côté de ceux d’août 2008.

Le remis pour me rendre de l’aéroport à la capitale, à mon arrivée : la course forfaitaire (payable à la commande) Ezeiza-Almagro faisait, auprès de la même entreprise, 80 $ Arg en août 2007 et cette année 115 $ Arg.

Dans le sens aéroport-ville, le remis n’est pas la solution la plus économique. Votre porte-monnaie vous sera toujours reconnaissant de prendre la peine de sortir de l’aéroport du côté droit et d’aller prendre un taxi... Mais à 5h du mat, heure locale, après 11 heures de vol Madrid-BsAs en étant partie de l’enfer de Roissy, sans pouvoir fermer l’oeil plus de 5 mn d’affilée pendant le vol et en m’ennuyant ferme parce que, de nuit, dans un avion, il n’y a pas grand-chose à faire pour s’occuper, j’avoue que je ne sais pas résister aux sirènes des 5 comptoirs rutilants de remis installés directement à la sortie de la livraison bagages.

Au retour, dans le sens Buenos Aires-Ezeiza, le remis est meilleur marché que le taxi (allez comprendre !). En empruntant une autre société, du voisinage à Almagro, la course, sur le même parcours mais en sens inverse, était à 74 $ Arg (contre 60 l’année dernière).

Chez le boucher (esquina Rivadavia y Medrano) : le bife de chorizo (sans équivalent dans la découpe bovine européenne), un morceau persillé réputé pour sa tendreté, l’un des plus recherchés et donc des plus chers, 18 $ le kg l’année dernière, 23 cette année (pour la même qualité gustative). Juste en-dessous, dans les 20$, le bife ancho, découpé dans notre côte de boeuf. Le morceau meilleur marché, el Oso Buco (du boeuf... -on ne mange pas les petits veaux en Argentine), était à 8 $/kg. J’ai aussi trouvé du bife ancho, quelques jours plus tard, sur l’étal d’un boucher de marché, à 7,9 $/kg, au mercado San Juan à Boedo ! Très bon aussi.

A la confitería, La Perla de Almagro (un pâtissier-traiteur, sans salon de thé adjacent) sur l’avenida Medrano, entre Rivadavia et Corrientes : les facturas (viennoiseries d’une taille située entre la viennoiserie traditionnelle et la mini-viennoiserie) étaient à 0,60 $ Arg/pièce l’année dernière, à 0,90 cette année (sur les facturas, toutes les confiterías de Buenos Aires pratiquent les mêmes prix) ; l’empenada, ce chausson salé farci de boeuf haché, de poulet, de fromage et jambon, de fromage et oignon, de fromage et maïs (choclo), de purée de maïs (humita), d’épinards..., 2 $ Arg / pièce l’année dernière, 3,50 $ Arg cette année (qualité et variété de choix identique).
Au rayon libre-service et fait maison du supermaché Coto du même secteur de la ville, la factura était cette année à 0,65 et la empenada entre 1,49 à 1,79 l’unité selon la garniture (la plus chère étant la empenada de atun, au thon, et les autres sont toutes à 1,49, qu'elles soient au boeuf, au poulet, au fromage, aux légumes...).

Coto est une enseigne de grandes surfaces telles que nous les connaissons en Europe (Monoprix, Delhaize...). C’est une chaîne argentine, fondé par un Argentin, Alfredo Coto, en 1970, et elle compte à l’heure actuelle 110 magasins, dont 40 supermarchés et 15 hypermarchés. Coto emploie 18000 salariés, a intégré la formation initiale et continue (bouchers, boulangers, cuisiniers notamment) et est principalement implanté à Buenos Aires et dans sa banlieue (1/4 de la population totale du pays, avec 11 millions d’habitants sur un total de 40). Il a créé sa propre marque, Ciudad del Lago, sous laquelle il fabrique lui-même et distribue une gamme de 45 produits exclusifs d’excellente qualité gustative (leur huile d’olive est goûteuse au possible, 10,99$, la bouteille de 50 cl). Il exporte également des produits typiquement argentins (viandes et cuir, au détail). Coto est très fier de sa politique sociale (qu’il estime être la meilleure du secteur et ce n’est peut-être pas faux, à en juger par l’amabilité paisible des employés envers les clients) et de ses résultats en parts de marché face aux gros méchants loups que sont les Français Carrefour et Leader Price (le hard-discounter du Groupe Casino) et DIA% le hard-discounter franchiseur espagnol désormais intégré au groupe Carrefour.

Chez le frutero de la esquina (le marchand de 4 saisons), le même, là encore, d’une année sur l’autre, les poires (peras) étaient en août 2007 à 1,75 $ Arg le kg, elles sont passées cette année à 3,50. Les tomates olivettes (peritas) sont passées de 3,50 à 4,50. Au supermarché, quelle que soit sa catégorie, les fruits et légumes sont généralement plus chers que chez les fruteros, à l’inverse du système de distribution européen. Chez Coto comme dans la supérette indépendante, dite supermercado chino (1), les poires et les tomates se vendaient cette année allègrement autour des 5 $Arg le kg, à variétés, qualités et calibres identiques.
Les fraises (frutillas), le mois d’août est le tout début de saison, sont passées en 3 semaines de 9,99 $Arg /kg à 6,99. En fin de séjour, chez un autre frutero, je les ai vues affichées aux environs de 5$ le kg.

Les pâtes fraîches : une grande spécialité à Buenos Aires dont 50% de l’immigration entre 1880 et 1930 provenait d’Italie. La boîte carton (style boîte à pizza) de 2 douzaines de ravioles fromage (raviolis) ultra-frais à cuisiner dans les deux ou trois jours : 2,5 $/ l'unité, dans une boutique de fabriquant sous enseigne de chaîne (La Rua). Ces boutiques, sous des enseignes très nombreuses, indépendantes ou non, vendent toutes les pâtes possibles et imaginables, sous toutes les formes y compris des formes inconnues en Italie, avec toutes les garnitures possibles, ainsi que des sauces bolognaises et napolitaines, du fromage râpé (adaptation locale du parmesan italien), des bases de pizzas déjà tomatées, des empenadas et des tortillas (l’omelette froide et garnie de la tradition espagnole). Les prix, le choix, la qualité et l’amabilité du service sont sensiblement les mêmes à La Juvenil. On vend également des pâtes fraîches (ultra-fraîches) dans les supermarchés. Je n’ai jamais vu de pâtes fraîches de longue conservation (4 à 6 semaines comme il s’en vend en France et en Belgique).

Les produits laitiers : les yaourts sont vendus en supermarché (et très peu chez les détaillants de type crèmerie), par lot de deux (jamais plus) et sont très chers : entre 1,60 et 2,20 $ le pack (soit, en devise constante, pas très loin du prix de nos yaourts à l’ancienne vendus à la pièce, malgré un delta de niveau de vie d’environ 4,5 pour 1 en notre faveur). Il y a très peu de choix et peu souvent autre chose que les 2 marques omniprésentes (San Cor, coopérative de producteurs des provinces de SANta Fe et CORdoba, et La Serenisima, sa sous-marque Ser et leur devise surréaliste "La verdad lactea", une entreprise locale fondée en 1929 et absorbée progressivement par Danone à partir de 1996, nettement la plus chère des deux bien que ses produits soient tout autant fabriqués sur place). Les yaourts nature n’existent pas (mais les 0% si), tous sont déjà sucrés et vous pouvez choisir entre 4 à 6 parfums, rarement plus (vanille, pêche, fraise, dulce de leche, noisette, pruneaux). Même dans un grand supermarché de ville, il suffit d’un seul linéaire réfrigéré d’un seul bloc pour présenter tout ce qui est yaourt, crème, beurre, lait frais (conditionné majoritairement en berlingots de plastique souple et opaque).

On ne trouve pratiquement pas de dessert lacté, mise à part la crème Danette commercialisée depuis quelques années seulement par La Serenisima (la même publicité qu’en Europe, celles où tous les voisins rappliquent pour plonger leur cuillère dans le pot de Danette, tourne en boucle sur les écrans de TVSubte, sur les quais du métro).

Mais si on ne trouve guère de desserts lactés, on trouve du dulce de leche et pour la couleur locale, c’est mieux que nos crèmes renversés aux oeufs frais ! Le dulce de leche, c’est cette spécialité sud-américaine à tartiner qu’on obtient en faisant réduire et caraméliser du lait et que Bonne Maman essaye vainement de copier avec sa confiture de lait. L’offre de dulce de leche est rassemblée dans un rayon spécial non réfrigéré, à côté des laits en poudre, des chocolats de petit-déjeuner, de l’alimentation pour bébé et/ou des eaux... Le plus petit conditionnement est un pot de plastique de 200 gr vendu entre 2,60 et 3,20 $ selon la marque et le type de circuit de distribution. Il y a une bonne demi-douzaine de marques (dont La Serenisima, Ser et San Cor, avec la même hiérarchie de prix que pour les yaourts). Les packaging exaltent l’image du terroir, la nostalgie du passé et la tradition rurale. Idem pour le mate : terroir, identité nationale nostalgique et idéalisée et tradition rurale se pavanent sur les paquets des 6 à 10 marques spécialisées en un véritable mur de yerba maté sur l’intégralité d’un linéaire (cafés, thés et infusions occupent un linéaire à part et pas toujours complet). Le paquet de 500 gr de yerba mate crue tourne autour de 2 $ (cela monte à près de 6 lorsqu’il s’agit de récoltes limitées, de cueillette à la main, de méthode de séchage à l’ancienne ou de production bio). La boîte de 20 ou 25 sachets de mate cocido (yerba ébouillantée puis séchée pour en faire disparaître l’âpreté et une partie de l’amertume) tourne autour de 1$ pour le premier prix et peut monter jusqu'à 3 lorsqu'il s'agit d'une marque de luxe. Pour les gens très pressés, les Portègnes hyper-stressés par la recherche du profit de banque qui les emploie, on vend même du mate listo : un pack à usage quasi-unique constitué d’un mate en carton ou en plastique, un petit sachet de yerba, une bombilla en plastique pour boire en filtrant la yerba et une bouteille thermos, qu’il n’y a plus qu’à remplir d’eau chaude. A l’aéroport, le même mate listo se vend avec la thermos déjà remplie. Ils sont fous, ces Portègnes !
Le haut de gamme de la yerba mate et du mate cocido semble occupé (et bien occupé) par la marque La Merced, qui vend de la yerba mate biologique, cueillie main et au parfum beaucoup plus subtil que celle de Taragüi, la petite soeur d’entrée de gamme, fournisseur de thé de la compagnie aérienne Aerolineas. La Merced, en haut, et Taragüi, en bas, appartiennent au même groupe Establecimiento Las Marias (comme les marques Unión, Punto de Oro, Mañanita et Caá Porá). En Europe, on trouve surtout Taragüi et Cruz de Malta, souvent Rosamonte et, chez les très bons spécialistes, chez Izraël rue François Miron à Paris par exemple, Nobleza Gaucha.
Tous ces produits (yaourts, dulce de leche, mate) sont légèrement plus chers au supermercado chino que dans une enseigne de marque mais dans des proportions qui n’ont rien à voir avec les différences de prix que nous observons entre grandes surfaces et épiceries de quartier en Europe.

Le vin (argentin bien sûr) : les prix vont de 4,50 la bouteille de 75 cl à la somme astronomique de 45$ au supermercado chino (mais toutes les bouteilles sont à la main du client, pas de vitrine fermée à clé). Son presque voisin, un caviste installé sur Rivadavia, a choisi, lui, cette année, de mettre en vitrine des bouteilles allant de 1,75 à 11,90 $ Arg.

La qualité du vin en Argentine, comme en Europe d’ailleurs, est très variable. Cela va de l’équivalent de nos vins de table (des assemblages quelconque vinifiés sans attention particulière pour donner une piquette quelconque) à des produits luxueux, excessivement chers, souvent en imitation de grands crus français, italiens ou espagnols, obtenus avec l’appui d’oenologues français qui vendent leurs conseils au prix du caviar, en passant par des vins plus qu’honorables, commercialisés sous des noms de marque (structure agraire oblige : le vigneron indépendant cultivant tout seul sa poignée d'hectares de vigne et mettant lui-même en bouteille sa production artisanale est une exception économico-ethnique, comme la coopérative sans chichi produisant un bon vieux vin de pays. La plupart des vignobles argentins sont des latifundia gigantesques où le vin est produit à une échelle et avec des techniques industrielles).

Lopez, une importante société de la région viticole de Mendoza, est la marque la plus communément consommée chez les particuliers et au boliche, elle est réputée pour sa qualité oenologique et ses prix abordables. Avec mes amis argentins, je crois bien n'avoir bu que des vins Lopez durant tout mon séjour au moins en ce qui concerne les rouges (tinto). Je ne fais pas entrer en ligne de compte les deux bouteilles achetées par des compatriotes et partagées entre clients de l’hostel. En ce qui concerne les vins choisis par les Argentins, ils valent vraiment le coup, même au Cena Show Tango Porteño quand Tango Porteño met les petits plats dans les grands pour les invités de l’ouverture du Festival et même quand on est Français et pas peu fier de la qualité du vin de chez nous...

Et pour en terminer avec l’alimentaire, voici un produit de luxe : le pan dulce, le pannetone revu et corrigé par les Argentins, indispensable sur la table de Noël. Celui de la Isla Martín García, cuit au feu de bois (a la leña), le plus prestigieux de tous et qui se fabrique et se vend tout au long de l’année (alors que c’est une spécialité de décembre mais il faut bien que les boulangers de l’île Martín García vivent 12 mois sur 12) se vendait chez Bombonella, un chocolatier de la esquina Corrientes y Paraná, 29,90 $/kg l’année dernière (c’est hors de prix !) et 35 $ cette année (c’est pire !)...

Téléphonie : vous pouvez vous équiper d’un téléphone portable à partir de 160 $Arg, tout compris, appareil + carte pré-payée SIM initiale. Avec une carte pré-payée, compter environ 1$ la minute pour une communication locale. Cependant le coût de la minute est dégressif en fonction du montant que vous acquittez. Généralement, il y a un montant plancher de recharge, à partir de 15$ pour un numéro Personal, par exemple. Tous ces prix sont ceux d’août 2008.
Les cartes SIM (chips) se rechargent en espèces dans les kioscos et les locutorios. Attention : les prépayés ne fonctionnent pas en dehors du pays. (Cela ne vous sera donc pas très utile si vous passez de l'autre côté du Río). Vous avez également la possibilité d’acheter des cartes de téléphone pour appeler depuis une cabine publique (ou depuis le téléphone de votre hostel) en vous connectant au réseau émetteur de la carte. Et vous pouvez encore téléphoner depuis un locutorio, boutique équipée de téléphones pour les appels toutes distances, d’ordinateurs et d’accès Internet efficaces. Les locutorios sont très nombreux en ville, environ 1 toutes les 2 cuadras en centre-ville et ils ne sont pas fréquentés que par les touristes car tout le monde ne peut pas se faire installer le téléphone ni internet à domicile. Pour les appels vers l’Europe dans votre langue maternelle, le locutorio est très commode et très économique pour les touristes. En ce qui me concerne, pour les appels locaux, où je parle espagnol, je préfère utiliser un portable local. C’est très pratique et pas cher et cela m’évite le parasitage des bruits ambiants du locutorio (le niveau sonore à Buenos Aires, dans les cafés, dans la rue, dans les kioscos, dans les locutorios, est très, très, très élevé et les sirènes d’ambulance, de pompiers, de police retentissent à tout bout de champ de jour comme de nuit).

Les chaussures (estampillées industria argentina, naturellement) : environ 200$ une paire de chaussures en cuir, en chaussures de ville comme en chaussures de tango, environ 150 l’année dernière. Vous pouvez trouver des chaussures (plutôt de ville) à moins de 100$ (solidité et confort non garantis) et des souliers de luxe allant jusqu’à 600 ou 700$ dans les commerces qui se haussent du col, rue Florida. Les chaussures de tango artisanales et fabriquées en petites série à la main par Loló Gérard (rue Anchorena, à côté de l’Abasto) se vendaient cette année entre 200 et 300$ la paire, selon le modèle. Les chaussures de tango pour femme sont plus chères que les chaussures hommes, le travail de l’artisan, conception et fabrication, étant plus important (dessin général, équilibre et soutien, lanières, talons, attaches, paillettes, etc.).

Les soldes (liquidaciones) ont lieu en fin de saison (en août l’hiver et en mars l’été). Elles sont beaucoup moins réglementées qu’en Europe, donc il n’est pas aussi simple de s’y repérer. Mais de toute façon, vous avez maintenant une idée des prix : avec nos niveaux de vie, vous voyez qu'ils ne sont pas un grand obstacle, même si vous pourrez peut-être, comme moi, prendre assez vite le pli et vous effarer comme les Portègnes du coût de la vie en voyant le Tshirt officiel du Festival du tango affiché un très onéreux 45 $ (et pourtant, ça fait juste 10 €, il y a pire pour un Tshirt millésimé)...





(1) le supermercado chino est tenu par des familles asiatiques, plus souvent cambodgiennes, laotiennes ou vietnamiennes que chinoises. C’est l’équivalent en tout point du "petit Arabe du coin" de nos villes de France (les prix pratiqués, le choix de produits et le type de présentation, la présence de quelques produits "du pays", avec la sauce soja et l’épice 5 parfums qui remplace le raz el hanout et les dattes, l’amplitude des horaires d’ouverture, l’ouverture du dimanche parfois toute la journée).