Jusqu'à présent, pour ne pas me laisser déborder par la tâche, j'ai veillé à ne pas sortir d'une zone de francophonie européenne (pour la rubrique ici). Si je ne me mettais pas des limites, je ne m'en sortirais pas. Mais là !
Comment ne pas faire écho à cet événement si riche d'espoir par les temps qui courent ?
D'ici quelques semaines, la capitale libanaise, Beyrouth, accueillira un véritable festival de tango-baile. Comme très souvent, de ce côté-ci de l'Atlantique, la danse sera l'axe de la manifestation. Ce sera, semble-t-il, le premier événement de cet ordre dans cette région, si passionnante et si douloureuse, qu'est le Moyen-Orient. Et l'affiche (c'est loin d'être toujours le cas) laisse présager de la qualité et de l'authentique.
L'orchestre invité, Silencio (du nom du tango de Gardel et Le Pera-Petterrossi), vaut le coup. L'affiche les annonce en formation de quatuor mais Silencio est en fait un vrai orchestre typique qui rassemble 11 musiciens, 10 instrumentistes et un chanteur (Omar Fernández). Les membres de cet ensemble viennent d'un peu partout, Argentine, Uruguay, Allemagne, Italie, USA et Cuba, et ce n'est pas très fréquent pour un bon orchestre de tango, soucieux d'authenticité. Tout en se montrant fidèles à la tradition de la Orquesta típica, ces musiciens se projettent géographiquement hors de l'estuaire natal du tango, comme l'indique leur site web, rédigé exclusivement en anglais. Leur sonorité propre et leur style, ils les construisent à travers une orchestration quelque peu hérétique puisqu'elle ajoute aux instruments traditionnels de la Típica (piano, bandonéon, violon et contrebasse) un orgue électronique et une clarinette basse, venus de l'univers du jazz et du swing à la Glenn Miller. Le résultat a du caractère et se révèle musicalement tout ce qu'on fait de plus orthodoxe ! Leur musique est à découvrir sur leur site puis d'ici quelques jours sous les cèdres millénaires du Liban, comme le dit le slogan de la manifestation... L'orchestre Silencio a déjà enregistré deux disques et ils en préparent un troisième.
Côté danse, l'organisateur du festival, Mazen Kiwan, lui-même professeur, a invité parmi les enseignants un danseur et prof de renom international : el Pajaro (l'oiseau), de son vrai nom Diego Riemer, qui sera à Beyrouth avec sa nouvelle partenaire, Belén Giachello. J'ai moi-même eu la chance de suivre, durant l'été 2005, à Paris, plusieurs cours de El Pajaro. Je garde le souvenir d'un excellent professeur et d'un homme très agréable. Il est argentin et parle un français exceptionnel. Je me souviens d'un look pour le moins inattendu : carrure d'hercule de foire et queue de cheval lui descendant jusqu'au milieu du dos. Un danseur somptueux, comme vous pourrez en juger sur cette démonstration disponible sur YouTube (Farol, dansé par El Pajaro y Belén). En août 2007, lors de notre rencontre à Buenos Aires, le peintre Chilo Tulissi (voir le site chilotulissi) m'a demandé à brûle-pourpoint si je connaissais El Pajaro. Il se trouvait que oui. Et j'ai ainsi appris qu'ils se connaissaient bien tous les deux, Chilo ayant vu naître Diego... Le monde du tango est vraiment bien fait.
Toutes les informations en français (et en anglais) sur ce premier festival de tango à Beyrouth sur le site du festival tangolebanon. Vous pouvez aussi consulter le site du magazine montpelliérain Toutango qui en est partenaire (lien en Colonne de droite, rubrique Eh bien dansez maintenant !)
A voir aussi dans la Colonne de droite de Barrio de Tango, les raccourcis danse et musiciens (rubrique Les artistes).