vendredi 27 février 2009

Quarante bougies et toujours pas un cheveu sur le caillou [à l’affiche]



Vendredi 27 février à 21h30
Le tango se ramène dans le quartier - Edition spéciale
A peu près le même foutoir que d’habitude mais avec un gâteau en plus.
Cucuza (moi) fête son anniv
Moscato y donne du lustre (enfin, il essaye !)
Invités d’honneur : vous tous.

(Traduction Denise Anne Clavilier)

Telle est l’invitation que j’ai reçue hier soir (trop tard pour prendre mon billet auprès d’Aerolineas - c’est incroyable comme ils sont mal organisés, ces Argentins !). Comme j’ai trouvé l’invitation sympa, j’ai décidé de la partager.

La fête se passe donc ce soir au café El Faro, un bar-restaurant-pizzeria situé à l’angle (esquina) Pampa et Constituyentes dans le quartier excentré de Villa Urquiza, où vit Cucuza (voir les autres articles de Barrio de Tango sur ce cycle, EtvaB, en cliquant sur l’anagramme dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search ci-dessus, il y a aussi dans les articles quelques photos des soirées passées).

Pour ceux qui ne connaissent pas encore le chanteur (mais aussi auteur et compositeur, on en reparlera à la fin mars) Cucuza, rendez vous de toute urgence sur les autres articles que je lui ai déjà consacrés (en cliquant sur son nom dans le pavé Pour chercher Para buscar To search, sous le titre) et sur sa page My Space pour écouter cette voix de velours (dans les liens externes de la Colonne de droite, dans la rubrique Grillons, zorzales et autres cigales). Elle vaut le clic de souris.
Ou alors cliquez sur ce lien, Tibieza (Cucuza accompagné par Hernán Reinaudo et Norberto Vogel, dans un de ses propres morceaux).

Et comme c’est aujourd'hui même son anniversaire (c'est même écrit sur la page d'accueil de Todo Tango !) et que Cucuza a une bonne dose d’humour dans la plume, dans l’encrier et dans la boîte mail, je vous livre quelques uns des délires de sa prose promotionnelle...

Corría el verano de 1969, poco antes poco después se separaban "Los Beatles", el hombre llegaba a la luna (oooootro tema...), "El Polaco" Goyeneche se tomaba su "whiscacho" número 2346, Raúl Lavié empezaba a hacerse el coqueto y nacía casi sin querer Hernán Ernestor Castiello. Este "pescadito" con ascendente en conejo y descendente en ornitorrinco, que a la edad de 5 años escribía sus primeros palotes en las páginas del Tango y a los 6 recibía sus primeros palazos por escribir desafinando. A los 10 se saca los últimos mocos (hecho que se concretaría en verdad recién a los 14) y a partir de los 15 años hasta los 39 su historia se pierde en un misterioso "Triángulo Bermudezco" que nos fuerza a llegar raudos hasta este presente...
Hernán Cucuza Castiello

C’était l’été 1969, un peu avant un peu après les Beatles se séparaient, l’homme marchait sur la lune (toute une histoire, ça !), le Polaco Goyeneche s’avalait son 2346ème whiscacho (1), Raúl Lavié (2) commençait à se faire coquet et naissait, presque sans le vouloir, Hernán Ernestor Castiello. Ce petit poisson avec le lapin en ascendant et l’ornithorynque en descendant, qui à l’âge de 5 ans traçait ses premiers bâtons sur les pages du Tango et à celui de 6 recevait ses premiers coups de règles parce qu’il écrivait en chantant. A 10 ans, il finissait de moucher son nez (ce qui en fait n’arriva vraiment qu’à l’âge de 14) et à partir de ses 15 ans juqu’à ses 39 ans, son histoire se perd dans un mystérieux Triangle des Bermudes que nous force à arriver en 4ème vitesse jusqu’à aujourd’hui...
(Traduction Denise Anne Clavilier)

Le mot d’ordre de la soirée est de chanter exclusivement des tangos dont le titre contient le nombre 40, comme Las 40 (les années 40) ou Buenos Aires del 40 (Buenos Aires en 1940). Les titres avec le nombre 50 sont priés de rester au vestiaire : Cucuza ne chantera donc pas l’immortel chef d’oeuvre du Padre del Tango, Don Ángel Villoldo (1861-1919), qui fit bien rigoler en son temps les petits gars du faubourg avec son Cuidado con los 50 (chansonnette qui moquait un édit municipal interdisant aux hommes d’adresser des galanteries aux femmes dans la rue sous peine d’une amende de 50 pesos, une vraie fortune pour l’époque) (3). Dans son mail d’invitation, Cucuza précise (à toutes fins utiles) que les rigolos de service sont priés de s’abstenir de lui réclamer le tango Voy camino a los 50 (je vais sur mes 50), le seul tango dont, dit-il, il sache que son titre contient le chiffre 50. Mais bon ! comme il n’en aura que 40, on restera sur ce chiffre. Non mais !

Ultime précision : Cucuza fera don de tous les cadeaux qui lui seront faits à cette occasion à l’institution S.O.N.M.I.O.S (il y a un jeu de mots, je vous laisse deviner lequel ? Si ! C’est vachement fastoche... Promis !) (4)

Enfin il termine son mail en remerciant tous ceux qui l’ont aidé à réalisé l’affiche et à rassembler quelques tangos rassemblant les caractéristiques mathématiques susvisées et en priant les gens d’arrêter de lui envoyer des listes de titres(il croule sous les suggestions de ses correspondants !)

Allez !
Depuis Paris et depuis l’hiver, bon anniversaire, Cucuza,
et bonne soirée à tout le monde !

(1) whiscacho : l’immense chanteur Roberto Goyeneche, dit El Polaco (1926-1994), ne pouvait pas entrer en scène sans avoir bu juste avant un petit cocktail passablement costaud qui avait été très en vogue dans les années 20. Je me souviendrai longtemps d’avoir entendu l’anecdote racontée par Horacio Ferrer, qui est un conteur fabuleux. C’était le 15 août dernier, quelques heures avant l’ouverture du Festival de tango. Une petite équipe de tournage de Telesur (la chaîne du Venezuela) venait de nous projeter, à lui, à Walter Piazza, le secrétaire de la Academia Nacional del Tango et à moi qui me trouvais là presque par hasard, un superbe documentaire de 25 minutes (si riche qu’il en paraissait 60) dont ils venaient d’achever le montage et dont Horacio Ferrer se montra très content ("ce film est plus moi que moi-même", joli compliment, non ? et mérité avec ça !). Et le Maestro se mit à nous raconter des tas d’anecdotes avec faconde, sur Troilo, sur la fondation de la Academia, sur l’écriture de Balada para un loco... et sur le whiscacho d’El Polaco. L’un de nous lui demanda ce que c’était que cette bête-là. "Oh, un vieux cocktail des années 20, expliqua-t-il avec un geste vers un lointain passé... Il faut bénir celui qui l’a inventé... S’il ne l’avait pas fait, il aurait fallu inventer le whiscacho pour qu’el Polaco puisse chanter".

Y cuando el fueye arrea su vendaval de infarto,
El Tango es una curda poética en tu voz
(dans El Polaco, tango d’Horacio Ferrer et Leopoldo Federico)

Et quand le soufflet lâche sa bourrasque cardiaque,
Le tango, chanté par toi, est une cuite poétique.
(traduction Denise Anne Clavilier)

Vous pouvez entendre ce texte récité par Horacio Ferrer, accompagné au bandonéon par le compositeur lui-même, dans un disque reprenant un concert public à la mémoire de Roberto Goyeneche (chez Melopea, pour ne pas changer....)
El fueye (le soufflet), en lunfardo, c’est le nom du bandonéon.
(2) Raúl Lavié, un autre chanteur, heureusement toujours en vie et toujours en activité, lui. Les articles sur les chanteurs en général, sous la mention Les chanteurs, dans la rubrique Les artistes, dans la Colonne de droite.
(3) Comme il y avait beaucoup plus d’hommes que de femmes à Buenos Aires au début du 20ème siècle, beaucoup hommes importunaient assez fréquemment les femmes dans la rue. Le Maire de l’époque prit donc des mesures énergiques !
(4) Pour ceux qui n’ont pas la bosse de l’espagnol : "son míos", surtout si vous parlez de cadeaux, ça veut dire "ils sont à moi !" Le présent article de blog, en français, finira donc directement dans la trésorerie de cette brave ONG aux objectifs pas clairs...