Ce mercredi, à 23h, la Orquesta Típica Fernández Fierro reprend ses habitudes "à la maison" et regagne ses pénates de la rue Sanchez de Bustamante dans le quartier de l’Abasto (au numéro 764 de cette rue située derrière le Centre commercial qui donne son nom à ce coin de la ville où a grandi et vécu Carlos Gardel dont on va fêter dans 15 jours le 74ème anniversaire de la mort).
Le concert de ce soir a donc lieu au CAFF, petit nom du Club Atlético Fernández Fierro (qui n’a d’athlétique que le nom. Juste pour le clin d’oeil : les clubs sociaux, sportifs et culturels des différents quartiers de Buenos Aires ont été la pouponnière du tango dans les trente premières années du genre et sont restés un de ses lieux privilégiés de résidence habituelle).
Le prix d’entrée est de 25$ si vous voulez être installé à une table (le CAFF fait aussi buffet de théâtre) et de 15 $ si vous vous contentez d’une simple chaise (de celles que les fidèles spectateurs ont apporté contre un billet de concert gratuit lors d’une opération hyper-efficace en juillet dernier. Lire mon article à ce propos).
La Orquesta Típica Fernández Fierro est, comme son nom l’indique, un ensemble instrumental typique, c’est-à-dire composé d’un piano, de violons, de bandonéons et d’une contrebasse. En plus, ils ont aussi un violoncelle et un alto. Sans oublier le chanteur. Un des meilleurs de l’heure : Walter Laborde, dit El Chino Laborde.
C’est un orchestre qui présente sa propre musique et des versions très personnelles et très vigoureuses de plusieurs grands classiques. Ils ont en particulier une version particulièrement noire, glauque, sordide de Corrientes y Esmeralda. Ce en quoi ils sont très fidèles au texte de Celedonio Flores, puisque ce coin de rue dans les années 30 ne respirait que tripot, prostitution, drogue dans une Buenos Aires socialement fort peu riante. Raúl Scalabrini Ortiz, le grand intellectuel de l’identité argentine, a décrit ce coin de la ville comme le centre de gravité social et sexuel des Portègnes, c’est dire ! Musicalement, la version de la OTFF de ce tango ultra-célèbre est excellente. Sur le plan esthétique, on est au bord du supportable tant le réalisme social passe à travers le son des instruments et l’interprétation vocalement rès théâtralisée du Chino.
En général, j’ai été très frappée en avril, lorsque je les ai entendus au New Morning à Paris, de constater combien ils s’acheminaient vers un style de plus en plus oppressant, de plus en plus obscur, de plus en plus accablant. Comme le font d’autres groupes, comme Astillero (dont le pianiste fit partie il y a plusieurs années de la OTFF et l’a quittée pour fonder un autre ensemble), Agua Pesada ou Buenos Aires Negro.
Pour aller plus loin :
Voir l’ensemble de mes articles sur la OTFF (ils ont un raccourci dans la rubrique Vecinos del Barrio, dans la Colonne de droite, et leur mot-clé dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus).
Leur site Internet figure par les liens externes dans la partie basse de la Colonne de droite, rubrique Grillons, zorzales et autres cigales.
En revanche, leur page My space n’y est pas (la voici sous le lien)
Sur Scalabrini Ortiz, lire mon article sur le lancement de son année et ma traduction de quelques passages de son grand livre de 1931, El hombre que está solo y espera.