dimanche 7 mars 2010

Un reportage sur Alorsa téléchargeable sur Canal Encuentro - Article n° 1200

Para Juan y Olga, para Guillermo, para Sebastián, Fernando y Leonardo

Alorsa au 1er anniversaire de El Tango vuelve al Barrio
au Bar El Faro, à Buenos Aires
en août 2008
racontant Vuelve el Tango




Tocá Tango (Touche du bois) est une série d'émissions documentaires conçue et montée par Rodrigo de la Serna et son partenaire, Juan Hermelo Díaz, sur la musique populaire du Río de la Plata : tango, murga, candombe et milonga.

Rodrigo de la Serna est un acteur très populaire en Argentine, un brillant jeune premier du petit écran. Beau gosse, bon interprète, il s'est lancé, il y a quelques années, dans le tango comme chanteur et leader du groupe El Yotivenco qui interprète un répertoire ancien et qui comporte quelques tangos peu chantés de nos jours. Il utilise la notoriété que lui vaut ses rôles à la télévision pour faire un travail très appréciable et très apprécié au service d'artistes moins célèbres que lui et très talentueux. Il était présent le 3 octobre à la présentation du 2ème disque de La Guardia Hereje, à peine plus d'un mois après le décès du leader du groupe (lire mon article à ce sujet).

Vous identifierez assez vite l'acteur à la fréquence de ses apparitions à l'écran. La vedette connue du grand public, c'est lui et ça se voit.

Sur le site de Canal Encuentro, la chaîne publique culturelle argentine, vous pouvez visionner en ligne ou télécharger gratuitement les 12 numéros de cette série consacrée à 25 artistes et groupes du tango d'aujourd'hui, qui pour beaucoup d'entre eux appartiennent à la génération montante.
Un peu plus de six mois après la brutale disparition, le 30 août dernier, de l'auteur-compositeur-interprète Alorsa, qui animait à La Plata le groupe La Guardia Hereje, lui qui aurait sans doute participer avec tant de plaisir au 1er Festival de Tango indépendant qui s'est ouvert hier soir à Buenos Aires (lire mon article d'hier), j'ai choisi de lui consacrer cet article à numéro, le 1200ème que je publie dans Barrio de Tango, blog ouvert le 19 juillet 2008.
Son amitié, sa gentillesse et son talent, énorme, le méritaient largement, lui qui ne verra pas la sortie de mon livre et qui l'avait déjà annoncée, espérée, fait attendre en Argentine...

L'émission qui lui est consacrée est la 9ème de la série, elle s'intitule La Guardia Hereje - Murgas de La Plata. Elle intéressera donc aussi tous ceux de mes lecteurs qui sont curieux du carnaval argentin, du carnaval de Buenos Aires, des carnavals qui se tiennent sur les rives du Río de la Plata : vous y découvrirez trois murgas de la capitale provinciale.

L'émission elle-même dure en tout une demie-heure. Retirez la minute et demie où Rodrigo de la Serna et Juan Hermelo Diaz racontent comment l'idée de la série leur est venue et les buts qu'elle poursuit et vous voilà débouchant dans une La Plata de plein été, en plein carnaval.
Il y a à La Plata une douzaine de murgas distinctes. Rodrigo de la Serna a choisi d'en présenter trois : Los Sospechosos del barrio (les suspects ou les dingos du quartier), Los Descarrilados del compás (les déraillés du tempo) et Parando en todas (On mise dans toutes les courses). Vous les reconnaîtrez chacune à ses couleurs et à son type de costume, comme c'est le cas de toute murga digne de ce nom.
Bien sûr, l'émission est conçue pour le public argentin, et non pour un public étranger : il y a donc bien des points qui ne sont pas approfondis tout simplement parce qu'ils relèvent là-bas de l'évidence la plus basique. Ainsi l'accent argentin des interviewés ne se laisse pas oublier. Les passages dansés sont brefs (tout le monde sait ce qu'est la danse des murgas, inutile d'insister dans un petit format comme celui-là). La plus longue séquence est très belle et particulièrement bien choisie, y compris pour nous, en Europe : il s'agit de la récitation d'une glosa, ces textes poétiques et farfelus que les murgas récitent en plein air, dans une tradition purement carnvalesque. Alorsa était passé maître dans l'art de la glosa : il en parsemait ses spectacles et vous en entendrez une, la plus connue sans doute, Vuelve el Tango, au début de la séquence consacrée à la Guardia Hereje. En écoutant bien cette glosa de carnaval, vous pourrez percevoir d'où vient l'art si particulier de dire la poésie inventé par Horacio Ferrer, qui lui est propre et qu'on entend dans les enregistrements qu'il a faits des glosas qui parsèment María de Buenos Aires et de nombreux grands tangos comme Balada para un loco (1) ou Yo payador, qu'il écrivit pour et avec Osvaldo Pugliese et dont celui-ci n'acheva jamais tout-à-fait la partition... (pour lire mes articles sur María de Buenos Aires et sur Balada para un loco, cliquez sur les liens constitués par les titres de ces oeuvres).

La séquence sur les murgas de La Plata dure 10 minutes et présente un assez joli échantillon de ce que peut être un carnaval du côté du Grand Fleuve.

La partie consacrée à Alorsa et La Guardia Hereje s'ouvre avec Vuelve el tango (le tango est de retour) dit par Alorsa. Ne tenez pas compte du sous-titre qui annonce Al pan pan, une autre glosa que l'on entend pas dans l'émission (pourtant excellente elle aussi). Vuelve el tango sera bientôt disponible en français dans un second ouvrage, que je publierai prochainement, sur 10 poètes populaires argentins d'aujourd'hui.

Vous entendrez dans ces 20 minutes La Pesadilla (dont j'avais cité le refrain pour vous annoncer le décès de notre ami, dans mon article du 1er septembre dernier : la pesadilla, ça veut dire Le cauchemar), Para verte gambetear (que j'ai traduit dans Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, à paraître à mi-avril 2010 aux Editions du Jasmin), qui célèbre Maradona sans chercher à dissimuler les failles du personnages, et El Pelado y la mocosa (le chauve et la mignonne).

L'émission a été enregistrée pendant l'été 2007. J'ai fait moi-même connaissance avec Alorsa à Buenos Aires quelques mois après, grâce à son DVD Tangos y otras yerbas (Tangos et autres plantes, expression qui copie la formule de composition de certains paquets de yerba maté aromatisée, puisque l'on peut la vendre mêlée à de la menthe ou de la verveine ou d'autres plantes qui ne sont pas consommées en Europe).

L'émission comporte une assez longue interview des quatre musiciens du groupe. Vous entendrez donc parler Alorsa, les deux guitaristes, Sebastián Marin et Fernando Tato, et le percutionniste, qui était un ami de très longue date d'Alorsa, Leonardo Gianibelli. Cet article leur est dédié à eux trois et aux parents d'Alorsa, qui veillent aujourd'hui, avec amour et admiration, sur l'oeuvre de leur fils, ainsi qu'à son frère.

L'émission est téléchargeable gratuitement. Il vous suffit pour cela de vous enregistrer sur le site de Canal Encuentro, en donnant une adresse mail valide et un mot de passe que vous construirez vous-même. Cela permet à Canal Encuentro de suivre les consultations des internautes et donc d'en savoir un peu plus sur les attentes du public. L'émission est disponible en format complet (d'environ 170 Ko) ou en plages prédécoupées avec lesquelles vous pouvez monter votre propre DVD.



Les autres émissions de la série portent à chaque fois sur deux artistes ou groupes et prouve un véritable intérêt pour l'influence noire dans la musique populaire de la région, ce qui est le signe d'une démarche très authentique et courageuse de la part de Rodrigo de la Serna (2) :

n° 1 : Ramiro GalloNegros de Miércoles
n° 2 : Coco RomeroLa Chicana
n° 3 : Alfredo Tape Rubín et son groupe, Las Guitarras de Puente AlsinaCentro de Murga de Buenos Aires
n° 4 : Juan Tata CedrónJavier Ortuño et Herbert Piritz
n° 5 : Victor ParmaCosa de Negros
n° 6 : Carlos QuiliciÁlvaro OrtuñoMurgas en Estación de Tren
n° 7 : Agarrate CatalinaCuareim 1080
n° 8 : Producto Malena MulayaTabaré Cardoso
n° 9 : La Guardia Hereje – Murgas de La Plata
n° 10 : Gustavo MozziLa candela de San Telmo
n° 11 : Hugo Rivas CuartetoAfrocandombe
n° 12 : Los InevitablesOrquesta Típica Astillero Tango


(1) Vous découvrirez cette manière de dire dans le disque Melopea qui accompagne mon recueil bilingue de tango argentin, sur la table des matières duquel je publierai prochainement un article (c'est prévu pour demain si l'actualité ne m'oblige pas à retarder cette parution) et plus tard, je ferai de même avec le contenu du disque. Pour ces articles, j'attendais de disposer de facsimilés jpeg des pages du livre. Pour lire l'ensemble de mes articles sur l'ouvrage, cliquez sur ce lien et pour en savoir plus sur la souscription (ouverte jusqu'au 30 mars), cliquez sur ce second lien.
(2) Rodrigo de la Serna a tourné l'année dernière un téléfilm pour le Bicentenaire où il incarne ni plus ni moins que José San Martín, le Père de la Patrie, dont le film raconte la traversée des Andes, un épisode particulièrement glorieux des guerres d'indépendance de l'Argentine, du Chili et du Pérou. Lire
mon article sur ce tournage.