Le Padre Mugica était un militant de la révolution péroniste montonera qui avait fini par rompre avec l’organisation révolutionnaire et guerillera, tout en maintenant intact son engagement social.
Il a été assassiné au sortir de l’église San Francisco Solano du quartier de Villa Luro à Buenos Aires le 11 mai 1974. Il venait de célébrer la messe et s’apprêtait à prendre sa voiture, une 4 L, pour se rendre ailleurs où il était attendu pour une autre activité pastorale. Un sbire à moustaches s’est approché de lui et lui a vidé son chargeur dans l’estomac et la poitrine. Transporté à l’hôpital, il a eu cette dernière parole : "Maintenant, plus que jamais, il faut être avec le peuple". Carlos Francisco Sergio Mugica Echagüe avait 43 ans.
Il était né le 7 octobre 1930 dans une famille de la grande bourgeoisie et avait commencé des études de droit avant d’entrer au séminaire à l’âge de 21 ans. Il fut ordonné prêtre en 1959 et de là, s’engagea dans le groupe des Prêtres pour le Tiers Monde parce qu’il était fermement convaincu que la mission sacerdotale consistait à évangéliser les pauvres et à interpeller les riches (dont sa famille faisait partie). En 1968, il vint en France étudier l’épistémologie et la communication sociale et profita de son séjour sur le Vieux Continent pour se rendre à Madrid et rencontrer Juan Perón, qui y vivait exilé. A son retour en Argentine, il s’installa à la Chapelle Cristo Obrero (la chapelle du Christ ouvrier), dans un bidonville baptisé Villa 31, dans le quartier de Retiro. C’est là que repose ses restes depuis 1999.
Avec sa hiérarchie, notamment avec le cardinal Juan Carlos Aramburu (autre grande famille de l’élite argentine), alors archevêque de Buenos Aires, il eut des relations difficiles mais il se maintint toujours dans l’obéissance ecclésiale. L’Archevêque essaya plusieurs fois de lui faire renoncer à son engagement social au profit des habitants du bidonville mais n’y parvint jamais. Le père Mugica jouissait d’une grande popularité qui le protégeait quelque peu.
Il fut néanmoins assassiné par un homme de main de la Triple A, cette milice fondée probablement par Isabel Perón, dans les 6 mois que dura le dernier mandat de son mari en 1973, au retour d’exil. La Triple A (Alliance Argentine Anti-communiste) traquait à travers tout le pays les militants révolutionnaires de gauche que Perón et sa femme, encore plus peut-être, estimaient être à la solde de l’Union Soviétique, leur ennemie au même titre que les Etats-Unis d’Amérique.
En ces jours anniversaire, la seconde édition de la première biographie du Padre Mugica sort dans les librairies. L’ouvrage s’intitule Entre dos fuegos (entre deux feux, sous entendus celui de la Triple A et celui des Montoneros), avec en sous-titre Vida y asesinato del padre Mugica. Il est publié par la Editora Patria Grande. Son auteur, le journaliste Martín de Biase, présentera le livre demain, mardi 12 mai, à 18h30, à l’Auditorio Manuel Belgrano, rue Esmeralda 1212, dans le quartier du Retiro, tout près de la Plaza San Martín.
Página/12, sous les plumes respectives de Cristian Vitale et de Washington Uranga, consacre deux longs articles à cette personnalité devenue une légende. Le 10 mai, Washington Uranga rappelle le parcours personnel, politique et social, du prêtre et le 11 mai, Cristian Vitale interviewe Martín De Biase sur son livre, en avant-première de la conférence qui aura lieu demain à Manuel Belgrano.
En savoir plus :
Lire l’article de Página/12 du 10 mai 2009
Lire l’article de Página/12 du 11 mai 2009