Depuis plus de deux ans maintenant, le chanteur Cucuza (Hernán Castiello) et son partenaire, le guitariste Moscato (Maximiliano Luna) animent presque tous les vendredis soir une soirée musicale, baptisée El Tango vuelve al Barrio (ETvaB pour les intimes), au Bar El Faro, situé à deux pas de chez Cucuza qui est urquenze jusqu’à la moelle (habitant de Villa Urquiza).
Jusqu’à présent, la communication faite par Cucuza laissait planer la confusion géographique, Cucuza adorant parler de son quartier et en vanter les charmes (indéniables, soit dit en passant). Mais le Bar El Faro, fondé en 1931 comme le dit son enseigne fileteada qui apparaît sur l’affiche ci-jointe, donne sur un carrefour entre deux avenues qui font office de délimitation cadastrale (esquina La Pampa et Constituyentes) : d’un côté le quartier de Villa Urquiza et de l’autre celui de Villa Pueyrredón (1). Et El Faro est incontestablement du côté Pueyrredón. A 10 mètres près, il était à Villa Urquiza mais ces 10 mètres-là font toute la différence. Donc l’affiche mentionne désormais sans ambiguïté cette allégeance au quartier de Villa Pueyrredón. Il faut dire que El Faro est sur une liste de cafés qui pourraient se voir distingués prochainement par le Gouvernement de la Ville de Buenos Aires ou par la Legislatura. Alors, plus question de rigoler avec la réalité du cadastre, non mais !
Sur ce, comme vous le voyez sur l’affiche, Cucuza et Moscato recevront demain soir leur ami Hernán Genovese, un autre chanteur, ainsi que deux autres guitaristes, Corniglio et Nacho Izurubieta qui formeront un trio avec Moscato.
Vous y allez à 21h30 pour avoir le temps de commander votre pizza ou vos empanadas et vous empiffrer avant le concert (allez-y à temps, sinon je vous promets que vous ne pourrez pas vous asseoir. Les soirs de concert, c’est plein de chez plein). Et une personne de confiance passera de table en table récolter les 20 $ du droit du spectacle par personne, avant que les vedettes ne fassent leur apparition, chaleureusement applaudies par un public convivial d’habitués qui habitent le quartier pour beaucoup d’entre eux (il faut bien que les musiciens vivent).
Comme toujours, je vous invite à prendre connaissance des autres articles de Barrio de Tango sur ces artistes en cliquant sur leur nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search ci-dessus ou dans la rubrique Vecinos del Barrio dans la Colonne de droite. Vous trouverez également dans la Colonne de droite, dans la partie inférieure, les liens qui vous conduiront à leur site ou à leur page Myspace, ce qui vous permettra de les écouter.
(1) Pour vous aider à retenir et à situer ces noms exotiques en diable, les deux bonhommes qui donnent leur nom à ces quartiers sont des héros du 19ème siècle argentin. Pueyrredón était un général de la guerre d’indépendance. Il s’est d’ailleurs un temps exilé en France comme San Martín, mais lui est rentré en Argentine sur la fin car il voulait mourir dans son pays. Son fils unique, Prilidiano Pueyrredón (encore un nom à coucher dehors) s’était formé à l’ingénierie et à l’architecture à l’Ecole Polytechnique à Paris et de retour à Buenos Aires, il s’est illustré dans différents ouvrages d’art et bâtiments prestigieux (la résidence présidentielle de Olivos est de lui) et comme artiste peintre. A ce titre, Peyrredón fils est considéré comme le fondateur de la peinture classique argentine. Son oeuvre picturale rend témoignage au petit peuple, en particulier aux gauchos dans la Pampa et au phénomène tout juste commençant des faubourgs à Buenos Aires. Il est aussi connu pour des nus passablement lascifs qui firent scandale en leur temps, comme à la même époque à Paris la peinture de Courbet. Urquiza est quant à lui un héros plus tardif. Il apparaît à peu près lorsque le général Pueyrredón rentre à Buenos Aires pour s’éteindre. Urquiza était Gouverneur de la province d’Entre-Ríos, au nord de Buenos Aires, entre le Paraná et l’Uruguay. En 1852, il s’allia avec les Brésiliens et les Uruguayens pour déclarer la guerre au Gouverneur de la Province de Buenos Aires, Juan Manuel de Rosas, qui menait une politique peu favorable aux intérêts des provinces de l’Intérieur argentin. Il vainquit Rosas à Monzón, à l’ouest de la capitale, le 3 février 1852, et s’empara du pouvoir national. C’est cette victoire à cheval entre la guerre civile et la guerre étrangère que rappelle le Parque del 3 de Febrero à Palermo, dans le nord de Buenos Aires, et sa personne qu’honore ce quartier excentré, situé dans la partie ouest de la capitale.