Après plus de 18 mois de conflit tantôt larvé tantôt ouvert entre le gouvernement argentin et le secteur agricole, la Présidente, Cristina Fernández de Kirchner, et son nouveau Premier Ministre, Aníbal Fernández (pas de lien de parenté entre eux), ont décidé d’élever au rang de Ministère ce qui n’était jusqu’à présent qu’un Secrétariat d’Etat.
En Argentine, les Ministères sont fixes, de mandat en mandat. Ils ne changent pas en fonction des analyses stratégiques personnels du Chef de l’Etat récemment élu ou du Premier Ministre sorti des récentes élections. Pour les Argentins, ce changement correspond donc à la création d’un Ministère. Et cette création s’accompagne d’un changement de titulaire. C’est un ancien maire (intendente) de la ville rural de Chacabuco, dans la Province de Buenos Aires, et actuel député du Partido Justicialista (PJ) à la Legislatura bonaerense (l’assemblée législative de la Province de Buenos Aires) qui prête serment à 16h30, heure locale, dans les mains de la Présidente, Julián Domínguez (1). Le nouveau ministre aura sous sa responsabilité l’agriculture, l’élevage, la pêche et l’alimentation, ce qui est cohérent avec la politique constante de la Présidente qui estime que les décisions contestées qu’elle a prises dans ce domaine dès le début de son mandat sont dictées par la préoccupation d’assurer l’autosuffisance alimentaire de la population en la privilégiant par rapport à l’enrichissement du secteur par le biais des exportations.
Les caciques du secteur agricole, qui représentent leurs différentes organisations professionnelles au sein de la Mesa de Enlace (la table de coordination), sont invités à la cérémonie à la Casa Rosada. La Mesa de Enlace est une alliance stratégique et inédite de tout le secteur en vue d’organiser la résistance à la politique agricole de l’actuel Gouvernement, concrètement pour lutter contre la politique fiscale qui tend à taxer les exportations de soja et d’une moindre mesure de viande et de céréales. La culture du soja est devenue aujourd’hui majoritaire en Argentine en terme de surface de terres ensemencées, au détriment, pense le Portègne de la rue, de l’élevage, ce qui expliquerait, d’après la vox populi, l’enchérissement de la viande...
Il reste à voir si ce changement de statut et de personne permettra de renouer un dialogue civique et politique complètement rompu, tout autant que le dialogue avec l’opposition parlementaire entamé au lendemain des élections législatives du 28 juin.
(1) Le PJ est le parti auquel appartient la Présidente qui a resserré son gouvernement sur sa propre formation politique.