Le vendredi soir, le chanteur Cucuza et le guitariste Moscato nous ont habitués (dès les premiers billets de ce blog) à leur concert hebdomadaire à El Faro, café-restaurant installé sur la frontière entre le quartier de Villa Urquiza, où habite Cucuza, et celui de Villa Puyerredón, où Cucuza n’habite pas (se reporter à tous mes articles sur la série de concerts El Tango vuelve al Barrio ou ETvaB). Mais ce vendredi (30 octobre) à 21h30, c’est à la Boca, au Malevaje Arte Club, avenue Garibaldi 1670 (à 200 mètres de Caminito, précise l’annonce) que le duo se produira. Entrée à 15 $.
Ils étaient déjà au Malevaje Arte Club vendredi dernier, comme invités du Cuarteto Típico Catenacho (voir mon article à ce sujet).
Ci-dessous, je vous livre (en version bilingue, comme d’habitude) l’annonce, toujours bien tournée et drôle, lancée par Cucuza à sa liste de diffusion :
Cantor y Guitarrista van a seguir haciendo/presentando lo que vienen presentando/haciendo desde hace 2 años en aquel Bar de "Villa Urquizadón", lo que pronto darán a luz en forma de disco, disco EN VIVO Tangos "tradicionales" y las comillas quieren decir que esos Tangos no serán los increíbles y tan cantados "Pasional" o " Sur" precisamente, sino que escarvando un poquito más llegarán hasta "Viejas alegrias", "Barrio viejo", "El adios", "Farolito de papel", "Olvido" entre otros miles... Tan simple, honesto, directo y sanguineo como un Cantor y un Guitarrista haciendo esos Tangos...
No nos vengan con que es lejos, que es fin de mes y esa gilada (si vivimos en fin de mes desde principio de mes...!) Los esperamos en ese lugar increíble que es "El Malevaje Tango Club"...
(Hernán Cucuza Castiello)
Chanteur et Guitariste continuent d’interpréter/présenter ce qu’ils présentent/interprètent depuis maintenant 2 ans dans ce fameux Bar de "Villa Urquizadón", ce que bientôt ils mettront au jour sous forme de disque. De disque EN PUBLIC (1). Des tangos "traditionnels" et les guillemets veulent dire que ces Tangos ne seront pas exclusivement (2) les fantastiques et si souvent chantés Pasional ou Sur mais en grattant un petit peu plus, on arrivera jusqu’à Viejas alegrias, Barrio viejo, El adiós, Farolito de papel (3), Olvido parmi des milliers d’autres... Aussi simple, aussi honnête, aussi direct et aussi bouillant qu’un Chanteur et un Guitariste interpétant ces Tangos...
Et ne venez pas nous dire que c’est loin (4), qu’on est à la fin du mois et toutes ces âneries (de toute façon, la fin du mois, c’est dès le premier !). Nous vous attendons dans cet endroit fantastique qu’est le Malevaje Tango Club... (5)
(Traduction Denise Anne Clavilier)
Voilà, le tango à Buenos Aires, c’est ça !
(1) J’ai consacré un article en août à la soirée d’enregistrement de ce disque. Malheureusement, l’occasion a été gâchée par la présence d’un ivrogne très bruyant et qui avait plutôt le vin méchant. Cucuza et Moscato ont donc dû répéter l’opération le vendredi suivant, en faisant revenir à El Faro ceux de leurs invités qui pouvaient encore se libérer, parce que l’enregistrement était difficilement exploitable (on y entendait à peu près sur tous les morceaux les braillement de Miguelito). Cucuza m’a expliqué que la deuxième soirée s’était mieux passée. Miguelito était bien là encore une fois mais pas seul et ses amis l’ont empêché de perturber les artistes comme il l’avait fait la première fois. Le disque est en cours de montage et de mixage. Il sortira donc bien, malgré l’incident qui a dérangé les musiciens plus que les spectateurs.
(2) precisamente traduit par exclusivement. Comme quoi, le langage parlé, la langue de tous les jours se caractérise par son manque de précision et ses approximations. Et toute la difficulté de la traduction ici, c’est de trouver précisément l’approximation qui rendra le plus justement possible la nuance de la langue originelle. En français, l’expression "pas précisément" signifie "tout à fait à l’inverse", "tout au contraire". Ce qui n’est pas du tout la pensée de Cucuza. Ne serait-ce que parce qu’il sait mieux que personne que Pasional et Sur ne sont pas au même niveau dans le classement des tangos inscrits au répertoire de tout le monde.
(3) Farolito de papel, de Teófilo Lespés pour la musique et Francisco García Giménez pour les paroles, est sans doute l’un des tangos préférés du répertoire de Cucuza.
(4) La Boca est un quartier totalement excentré de Buenos Aires, tout au sud, coincé entre le Río de la Plata à l’est et le Riachuelo à l’ouest. C’est probablement le lieu de la fondation de la toute première Buenos Aires, par Pedro de Mendoza en 1536 (voir mon article sur la fondation de Buenos Aires). La plupart des spectateurs habituels du vendredi soir à El Faro habitent au nord-ouest de Buenos Aires, du côté de Villa Urquiza et de Villa Pueyrredón, c’est un public d’habitués qui viennent là en voisins pour la majorité d’entre eux. Regardez une carte de Buenos Aires, vous allez constater que pour eux, La Boca, c’est le bout du monde !
(5) Ce n’est pas pour rien que cette salle installée là où elle est installée porte ce nom : Malevaje est un tango composé par Juan de Dios Filiberto et écrit par Enrique Santos Discépolo en 1928, alors que tous les deux partageaient les mêmes idéaux anarchistes. Juan de Dios Filiberto est le local de l’étape : il est né (le 8 mars 1885), il a vécu toute sa vie et il est mort à La Boca le 11 novembre 1967... Dès 1932, il a élu définitivement domicile dans une maison de la rue Magallanes, au n° 1140, dont la façade a été peinte par son ami et voisin boquense, Benito Quinquela Martín, dont la maison, aujourd’hui un musée, est voisine de Caminito, autre tango de Juan de Dios Filiberto (avec des paroles de Gabino Coria Peñalosa). Cette maison de la rue Manganalles a été récupérée par la Ville de Buenos Aires en 2007qui l’a inscrite à son Patrimoine culturel. Juan de Dios Filiberto est aussi le fondateur de la Orquesta Nacional de Música Argentina Juan de Dios Filiberto, un nom qui lui a été accordé bien longtemps après la mort de son fondateur.