C'est le dessin de l'édition d'aujourd'hui sur Página/12, le quotidien qui empêche de penser en rond, qui casse les clichés bien pensants et secoue tous les cocotiers du conformisme intellectuel. (1)
La domestique se plaint : "Et pour finir, tu penses bien, celle qui fait le ménage, c'est moi !"
Le dessin d'aujourd'hui reprend l'image traditionnelle de la Plaza Mayor, pleine de monde, le 25 mai 1810, où la foule, comme j'ai tenté de le raconter hier à travers le 8ème et dernier épisode de ma série Il y a deux cents aujourd'hui, est représentée comme masculine et blanche. Mais dans la Buenos Aires de 1810, on estime qu'il y avait un tiers de noirs. Des esclaves bien sûr. Tous exclus de la vie politique. Il y avait aussi des femmes. Sans doute la moitié de la population alors (ce ne sera plus le cas cent ans plus tard, mais en 1810 c'est toujours le cas).
Or la mémoire de l'esclavage et de la culture noire est un grand tabou de l'histoire officielle enseignée traditionnellement à l'école publique, mise en place en 1883 grâce au travail de Domingo Faustino Sarmiento, l'un des leaders politiques de l'européanisation de l'Argentine et de la disparition politique de la culture noire dans cette société...
Le dessin est aussi une allusion aux fêtes d'hier et aux travaux de propreté qu'il a sans doute fallu réaliser ce matin, tant sur Plaza de Mayo, devant ce qui reste du Cabildo, qui a servi d'écran géant à un gigantesque film couleur original célébrant le Bicentenaire de la Révolution dans la nuit d'hier, et sur la portion de la Avenida 9 de Julio qui a accueilli depuis vendredi soir le Paseo del Bicentenario...
A méditer.
(1) La rédaction du quotidien a consacré hier et ces derniers jours plusieurs articles aux Amérindiens du nord et du sud du pays et à leurs revendications politiques et sociales dans le cadre de ses études de fond et d'actualité sur la célébration du Bicentenaire.