Alejandro Picciano n’est pas seulement le guitariste de talent que je vous ai décrit il y a quelques jours, c’est aussi un cuisinier carabiné (1) qui m’a confié, pour cette Semaine du goût en France, sa recette de Pastel de papas (à la mode de Cuyo, une ville de l’intérieur de l’Argentine) (2).
Il me communique les précisions suivantes :
1) Il s’agit d’une recette de sa grand-mère (donc c’est forcément bon)
2) Les proportions sont indiquées au pif (un poco a ojo) et pour "4 tipos con hambre o 6 humanos con cierta decencia" (3).
Commencer par réaliser une farce pour empenada criolla
(et moi, de mon côté, je fais d’une pierre deux coups : je vous livre l’un des secrets de la fascination discepolienne pour les empenandas, cf. l’article de mercredi dernier. Pour le retrouver, cliquer sur les mots-clé Semaine du Goût ou Gastronomie).
600 grammes de viande de boeuf hachée à la main, de préférence au grand couteau (4) (ce sera plus goûteux que du bifteck haché de boucherie, dont le peu de tenue à la cuisson fera perdre du corps à cette recette)
2 très gros oignons (ou 3 pas trop grands, ou 4 petits etc. Je ne fais que traduire)
1 poivron rouge
3 gousses d’ail
1 poignée de raisins secs.
Cumin, paprika (de préférence du pimentón dulce ou de la ñoria écrasée que vous trouverez dans une épicerie fine ou un bazar spécialisé en produits méditerranéens. Note de la traductrice), sel, origan et 1 feuille de laurier.
Laisser tremper l’oignon dans de l’eau bien chaude
Hacher très fin l’oignon (sorti de l’eau), l’ail et le poivron.
Faire revenir dans une casserole avec un bon fond d’huile d’olive (n’utiliser pas une poêle, elle vous ferait perdre des sucs à cause de la grande surface d’évaporation, note conjointe d’Alejandro et Denise Anne)
Quand l’odeur vous met l’eau à la bouche (cuando empieza a dar hambre el olorcito), ajouter la viande avec le cumin et le paprika (selon votre goût).
Eteindre le feu avant que la viande se mette à cuire et jeter les raisins secs (sinon la viande arriverait sur la table trop cuite et très sèche. Note de la traductrice).
Faire une purée de pommes de terre et de patates douces (pure en Argentin)
Vous avez besoin de 3 grosses pommes de terre à purée, 2 patates douces (blanches ou roses), un peu de lait froid, un peu de beurre, de la noix de muscade et du sel.
Cuire les pommes de terre et les patates épluchées à l’eau puis les passer au presse-purée et accommoder avec le lait et le beurre (n’employez pas le mixer, il donnerait à la préparation une texture collante et caoutchouteuse, peu agréable en bouche -note de la traductrice).
Assaisonner avec sel et muscade.
Préparer une pâte à empanada :
300 grammes de farine,
1 cuillère à soupe d’huile d’olive,
1 cuillère à moka de sel,
1 morceau de beurre ou de margarine,
1 verre d’eau bien chaude (mais pas bouillante).
Pétrissez la farine en y ajoutant progressivement tous les ingrédients jusqu’à obtenir une boule de pâte bien ferme qui ne colle plus aux mains (ou alors mettez des gants en caoutchouc ! je traduis). Puis étendez la pâte au rouleau à pâtisserie le plus finement possible (jusqu’à tomber raide mort, conseille Alejandro).
Faites préchauffer votre four (bien caliente : comptez 180-200°)
Dans un plat allant au four ou directement sur une plaque à pâtisserie préalablement graissé(e), disposez votre pâte à empanada dûment étalée,
sur la pâte crue déposez la farce de viande en allant du centre vers les bords (pour que le jus ne se répande pas dans toute la maison, dixit Alejandro),
laissez à découvert un bandeau de pâte tout autour, couvrez la garniture de viande avec el pure (c’est du masculin en Argentine) et saupoudrez-le de sucre et de cannelle pour le faire gratiner,
rabattez les bandeaux de pâte par-dessus el pure en laissant néanmoins un bon cercle de pure apparent (il faut laisser la vapeur s’échapper pendant le passage au four -note de la traductrice), badigeonnez au jaune d’oeuf et enfournez.
Sacar antes de que la masa tome un color negro sospechoso o escuchen la sirene de los bomberos
Sortir du four avant que la pâte ait pris une couleur noire suspecte ou qu’on entende la sirène des pompiers...
Recette d’Alejandro Picciano (guitariste de tango de Caballito installé à Madrid).
Gracias, Alejandro!
Traduction Denise Anne Clavilier
A servir chaud et à manger sans faim.
Vous pouvez aussi présenter ce plat en format individuel ou en papillotes.
Comme Alejandro tient sa guitare avec la même dextérité qu’il manie ses casseroles, ce garçon n’est pas un manche ! Après avoir goûté et apprécié sa cuisine, précipitez-vous donc sur les concerts de sa tournée avec la chanteuse Mariel Martínez (Berlin, Paris, Salamanca, Vigo, Madrid) ou sur leur disque, De mi barrio (Melopea discos). C’est tout chaud, ça vient de sortir.
(1) Il a donc deux casquettes. Giro idiomático : literalmente se traduce "tener dos gorras". Es decir manejar dos papeles distintos sin vinculación lógica entre si, el de jefe de estación y el de presidente del fútbol club, cada uno con su gorra simbólica.
(2) ce qu’on pourrait traduire par Tourte de pommes de terre quand on la cuit dans une pâte (comme ici) ou hachis Parmentier, quand on le cuit directement dans le plat (comme j’ai pu le déguster l’année dernière chez Walter Alegre, de la Ciudad del Tango, CCC Floreal Gorini, fameux cuisinier lui aussi).
(3) Kit de traduction : Hambre : faim. Tipos : remplacez le i par un y et vous aurez le mot français. Cierta : ici, à traduire par "certaine" sans se poser de question. Decencia : j’aurai celle de ne pas vous faire l’injure de vous donner une traduction...
(4) comme pour préparer un filet américain. Je cause aux Belges, les Français ne connaissent pas le Filet Américain... Il y a plein de trucs d’ailleurs que les Français ne connaissent pas de la cuisine belge, qui vaut pourtant l’aller-retour en TGV !!!!!