Toutes les quinzaines, Luis Alposta publie sur le site du journaliste Marcelo Villegas une vignette littéraire qui appartient à une série d’instantanés touchant à tous les domaines de la vie à Buenos Aires intititulée Mosaicos Porteños (un titre qui se passe de traduction pour des francophones).
Il y a quelques jours, le nouvel article de la série a été publié. Son titre : Au sujet de l’éléphant. C’est une fantaisie sur les expressions idiomatiques en usage en Argentine et qui intègre le nom de ce pachyderme aussi exotique pour les Argentins que pour les Européens.
Luis a illustré ce billet de deux photos souriantes de lui en 1981 dans les jardins d’un hôtel de New-Dehli, où on le voit en contemplation devant l’un des spécimens de la race domestique asiatique...
Et une fois n’est pas coutume, comme les expressions idiomatiques portègno-argentines sont singulièrement similaires à leurs cousines françaises, je vous épargne la danse visuelle habituelle, un coup à gauche, un coup à droite, pour vous laisser face à face avec la bête en VO... On va bien voir si vous vous débrouiller... Pour info, vous disposez d’un dictionnaire Wordreference, dans la rubique Cambalache (casi ordenado), dans le bas de la Colonne de droite.
Et si vraiment vous ne voulez pas jouer le jeu, vous avez même un traducteur automatique (Reverso), dans la même section de la même rubrique. Mais ce n’est pas la peine d’ouvrir Reverso. Les appels de note alphabétiques vous renvoient en toute fin d’article à des traductions que je vous propose. Tout en bas de l’article pour que ceux de mes lecteurs qui ont envie de jouer le jeu n’aient pas la solution immédiatement sous les yeux (il va falloir utiliser l’ascenseur situé sur le côté droit de ce blog, sous Explorer en tout cas).
Un elefantólogo (1) amigo solía decir que cada elefante tiene su frase según el color (2) o el lugar en que se encuentra. Y tenía razón. (a)
La expresión “elefante blanco” alude a cosa muy cara, a cosa que cuesta mucho mantener; a posesiones que tienen un costo de manutención mayor que los beneficios que aportan. (b)
En cambio, recurrir a la imagen de “un elefante en un bazar” (3) es hacer referencia a un botarate; a la manifiesta torpeza de alguien que puede ser lesivo en determinado lugar o circunstancia. Y cosa muy distinta es hablar de “pata de elefante” (4), que es como popularmente se llamaban a los pantalones Oxford, aquellos que estuvieron de moda en los años 60. (c)
En cuanto al elefante como amuleto, recordemos que tiene una procedencia hindú que surge de la leyenda de Ganesha, el dios con cabeza de elefante, hijo del dios Siva y la diosa Parvati. Un dios al que solían invocar no sólo mercaderes y comerciantes sino, también, literatos y poetas en busca de inspiración. (d) (5)
Durante la primera mitad del siglo XX el elefante “de la buena suerte” adquirió fama en el mundo occidental, representándoselo en posición de marcha y con la trompa levantada y doblada hacia atrás, como impidiendo que la buena suerte se escapara. (e)
Y tener “memoria de elefante” (6) es recordar, entre otras muchas cosas, los versos de El elefante Trompita, la popular canción infantil de Tito Alberti compuesta en 1947. Y es, también, recordar aquellos versos del tango "En un corsito de barrio", de Yiso y Aznar, que dicen: (f)
Cuando la vi peligrosa
le dije en tono galante:
-Mañana, mi sol brillante,
¿dónde la puedo encontrar?
-¿Mañana? En el Shangri-La.
¡Soy la mujer elefante!
[musique de Abel Aznar, paroles de Reynaldo Yiso]
Et là, je ne traduis rien de rien, même pas en note : je l’ai déjà fait ailleurs. Dans Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, publié le 3 mai 2010 aux Editions du Jasmin. Une anthologie pour laquelle Luis Alposta m’a justement fait l’honneur et l’amitié de rédiger une postface en p 342.
Dans Barrio de Tango, cette letra apparaît cependant sous un titre légèrement différent : En el corsito del barrio (dans le défilé [de carnaval] de mon quartier), une histoire pas sérieuse pour deux sous avec un chute burlesque et inattendue qui m’avait bien fait rire quand j’avais découvert ce tango, un jour de 2007, grâce à la programmation matinale de La 2 x 4, la radio publique 100% de Buenos Aires (dont vous avez le lien dans la rubrique Ecouter, dans la partie inférieure de la Colonne de droite).
Pour en savoir plus sur Luis Alposta, cliquez sur son nom dans le bloc Pour chercher, para buscar, to search, ci-dessus : vous ouvrirez ainsi l’ensemble des articles que j'ai publiés et qui se rapportent aux activités et à l'oeuvre de ce poète, essayiste et conférencier argentin.
Pour lire directement l’article et voir les photos (et visionner aussi le long clip choreographique mexicain qui les accompagnent), cliquer sur le lien vers Mosaicos Porteños de Noticia Buena.
Pour en savoir plus sur Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, cliquez sur ce lien ou sur ceux que vous trouverez tout en haut de la Colonne de droite.
(1) néologisme alpostien.
(2) et pourtant il n’est pas question dans ce billet de petits éléphants roses...
(3) lo mismo existe en francés : un éléphant dans un magasin de porcelaine
(4) también en francés existe lo mismo : "pantalon à pattes d’éléphant" o aún mejor dicho en el habla de cada día : "pantalon à pattes d’éph".
(5) Voir les photos qui illustrent l’article. Sûr que Luis pense à lui-même !
(6) Exactamente igual en francés : "mémoire d’éléphant". Significa lo mismo.
(a) Un éléphantologue de mes amis disait souvent que chaque éléphant a sa phrase en fonction de la couleur ou du lieu qui est le sien. Et il avait raison.
(b) L’expression éléphant blanc fait allusion à une chose très chère, à une chose très coûteuse à entretenir, à des biens qui ont un coût d’entretien plus élevés que les bénéfices qu’ils rapportent.
(c) En revanche, recourir à l’image d’un éléphant dans un bazar, c’est faire référence à un brise-tout, à la maladresse manifeste de quelqu’un qui peut se montrer destructeur dans un lieu ou des circonstances déterminé(e)s. Et c’est tout autre chose de parler de patte d’éléphant, car c’est la manière populaire de nommer les pantalons Oxford, ceux-là mêmes qui étaient à la mode dans les anées 60.
(d) Quant à l’éléphant amulette, rappelons qu’il procède de l’hindouisme qui surgit de la légende de Ganesh, le dieu à tête d’éléphant, fils du dieu Shiva et de la déesse Parvati. Un dieu qu’invoquaient souvent non seulement des marchands et des commerçants mais aussi des lettrés et des poètes en quête d’inspiration.
(e) Pendant la première moitié du 20e siècle, l’éléphant porte-bonheur a acquis son renom dans le monde occidental, qui le représente en train de marcher et la trompe levée, tournée vers l’arrière, comme pour empêcher que la chance s’échappe.
(f) Et avoir une mémoire d’éléphant, c’est se souvenir, au milieu de beaucoup d’autres choses, les vers de l’Eléphant trompette, la chanson d’enfant bien connue de Tito Alberti composée en 1947. Et c’est aussi se souvenir de ces vers du tango En un corsito de barrio, de Yiso et Aznar qui disent :
(Traduction Denise Anne Clavilier)