samedi 19 juin 2010

La Academia Nacional del Tango souffle ses 20 bougies avec le Plenario exceptionnel de lundi [à l'affiche]

La Academia Nacional del Tango a été fondée le 28 juin 1990, c'est l'une des rares occurrences dont les Argentins ont lieu de se réjouir lorsqu'ils repassent en souvenir les deux mandats présidentiels de Carlos Menem. Le lundi 21 juin 2010, cette institution célébrera donc cet anniversaire dans ses locaux de la Avenida de Mayo, dont je vous ai si souvent parlé ici.

Ce sera un Plenario. Donc début à 19h30 comme d'habitude. Entrée libre et gratuite comme toujours. Un tango rituel, une conférence et un espace artistique pour finir avec, en passant, (et ça n'arrive pas tous les lundis de Plenario) la remise de deux diplômes (je vous explique ce dont il s'agit dans deux minutes...)

Là où l'on sortira de l'ordinaire, c'est avec le tango rituel. Il s'agira de Fábula para Gardel (1), musique de Astor Piazzolla et texte (en vers libres) de Horacio Ferrer... récité de vive voix par... Horacio Ferrer himself et en personne... Alors là, si vous êtes à Buenos Aires, n'hésitez pas un quart de seconde : vous annulez tout ce que vous aviez déjà prévu et vous y allez. De toute manière, ce ne sera pas l'heure du match (vous n'imaginiez tout de même pas qu'un Plenario pouvait se tenir en même temps qu'une rencontre quelconque de coupe du monde !)

Après le tango rituel, il y aura donc cette double remise de diplômes. En fait, en Argentine, un diplôme c'est un très beau papier, qu'il faut encadrer dans son bureau, et qui dit quelque chose comme : Telle institution à Monsieur ou Madame X pour le travail qu'il (elle) a accompli à telle occasion. Le tant.

Et en l'occurrence, les deux diplômes sont des documents émanant de la Legislatura Porteña qui ont été votés à l'initiative du député Raúl Puy et qui disent :

La Legislatura de la Ciudad de Buenos Aires,
a la Academia Nacional del Tango
en el 20º aniversario de su fundación.
28 de junio de 2010

Vous avez déjà compris : La Chambre législative de la Ville de Buenos Aires à la Academia Nacional del Tango (je ne traduis pas) pour le 20ème anniversaire de sa fondation. 28 juin 2010.

La Legislatura de la Ciudad de Buenos Aires,
a Horacio Ferrer,
creador y primer presidente
de la Academia Nacional del Tango
en el 20º aniversario de su fundación
–28 de junio de 2010–

C'est la même chose. On a juste ajouté (mais vous le saviez déjà si vous êtes un lecteur régulier de Barrio de Tango, ce blog), que Horacio Ferrer est le créateur (le fondateur) et le premier président de l'institution.
Et ça fait 20 ans que ça dure et ce n'est pas nous qui nous en plaindrons.

Après cette émouvante cérémonie (je mets ma main au feu qu'elle sera émouvante, vu la difficulté que ça a été, de la fonder, cette Académie nationale !), Horacio Ferrer prendra la parole en qualité de conférencier de la soirée et il parlera des Voix et des styles prégardéliens jusqu'en 1917 (2). Vous allez apprendre plein de choses sur José Betinotti, sur Gabino Ezeiza, sur Angel Villoldo, sur Alfredo Gobbi père, sur Pascual Contursi et d'autres chanteurs et chanteuses dont les enregistrements grésillent à n'en plus finir. En fait, lorsque l'on dit que le tango-canción commence en 1916 avec Mi noche triste, c'est une facilité de langage. Il y a eu des tangos à texte un peu avant. En fait, ce qui permet de date de 1916 la naissance du tango canción, c'est l'adoption par Carlos Gardel de ce tango qu'est Mi noche triste (musique de Samuel Castriota et paroles de Pascual Contursi) parce que c'est à partir de ce moment-là que Gardel se lance dans le tango et va provoquer la création de ce qui est maintenant devenu le répertoire, en allant chercher, parfois manu militari, des poètes de grande qualité comme Contursi lui-même, Celedonio Flores, Enrique Cadícamo, Homero Manzi et autres Enrique Santos Discépolo qui sont les pères du tango, comme on parle des Pères de l'Eglise...

L'espace artistique est confiée à Hilda Herrera qui enseigne à la Academia Nacional del Tango et qui interprétera au piano des oeuvres du répertoire de Gardel, qui a donné son nom au siège de la Academia Nacional del Tango : Palacio Carlos Gardel.

(1) C'est une merveille de conte qu'un père raconte à son fils au sujet de Carlos Gardel. Impossible de ne pas sentir que c'est son père que Horacio Ferrer a fait parler, son père qui était un excellent professeur d'histoire qui a laissé des souvenirs vifs tant chez ses élèves que chez son fils. Et puis il y a un autre point qui mérite d'être souligné dans ce texte à la poésie exceptionnelle : Horacio Ferrer parvient à ne prendre aucun parti sur la querelle du lieu de naissance de Carlos Gardel, une querelle qui divise profondément ses deux pays, l'Uruguay où il est né et l'Argentine dont sa mère était originaire et où il vit depuis la fin des années 60. Au dessus de son bureau, à la Academia Nacional del Tango, il y a un gigantesque portrait de Carlos Gardel d'un côté et un autre, tout aussi, immense, de Aníbal. Les souvenirs de Astor Piazzolla sont sur un autre mur.
(2) Mutatis mutandis et toute révérence gardée envers le Maestro, votre servante causera d'à peu près la même chose à Paris mais en français : du tangó au tango, des origines à Gardel, pour la fête de la musique, le même jour, lundi 21 juin 2010, à peu près à la même heure (sauf décalage horaire), à 18h (là, en revanche, ça s'approchera de l'heure du match Suisse-Chili. Donc pour les Suisses et les Chiliens qui vivent à Paris....), et ce sera aussi entrée libre et gratuite. Avec un espace artistique puisqu'un orchestre d'enfants et d'adolescents devraient venir nous jouer du tango. Pourtant, je n'ai pas copié. C'était décidé bien avant avec la patronne de la librairie Pippa, 25bis rue du Sommerard, dans le Quartier Latin, qui est à Paris aux yeux des Portègnes ce que la Avenida de Mayo est à Buenos Aires...