Un juge fédéral vient d’inculper un officier de la Marine du temps de la Dictature et le fils d’un autre militaire, d’un represor (un tortionnaire, comme on dit là-bas), pour s’être emparé, pendant la sinistre période 1976-1983, des biens de disparus emprisonnés et sans doute assassinés dans les murs de l’ESMA, une école de mécanique de la Marine, convertie alors en centre de détention clandestin et de torture et devenue, le 30 septembre 2007, un musée de la Mémoire.
Le chef d’inculpation retenu contre les deux hommes est celui de crime contre l’humanité (lesa humanidad). Du point de vue du droit international, c’est un intitulé plus recevable que celui de génocide (qui a déjà été utilisé dans les verdicts), puisque avoir fait cela à un seul être humain (et en l’occurrence, il n’y en a pas qu’un seul), c’est bien, de la part d’un Etat et de ses serviteurs, l’avoir fait à toute l’humanité.
Cinq autres criminels, tous membres de la Marine (marinos), sont actuellement sous le coup d’une inculpation de même nature et devraient prochainement passer en jugement, le magistrat venant de clore l’instruction les concernant.
Lors d’un procès qui s’est tenu l’année dernière, l’enquête et les débats ont fait apparaître qu’il a en effet existé, au moins au sein de la Marine sinon au sein de toutes les Armes, un plan concerté pour arrêter des personnes et les dépouiller de leurs biens ("para capturar víctimas y desapoderarlas de sus bienes" selon les termes du verdict émis par le tribunal).