Les deux fondateurs sur une photo publiée par... Clarin !
Página/12 interviewe aujourd’hui Los Hermanos Butaca, quatuor qui compose, joue et met en scène un tango quelque peu décoiffant si on ose cette image à leur égard. A la thématique volontairement nostalgique et éminemment triste qui marque la tradition du genre, ils préfèrent l’humour, l’absurde, le non-sens, le saugrenu et font passer à travers les jeux de mots bouffons et les coqs à l’âne branquignols une réflexion très tanguera et donc très profonde sur la vie, la politique, la société, réflexion volontiers dérangeante pour qui veut bien dépasser le premier degré et aussi peu optimiste que l’apparence et la présentation en sont désopilantes... Eux-mêmes parlent d’humour triste et revendiquent un tango sans macho (le gars qui a quelque chose dans le pantalon, lui, au moins !), sans farolito (la lanterne, le réverbère qui symbolisent le caractère essentiellement urbain du genre), sans llanto (sans sanglot, le troisième ingrédient de base du tango).
Ils viennent du rock et disent s’être convertis au tango après s’être lassés de faire de la musique sérieuse (à contre-courant là encore des idées reçues, le tango passant pour beaucoup plus sérieux, sévère, bref pas rigolo, que le rock, réputé plus optimiste comme tout ce qui vient des Etats-Unis). Le groupe, fondé en 1994 par le chanteur Germán Dominicé et le guitariste Carlos Senin auxquels se sont joints, en 2007 à l’occasion de l’enregistrement du premier disque du groupe, la pianiste Marcela Pedretti et le bandonéoniste Fernando Rezk, a adopté comme code vestimentaire un déguisement assez inconfortable et franchement étouffant, en particulier en été. Ce sont Germán et Carlos qui l’ont trouvé un beau jour, au dernier moment, alors qu’ils étaient sur le point d’arriver à une fête costumée : ils ont enlevé les deux appuis-tête de leurs sièges de voiture, se les sont attachés tant bien que mal autour du crâne et sont arrivés à la fête ainsi déguisés en... siège automobile. On les croit ou on ne les croit pas, toujours est-ils qu’ils affirment aujourd’hui que ces déguisements improvisés leur ont valu de remporter le premier prix de la soirée, un premier prix qui consistait en deux bières Corona (une marque mexicaine comme le sait tout un chacun, décapsulée avec l’ouvre-bouteille en cadeau, importés l'ouvre-bouteille comme les bouteilles elles-mêmes, cette marque qui n’a pas de mal à servir de trophée puisque son nom veut dire Couronne). La légende du groupe veut que Carlos se soit bu les deux bières à lui tout seul.
Ce succès de société les a convaincus d’adopter pour nom de scène celui de Frères Fauteuil (butaca, c’est un siège de théâtre, de voiture, de bus, d’avion...).
Leur premier CD est sorti le 22 novembre 2007, le jour de la Sainte Cécile qui est aussi le jour de la musique en Argentine (Sainte Cécile étant la sainte patronne des musiciens). Il est distribué par Pattaya et s’intitule Compañía Musical El Amanecer presenta: Los Hermanos Butaca (La Compagnie musicale L’Aurore présente : Les Frères Fauteuil).
Vous pouvez les écouter sur leur page My Space.
Ils joueront le 18 novembre, à 22h, au Plasma, Piedras 1856, à San Telmo (entrée 15 $).
Ils auront pour invité le chanteur-compositeur Pipo Cipolatti, venu lui aussi du rock qui partagea de 1982 à 2003 le leadership du groupe argentin Los Twist, avec Daniel Melingo (ils appartiennent tous les deux à la même génération).
J’ai déjà eu l’occasion de mentionner ce quatuor dans Barrio de Tango lorsque La Guardia Hereje les a invités à partager la scène du Conventillo de Teodoro, un samedi soir d’octobre dernier à Buenos Aires.