L’opposition l’avait bien dit que la loi de suppression des AFPJ (1) servirait à la Présidente pour acheter des voitures !... Je ne sais plus combien de Mini-Cooper pour sa fille, un chiffre faramineux... Tellement faramineux qu’il ridiculisait plutôt les opposants qui avaient eu cette brillante idée !
Tout ça parce que le couple présidentiel argentin venait d’offrir, en septembre, à sa fille aînée (22 ans) un gentil petit pot de yaourt à moteur et 4 roues de ce modèle-là... Or l’opposition avait prétendu que le Chef d’Etat comptait récupérer pour son usage personnel (sa campagne électorale, celle de son mari, celles de leurs alliés, les besoins du Parti Justicialiste, ses propres défraiements, que sais-je encore !) l’énorme somme que représentaient les apports faits sur les 14 ans qu’ont vécu les AFPJ par les travailleurs à ces dix organismes collecteurs désormais passés de vie à trépas (à tout le moins en leur qualité de collecteurs et gestionnaires d’un régime de base) et désormais confiée à l’ANSeS (l’administration nationale de sécurité sociale) qui servira aux ayant-droit des prestations en majorité supérieures à ce que les AFJP versaient tous les mois aux retraités actuels.
Eh bien... Eh bien... Cet argent, cette énoooormeeeee quantité d’argent sonnant et trébuchant va en effet servir à financer l’achat de voitures. Mais pas forcément des Mini-Cooper et pas vraiment au profit de la demoiselle Kirchner Fernández (elle ne remplit pas les conditions, non mais !)...
En fait, à partir de lundi prochain, les Argentins pourront aller retirer chez un concessionnaire automobile un formulaire qui leur donnera accès à un plan de financement gouvernemental d’achat pour l’acquisition d’une voiture particulière d’entrée de gamme. Cette opération est réservée aux personnes physiques qui pourront apporter la preuve qu’elles ont acheté une voiture neuve (0 km) avant et jusqu’en 2002 (il est donc en effet largement temps de changer de caisse, comme on dit en argot parisien). L’ANSeS (donc l’Etat) va financer l’opération en plaçant son argent à taux fixe dans les banques privées du pays et ces dernières commercialiseront les crédits auprès des particuliers selon un cahier des charges imposé par le Gouvernement. Cette opération appartient au plan de relance monté par le Gouvernement pour faire face à la récession mondiale et soutenir le secteur automobile. Les modalités en ont été négociées il y a deux mois avec celui-ci.
Du côté de l’acheteur, la mensualité de remboursement de ce prêt aidé ne pourra pas excéder les 30% du revenu familial. Le prêt sera accordé sous condition d’un apport minimum correspondant à 12 mensualités de remboursement et payable au maximum sur les 12 premiers mois (et non pas uniquement exigible à la date de l’achat) alors que l’achat total (apport + remboursement du prêt, capital et intérêt) pourra s’étaler sur 60 mois maximum. C’est l’ANSeS qui finance le complément, soit la somme restant à acquitter par l’acheteur à partir du 13ème mois. Ce sera un peu compliqué à calculer pour les banques et encore plus à comprendre pour le client lambda : 12 premiers mois au peso le peso (en 12 mois ou en moins) et les autres dans lesquels seront inclus les remboursements des intérêts du prêt, le tout pour une valeur fixe de la somme à débourser chaque mois sur toute la durée du prêt (ça évitera les mauvaises surprises pour les trésoreries familiales). Les véhicules éligibles à ce plan figurent sur une liste pré-établie comptant 18 modèles de différentes marques, à prix encadré, dont le plus économique semble être la Fiat Uno 3 portes à 29 150 $ Arg.
Du côté des banques, elles recevront en dépôt actif l’argent qu’est en train de leur remettre l’ANSeS. Elles devront le placer à taux fixe sur des produits non risqués et elles ne pourront l’injecter dans l’économie que pour accorder des crédits à la consommation correspondant exactement à ce plan. La somme totale confiée par l’ANSeS aux banques est de 200 millions de pesos argentins ($ arg). Les banques participantes sont alors dans l’obligation d’accorder à leurs clients, remplissant les conditions de solvabilité inscrites dans le cahier des charges, des financements étalés sur 60 mois maximum, sous forme d’un crédit à un taux égal ou inférieur à 16,25% (dans un pays, rappelons-le, qui souffre d’une inflation de plus ou moins 25% l’an). D’après Clarín (édition de ce jour), il semblerait que, dans cette opération, le Banco de Córdoba ait été l’établissement le plus réactif de la place, puisqu’il aurait déjà engrangé la moitié des sommes que l’ANSeS a commencé à verser aux banques depuis 15 jours.
Du côté des concessionnaires et de l’industrie automobiles, on pense que l’année 2009 devrait permettre de vendre 400 000 véhicules en tout, estimations de l’ACARA, la fédération des concessionnaires auto d’Argentine, qui semble bien optimiste, surtout si on pense que son chiffre ne tiendrait pas compte des incidences du plan gouvernemental ! (2). Amado Boudou, quant à lui, l’Administrateur de l’ANSeS, estime que le plan pourrait déboucher sur la vente de 100 000 voitures de plus que ce qui était prévu au moment des négociations.
Quant à l’ANSeS, elle percevra une commission de 8% qui lui sera prélevée par la banque sur chaque mensualité de remboursement payée par l’acheteur. L’argent dont elle dispose sert ainsi à faire tourner l’économie et à pallier les effets de la crise mondiale, dont au début de la semaine la Présidente a déclaré qu’il s’agissait non pas d’une crise économique (comme d’aucuns le proclament) mais des conséquences d’une vaste escroquerie de la part des Etats-Unis, qui ont trompé les autres pays et ont filé avec la caisse... Elle a de ses mots, des fois, Cristina !
(1) La récente loi a aboli le système de retraite par capitalisation en tant que régime de base au bénéfice du régime par répartition, désormais obligatoire et universel pour tous les salariés relevant du régime général (les employés de maison et les salariés agricoles relèvent d’autres régimes ou de pas de régime du tout, tout comme les salariés non déclarés, qui sont très, très, très nombreux).
Se reporter à ce sujet aux autres articles traitant du sujet dans ce blog.
(2) En Europe, le secteur, qui sent déjà le sapin, va en faire une jaunisse ! Sans parler des Etats-Unis, où la situation semble bien pire encore... ("sentir le sapin" : enfermarse de muerte. "En faire une jaunisse" : rechifflarse, bronquear, enojarse, sentir celos hacia algo).